Orford, j'en suis!
L’écho des Cantons

Orford, j’en suis!

J'aime lorsqu'il y a scandale. Même une légère dissonance m'amuse.

La semaine dernière, à la toute fin de la conférence de presse du Festival Orford 2010, les amateurs de frasques en tous genres ont eu une belle réplique à se mettre sous la dent. Le commentaire assassin est venu d'un vieux monsieur anglophone (son accent l'a trahi) assis à l'avant, au centre de la première rangée. Moi, je me trouvais à l'arrière. Je n'ai donc pas compris ses propos mot pour mot, mais ça ressemblait à ceci: «Sommes-nous prêts, dans les Cantons-de-l'Est, à recevoir une programmation à ce point élitiste, considérant qu'ici, le degré de compréhension de la musique n'est pas aussi élevé qu'à Montréal?»

Croustillant, n'est-ce pas? Je suis sûr qu'en ce moment, vous grincez des dents. Stupéfaite, la foule très distinguée réunie dans l'un des pavillons du Centre d'arts Orford a émis un «Ooooooohhhhh!» de réprimande. Quant à Jean-François Rivest, nouveau directeur artistique du Centre (c'est un passionné, celui-là!), il a répondu à la question rapidement mais avec tact, en disant qu'à son avis, il s'agissait d'une programmation plutôt accessible. Quant à la comparaison entre Montréal et les Cantons-de-l'Est (une nouvelle rivalité?), il a joliment évité le sujet. On le comprend.

L'élitisme qui rassemble

Dans le fond, c'est vrai qu'elle est élitiste, la programmation du Festival Orford 2010… et c'est tant mieux.

Si l'élitisme, c'est de pouvoir compter sur la présence de Kent Nagano et de l'OSM pour toute une semaine de concerts-événements (du 31 juillet au 8 août), j'en suis.

Si l'élitisme, c'est de se laisser guider par Jean-François Rivest, qui a orchestré un festival selon quatre grands courants («L'âge d'or du romantisme», «Musique de notre temps», «Du spirituel et du sacré» et une série de coups de cour), j'en suis.

Si l'élitisme, c'est d'avoir su attirer des solistes parmi les plus prestigieux du globe (Till Fellner, Mari Kodama, Jörg Widmann, Jean Saulnier, Alexandre Da Costa, Anton Kuerti, Wonny Song, Jan Lisiecki, Aldo Ciccolini…), j'en suis.

Si l'élitisme, c'est de pouvoir assister à des performances de merveilleux ensembles (Tafelmusik, Quatuor Pacifica, le Nouveau Quatuor à cordes Orford, Camerata Orford, Constantinople, Sixtrum…) dans des contextes intimistes, j'en suis.

Si l'élitisme, c'est d'avoir conçu une série de conférences (avec Jacques Lacoursière, Nathalie Bondil du MBAM, Serge Bouchard, Charles Binamé…) qui me donne le goût de sortir mes vieux cahiers d'école, j'en suis.

Si l'élitisme, c'est de projeter gratuitement des films de répertoire (City Lights de Charlie Chaplin, Citizen Kane d'Orson Welles, Roma de Federico Fellini…) tous les lundis soir de l'été, j'en suis.

Et tout ça n'est qu'un bref aperçu de l'édition 2010 du Festival Orford. Visitez le http://www.arts-orford.org pour tous les détails.

Pas plus fin qu'un autre

J'écris «j'en suis», mais ça se veut inclusif, car je sais que les gens de l'Estrie répondront présents au Festival Orford cet été, tout comme ils l'ont fait l'an dernier (l'édition 2009 fut la plus achalandée de l'histoire du Centre d'arts). On est de même, nous autres. On remplit les salles de concert et les églises quand on nous y propose de la qualité, du grandiose, car justement, on s'y connaît en musique.

Et surtout, on ne se laisse pas écourer par ceux qui se pensent plus fins que nous.