Vous avez déjà visionné un épisode de la série Hard? Vous savez, cette production française diffusée à Tou.tv, passée plutôt inaperçue jusqu’à ce que James Moore en regarde un bout et la juge trop olé olé pour ses concitoyens.
Le ministre du Patrimoine canadien, qualifiant la série d’«offensante» et trouvant insuffisante la mention «16 ans et plus» inscrite sur la page de téléchargement, a ni plus ni moins demandé son retrait de la plateforme de diffusion de Radio-Canada. La société d’État, étonnamment docile dans le dossier – à quelques encablures d’un dépôt de budget qui lui fera très certainement mal, on a préféré ne pas partir en guerre -, a décidé que Hard serait tout de même accessible entre minuit et 4 heures du matin.
Hard. Parlons-en un peu.
Porté par mon souci habituel de précision journalistique, j’ai joué les oiseaux de nuit – je suis prêt à beaucoup pour toi, cher lecteur – pour jeter un coup d’œil à la dégradante émission. La trame tient à peu de choses: une jeune veuve réalise, à l’ouverture du testament de son mari, que ce dernier avait démarré en douce une entreprise de films XXX. D’abord sous le choc, elle va peu à peu s’encanailler et reprendre les rênes du business. Bilan de l’investigation: je suis finalement plutôt d’accord avec l’idée de ne pas montrer ça aux Canadiens. Sans rire. Seuls les motifs me distinguent de l’honorable James: si c’est pour nous épargner de tels citrons écrits sur le coin d’une table, réalisés avec des budgets faméliques et interprétés par des comédiens aussi charismatiques que ma poêle à frire, je dis oui au retour de la censure politique.
Sans compter que si on y va pour voir des fesses, la pêche est bien maigre. Je ne me permettrais jamais de présumer de la vie intime de James, mais disons qu’il a le porno facile.
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Que le Patrimoine canadien tente d’influencer la programmation de Radio-Canada est déjà grave, mais que penser de cette intervention pour le moins directe? L’actuel gouvernement fédéral ne prend même plus la peine de se creuser les méninges, en l’occurrence de revoir les critères de sélection des contenus radio-canadiens. Une émission ne cadre pas avec sa conception d’un diffuseur public, hop, on décroche le téléphone et on dit: «Retirez-moi ça des ondes!»
On appelle ça un précédent, et la constamment joviale bouille du ministre ne devrait pas détourner notre attention de la gravité de l’affaire. Voilà un criant exemple, un autre, du caractère malléable, chez nos politiciens de droite, de la notion de liberté. L’État te fout la paix, tes problèmes ne sont pas les nôtres, mais surtout respecte les règles!
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Conseil: voyez le plus d’épisodes possible de l’excellente série Le sexe autour du monde (TV5) avant que Harper et ses cowboys bien-pensants ne trouvent un moyen de l’interdire pour cause de petites culottes.
Vous avez attrapé la dernière, consacrée aux habitudes coquines des Allemands? On pourrait croire, poussé par quelque préjugé latin, que ces derniers sont timides en la matière. Ma foi, les Teutons sont au contraire très dégourdis. Parc réservé aux nudistes en plein Berlin, prostitution légalisée, avenue de tous les plaisirs à Hambourg…
Quand on voudra faire peur à l’honorable, dorénavant, on saura quoi lui dire: «Prends garde, James, sinon tu seras du prochain voyage diplomatique en Allemagne…»
Le ministre ne regarde-il que des services religieux,n’a-t’il jamais regarder non seulement la télé maisle monde autour de lui?C’est incroyable de réagir comme ça à quelque chose d’aussi inoffensif. Il y a bien pire que ça à des heures d’écoute plus grandes. Ça donne une idée de ce qui influence la façon de penser des conservateurs,cet espèce de pudibonderie hypocrite des groupes religieux très présents auprès de ses hautes instances.Tant qu’à parler d’obsènité(des vrais),ce fameu ministre n’a pas interdite la diffusion de la biographie dramatisée de Don Sherry à la CBC à des heures de grandes écoutes celle-là!
Il ne faut surestimer les conservateurs en croyant qu’ils jugent les produits culturels en fonction de leur contenu : ils ne se rendent jamais bien plus loin que le titre…
On se rappellera les mini-scandales qui ont entouré la sortie du film «Young People Fucking», petite comédie de moeurs pas trop osée, et la subvention accordée au groupe électro-torontois «Holy Fuck», essentiellement instrumental !
http://en.wikipedia.org/wiki/Young_People_Fucking#Controversy
http://www.bandeapart.fm/#/page/blogue-holy-fuck-repond-aux-accusations-du-gouvernement-harper
La vidéo virale de Brière, Rousseau et Rivard produite pendant les élections fédérales de 2008 demeure donc toujours d’actualité :
http://www.youtube.com/watch?v=n3HVFsIQ5M4