L’écho des Cantons

Gérer l’incertitude

«L’ennui naquit un jour de l’uniformité.»

Je trouvais bien tournée cette phrase entendue je ne sais trop où, et elle m’est restée en tête. Victime de cette époque du «ici et maintenant», je l’ai googlée pour en connaître la provenance…

Il s’agirait d’un vers tiré de la fable Les amis trop d’accord d’un certain Antoine Houdar de La Motte (ça ne s’invente pas), écrivain et dramaturge bien connu en Paris à l’aube du 18e siècle:

«C’est un grand agrément que la diversité:
Nous sommes bien comme nous sommes.
Donnez le même esprit aux hommes,
Vous ôtez tout le sel de la société.
L’ennui naquit un jour de l’uniformité.»

Formulée de la sorte, cette morale fait ombrage à celles de La Fontaine!

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Que ce soit en raison du mouvement de grèves étudiantes qui prend de l’ampleur, d’une radicalisation de certaines options politiques, ou de ces grands projets de société qui se font envers et contre tout, vous conviendrez qu’il est difficile de s’ennuyer en ce début d’année annoncée comme apocalyptique. On pourrait croire qu’on a carrément échappé la salière dans la soupe.

Sans chercher de grands coupables à ce remue-ménage ambiant, je suis porté à mettre ça sur le dos de la mondialisation, un spectre qui m’intéresse par les temps qui courent. On l’oublie parfois, mais on est constamment sous son joug. Impossible de l’éviter.

Bon ou mauvais, ce phénomène s’accompagne d’une perte de repères, entre autres en ce qui concerne les valeurs de chaque société. Subséquemment, la gestion de l’incertitude s’avère une tâche ardue pour nos élus (souvent au pouvoir grâce à de maigres majorités); ils s’y affairent ne sachant pas trop à quels saints se vouer. La ligne dure (celle du parti) s’avère la voie facile.

Et j’en arrive à la culture (dans un sens très large). Malgré une convergence internationale, on peut constater que la culture d’origine demeure vigoureuse. Mais pour revendiquer correctement son identité, encore faut-il bien se connaître comme nation. Plus que jamais, en cette ère des communications, il faut prendre le temps de débattre au grand jour, tout en évitant les dialogues de sourds. (Appréciez la rime!)

Ainsi, ne serait-ce que pour vaincre l’ennui, poursuivons les luttes entre «amis trop peu d’accord». Nous n’en sommes pas à une crise près. C’est 2012, pardi!