Patrick Huard et les journalistes des Cantons
Avec le temps, j'ai appris à ne pas m'attacher à mes homologues.
En notre région, ceux et celles qui vaquent à la chose culturelle sont peu nombreux, et dans certains médias, la position semble vacillante. Sièges éjectables? Peut-être, mais sans parachute doré.
L'amie qui était à feu TQS (et qui ne fut pas de V de feu): rendue sur un autre réseau de la région de Québec. Celle qui était du show du matin à feu Énergie (avant l'arrivée du cousin germain NRJ): partie pour une autre station à Montréal. Et l'autre qui faisait tranquillement sa place à la télé de Radio-Canada Estrie: désormais en poste à Trois-Rivières. Si je me fie à ces trois exemples (anonymes, mais véridiques), vouloir travailler au rayonnement du milieu culturel dans un monde de médias en mutation, c'est souvent accepter de vivre sans port d'attache.
Ainsi, socialiser lors des conférences de presse et des événements médiatiques, c'est terminé pour moi. Désormais, j'ai un cour de pierre. Le sédentaire et stable employé que je suis ne veut plus d'amitiés dans ce milieu de nomades. Si j'avais l'air bête, sachez que c'est encore pire aujourd'hui. Derrière cette façade, je suis beaucoup trop fragile.
En fait, ne soyons pas naïfs, les temps ne sont pas gris uniquement pour le journalisme culturel. C'est tout un corps de métier qui en prend plein la gueule, et notre région n'y échappe pas.
Évidemment, je pense aux suppressions de postes à La Tribune (neuf emplois à temps partiel) alors que le quotidien est en négociations avec son syndicat pour le renouvellement de la convention collective. Triste. Ça m'a fait un choc lorsque j'ai appris cette nouvelle. Les dernières offres patronales? Rejetées à 87 % il y a de cela quelques semaines. Ma crainte: que les journalistes de La Tribune deviennent les martyrs de Gesca alors que sa petite révolution numérique se prépare.
Voulons-nous plus de journalistes ou un iPad? Malheureusement, le choix n'est pas si simple.
Meute fragile
C'est avec ces réflexions en tête que je me suis rendu mardi dernier à un événement soulignant la venue du spectacle d'humour de Patrick Huard au Centre culturel de l'Université de Sherbrooke en 2012 (pour tous les détails de la mise en vente des billets, allez lire ceci). Presque tous mes homologues y étaient; gros magma de journalistes, animatrices et chroniqueuses (que des filles mis à part l'auteur de ces lignes) autour de l'humoriste, sûrement inconscient du fragile équilibre de la meute.
Comme à l'habitude, il y avait quelques nouveaux visages dans le lot. J'ai tenté d'éviter leur regard. Ma technique: je me concentrais sur les questions que je voulais poser à Patrick Huard (qui fut ultra-généreux et sympathique).
À bien y penser, j'avais autant de questions pour mes camarades, mes «sours d'armes», à commencer par un inoffensif et bien senti «Comment ça va?». J'ai su me retenir.