L’écho des Cantons

On n’échappe pas à l’éthique

Tout au long de ces élections municipales sherbrookoises, remportées in extremis par Bernard Sévigny, le chef du Renouveau sherbrookois, je trouve que nos candidats et notre candidate sont restés dignes et fiers. Ici, le débat n'a pas trop dévié (comme ce fut le cas à Montréal). L'attention est restée sur les engagements, et non sur les frasques de chacun. On a eu droit à un bel exercice de démocratie qui n'était vraiment pas gagné d'avance (comme ce fut le cas à Québec). J'ai l'impression qu'à Sherbrooke, l'idée de «voter pour le moins pire» ne s'appliquait tout simplement pas. La lutte fut chaude en raison de la qualité des sprinters. Dimanche dernier, ce fut hyper intéressant à suivre… jusqu'aux petites heures du matin!

Dérapage

Le seul véritable dérapage revient au Dr Guy Dumont, le conjoint d'Hélène Gravel. Prétextant une vilaine toux (vivement un cours d'acting), il a bousculé Marcel Gagnon, un journaliste de TVA Sherbrooke, après avoir appris les résultats du vote. La grippe A(H1N1) a le dos large, mais pas à ce point… Si vous n'avez pas vu ça, une visite sur YouTube s'impose (oui, c'est déjà partout sur le Net).

Plusieurs insultes (tout aussi subtiles qu'un 10 roues qui fait des huit dans un champ de fleurs) s'ajoutent comme la cerise sur un dégoulinant sundae. C'est déplorable. Après ça, je serais fort étonné d'apprendre que l'équipe d'Hélène Gravel entreprend une poursuite en diffamation contre le candidat François Godbout pour les propos qu'il a tenus en fin de campagne (il affirmait que Gravel effectuait une mauvaise gestion des finances alors qu'elle était à la tête de la Chambre de commerce de Sherbrooke). Vaudrait mieux être low profile pour un petit bout…

En plus de cette échauffourée physique et verbale, on a refusé l'accès de TVA au local de l'équipe d'Hélène Gravel au cours de la soirée du 1er novembre. Comment expliquer cette réaction des organisateurs de la campagne de Gravel? Était-ce simplement de l'amertume (plutôt compréhensible après une défaite par à peine 100 votes, soit un pâté de maisons de serrage de mains), ou est-ce que cela dissimule un réel problème? Après «l'argent et le vote ethnique», est-ce qu'un média peut être responsable d'une défaite électorale? Dans un contexte régional comme le nôtre, la question se pose.

Favoritisme?

Ainsi, Sherbrooke n'échappe pas à ce raz-de-marée de questionnements éthiques, mais ici, il prend une autre forme. Ce ne sont pas nos candidats qui se sont fait montrer du doigt par les médias, mais l'inverse. Est-ce qu'il y a eu du favoritisme, de la petite partisanerie dans la façon dont certains journalistes couvraient les différents candidats? Je ne crois pas. Je trouve que c'est un peu facile d'accuser TVA, sachant que Bernard Sévigny y a travaillé durant bon nombre d'années, mais il serait intéressant que la station dévoile le temps d'antenne qu'elle a offert à chacun des candidats. Question de montrer patte blanche.

Et qu'en est-il de la grande différence entre le sondage commandé par TVA et Le Journal de Sherbrooke, qui donnait Sévigny gagnant par une nette avance (diffusé le 28 octobre), et celui de La Tribune et d'Astral qui prévoyait une victoire à l'arraché de Gravel (publié le 30 octobre)? Il n'y a là aucun scandale, mais une belle démonstration de la beauté (et des limites) des maths; toutes les règles de l'art furent respectées.

Or, malgré le fait qu'on ne peut pas faire mentir les chiffres, il est toujours possible de donner plus d'importance à certains (par un traitement visuel favorable, par exemple), et c'est là que le bât blesse. Rappelons-nous que même si c'est mathématique, on ne peut pas échapper à l'éthique.