C'est connu. Avant d'en arriver à un premier film, tous les cinéastes se font la main, et se cassent parfois les dents, sur des courts métrages. Il s'agit d'un passage obligé qui n'a rien d'un chemin de croix pour les réalisateurs, car ceux-ci profitent pleinement de ces occasions pour oser davantage. De cette façon, ils développent leur style, leur signature. Évidemment, les Québécois n'y échappent pas. Denis Villeneuve, Érik Canuel, Stéphane Lafleur… Ils ont tous fait bon nombre de courts métrages, dont quelques bijoux. Les avez-vous vus? J'anticipe un «non» collectif.
Terre d'accueil mon oil
Je suis désolé de vous apprendre ça, mais je vous l'annonce tout de go et sans gants blancs: l'Estrie n'a rien d'une terre d'accueil pour le court métrage, et par le fait même, pour l'émergence en cinéma. Je dirais même que ça fait pitié notre affaire… Alors que le milieu cinématographique québécois connaît une période faste par l'arrivée de bons et nouveaux réalisateurs, notre région ne peut pas se vanter d'aider à l'épanouissement de ces talents.
Pourtant, quelques festivals de courts métrages voyaient le jour à Sherbrooke au cours des dernières années. Que sont-ils devenus? Eh ben, ils sont tous morts de leur belle mort. La cause du décès? Ça s'explique principalement par le manque de public. Ainsi, les sous ont rapidement fait défaut pour chacun de ces festivals. Peut-être que les choses se seraient passées différemment si ces événements avaient uni leurs forces, mais ça, on ne le saura jamais…
Les organisateurs des soirées Prends ça court! peuvent également témoigner des difficultés et des frustrations liées à la diffusion du court en Estrie. J'en ai discuté avec Zoltan Buki, représentant local de cet organisme qui présente les meilleurs courts métrages d'ici et d'ailleurs. Pour lui, un grand travail d'éducation populaire à l'égard du court serait nécessaire.
Par où commencer? Premièrement, les médias devraient s'intéresser davantage à cette forme d'art. Celle-ci mérite une plus grande visibilité. Deuxièmement, il manque un lieu central, idéalement une salle de cinéma, qui se consacrerait aux courts. Des endroits non adaptés et variés avec des installations bric-à-brac, ça n'aide pas la cause. Ensuite, trop peu de porte-étendards du court métrage résident en Estrie.
Avouez. On ne peut pas dire que notre région compte un nombre délirant de cinéastes professionnels. Même ceux qu'on forme ici grâce à de belles initiatives telle la Course Estrie prennent rapidement le chemin de Montréal. Les difficultés du court peuvent expliquer cette autre problématique.
Est-ce donc une situation sans issue? Sûrement pas, car ils sont encore plusieurs à militer pour le court. Pour vous joindre au mouvement, ou tout simplement pour voir les meilleurs courts métrages québécois de 2008, rendez-vous au Tremplin (95, rue Wellington Sud) ce jeudi 26 février à 19h30 pour une soirée de Prends ça court! On y projettera Québec Gold, une sélection de courts récemment primés un peu partout sur la planète… mais pas en Estrie, car jusqu'à preuve du contraire, c'est ici que les courts se cachent pour mourir.