L’écho des Cantons

Parrainer un politicien

J’ai vu une politicienne dans un show rock.

Du fond de la salle, j’ai aperçu la conseillère municipale Chantal L’Espérance attendant patiemment que débute le concert du groupe sherbrookois l a c k o f s l e e p. Je ne suis pas allé lui dire bonsoir – elle était avec sa gang, moi avec la mienne, et je craignais de perdre ma place -, mais je veux saluer sa participation à cette tardive manifestation culturelle. Peu importe la raison de sa présence à l’Antiquarius (archi-plein pour l’occasion), je trouve que ça symbolise une ouverture, une compréhension.

La vie culturelle en Estrie, ce n’est pas Marc Hervieux qui vient chanter ta toune dans un chic gala pour une bonne cause. Ce n’est pas vraiment le trio jazz cocktail de ton lieu de 5 à 7 préféré. Ce n’est pas tout à fait l’encan d’œuvres d’art éparses pour une fondation qui te tient à cœur.

Notre milieu artistique a beau être dynamique, il se terre trop souvent dans l’underground (celui des petites salles, des théâtres mal situés, des galeries anonymes…), et ce, malgré ses bonnes intentions de rayonnement. Qu’une politicienne de Sherbrooke en soit consciente, qu’elle puisse le constater de visu, étrangement (et sans aucun cynisme), ça me rassure un peu.

Pour me rassurer davantage (et puisque le soutien municipal est essentiel afin de provoquer une souhaitable émancipation), pourquoi ne pas démarrer un programme de parrainage politico-culturel? Imaginez ceci… Chaque politicien se voit jumelé à un artiste local qui le guide vers un digne événement culturel (qui risque de lui plaire).

Des exemples? Le maire Bernard Sévigny qui assiste à la nouvelle pièce des Turcs gobeurs d’opium dans les bas-fonds du Théâtre Léonard-Saint-Laurent. Le conseiller Serge Paquin qui applaudit le prochain in situ de la danseuse Élise Legrand, qui se sert du trottoir en dépit d’une scène. La conseillère Diane Délisle qui achète le disque de Noem – une autoproduction locale – après avoir dansé sans ses souliers lors d’un concert en plein air…

J’exagère (à peine), mais c’est ma contribution au brainstorming qu’effectue en ce moment le Conseil de la culture de l’Estrie afin de dresser un état des lieux quant à la place des arts dans notre région. Le mois passé, l’organisme a mis en branle un préambule consultatif pour les États généraux des arts et de la culture en Estrie qui auront lieu en 2013 (ou 2014). L’objectif: «développer une vision commune de l’avenir des arts et de la culture en Estrie qui soit crédible, stimulante et réaliste».

Et que fera-t-on de cette vision? Ça reste à voir.