Vers une pérennité culturelle
Ce n'est pas la première fois que je vous en jase et ce n'est sûrement pas la dernière. Au risque de passer pour un vieux vinyle qui saute, je vous le dis à nouveau: les Cantons-de-l'Est n'ont rien d'une terre d'accueil pour les artistes professionnels. On ne les reçoit pas à coup de botte au derrière (pour ne pas dire au cul), mais ça n'a rien d'Hawaï, avec des filles en petite tenue qui leur souhaitent la bienvenue avec des «Aloha!» et des colliers de fleurs multicolores dans le cou. Bon, j'exagère peut-être un peu.
Oublions les extrêmes, car la réalité est que ceux qui pratiquent leur art dans la région ont bien souvent l'impression d'être laissés à eux-mêmes. Voilà qui n'est pas un scénario idéal; l'isolement, ça craint.
Même ceux qui sont originaires de la région prennent bien souvent la direction de Montréal, de Québec ou d'une autre métropole, en pensant que c'est la chose à faire pour accomplir leur métier. Après l'exode des cerveaux, c'est l'exode artistique. À mon avis, c'est tout aussi dommageable pour une région comme la nôtre.
C'est déplorable, mais dans certains cas, c'est compréhensible. Évidemment, ça dépend de la carrière que les artistes désirent mener, mais s'ils décident de vivre de leur art en Estrie, il serait bien qu'ils sachent qu'il existe plusieurs ressources à leur disposition.
Voilà un peu le message de Guillaume Houle, agent de développement au Conseil de la culture de l'Estrie, que j'ai rencontré cette semaine. En plus d'être un vieux pro des 5 à 7 et de croire en la force du réseautage dans le milieu culturel, il est responsable d'un projet s'adressant à la relève artistique des Cantons-de-l'Est qui porte le nom d'ORACLE… Mais soyez rassurés, ça n'a rien d'une secte.
Le pessimisme de l'ORACLE
Inspiré d'initiatives équivalentes réalisées au Bas-Saint-Laurent et en Mauricie (et qui ont porté fruit), le projet «ORACLE – Outiller la relève artistique et culturelle de l'Estrie» part de l'hypothèse que les jeunes artistes d'ici quittent la région et que ça pose problème à la pérennité de notre milieu culturel. Le pessimisme de l'ORACLE n'a rien d'exagéré, mais ça prend tout de même des chiffres pour prouver que la situation est dramatique.
Ainsi, une grande cueillette de données se déroulera du 14 au 27 avril auprès de la relève des Cantons-de-l'Est. Des entrevues téléphoniques et des groupes de discussion permettront de jaser de formation, de financement, de diffusion, de gestion de carrière… Guillaume Houle invite les artistes de 18 à 35 ans à y participer; il est encore temps de s'inscrire au http://www.cultureestrie.org/oracle/. Les résultats seront dévoilés le 9 juin au Théâtre Granada lors des Rendez-vous de la relève artistique de l'Estrie.
Si l'hypothèse se confirme, un plan d'action sera entrepris selon les besoins qui auront été identifiés. ORACLE permettra également de brosser un portrait de la relève et de prouver aux instances (Ville de Sherbrooke, Conseil régional des élus, ministère de la Culture, Forum Jeunesse Estrie…) qu'elle existe.
Finalement, si ORACLE était une secte, j'en ferais peut-être bien partie. Lever les bras, chanter en chour et suivre un gourou à la queue leu leu, ça le fait!