L’écho des Cantons

Du pain et des jeux

«Panem et circenses».

Cette formule de Juvénal, un poète de l'Antiquité romaine doué pour la satire, signifie «du pain et des jeux». Elle évoque ce que semblaient être les besoins fondamentaux du peuple de Rome qui vivait alors dans la misère. Avec un bout de croûte et du cirque, tout le monde était ben content et laissait Jules César tranquille…

De nos jours, les mours ne sont évidemment plus les mêmes (et les politiciens s'y prennent autrement pour contenter le bon peuple), mais est-ce que les besoins ont changé? Les mots latins de Juvénal recèlent un certain sarcasme, mais ils sous-entendent que, du fait de sa nature sociale, l'homme a parfois besoin d'être diverti.

Le Guide alimentaire canadien n'en fait pas mention, mais il faut aussi nourrir l'esprit et le cour.

Cultures du cour

«Je crois que tout le monde devrait avoir la chance de profiter des bienfaits de la culture et je rêve du jour où la culture ne sera plus un luxe pour une personne. Aujourd'hui, l'exclusion a un obstacle de plus, nous devons nous en réjouir.»

Cette déclaration, elle est du comédien Gilles Renaud, porte-parole de l'Association québécoise des Cultures du cour. Le regroupement est d'envergure provinciale, mais la semaine dernière, c'est à Sherbrooke que s'est tenu son lancement. Depuis plus d'un an, les Cantons-de-l'Est servent de cobaye aux «expériences» de cette noble association… et les résultats sont prometteurs.

Le leitmotiv des Cultures du cour: la culture contribue à la santé globale de tout individu et développe chaque jour notre citoyenneté. L'idée n'est pas nouvelle, car un organisme équivalent existe en France depuis 12 ans. D'ailleurs, le volet québécois est né d'un partenariat avec son cousin français.

Dans le concret, cette association lutte contre l'exclusion des personnes démunies en leur permettant d'accéder gratuitement à différents événements culturels. Une visite au musée, un concert de musique classique ou un spectacle de danse, ce n'est pas comme du beurre sur les toasts, mais ça permet de contrer l'isolement et d'entamer une démarche globale d'insertion.

Voici quelques témoignages…

«Ça nous a fait du bien parce que nous ne sortons jamais. C'est un très beau cadeau.» «Ça vaut des pilules. Ça fait du social. Ça fait de la conversation dans le couple. C'est du positif du début à la fin.» «J'étais tellement contente. Ça faisait longtemps que je n'avais pas passé une aussi belle soirée. Ça change le mal de place. Ça donne le goût d'aller de l'avant.» «Je suis heureux d'avoir offert à ma fille son premier spectacle. J'ai aimé être entouré des autres.»

Ceux qui peuvent bénéficier de ce projet sont désignés par différents intervenants (travailleurs sociaux, de la santé, éducateurs, enseignants…). Les Cultures du cour les forment quant à cette action de «médiation culturelle» qu'ils peuvent désormais poser. En parallèle, l'Association travaille avec différents partenaires culturels de la région: le Centre culturel de l'Université de Sherbrooke, le Théâtre Granada, le Théâtre Centennial et le Réseau Centre. D'autres «joueurs» pourraient s'ajouter.

On a un grand terrain de jeu. Tant mieux si tout le monde peut en profiter.