Les fins de campagnes sont fascinantes. Celle que vit la France actuellement – le premier tour des présidentielles aura lieu là-bas le 22 avril – en est le parfait exemple.
Les fins de campagnes sont fascinantes (à distinguer svp de passionnantes) parce qu’elles condensent jusqu’à un degré extrême tout ce qui nous donne la nausée devant les cirques politique et médiatique. Plus l’échéance électorale se rapproche, plus les candidats ressemblent à des coqs décérébrés, incapables d’autre chose que de phrases-slogans, qui évacuent à peu près toutes les préoccupations de leurs concitoyens excepté une ou deux.
Ils ne le font pas tout bonnement, comme ça, parce que le sang cesse d’affluer à leur cerveau. Quoique parfois. Non, ils le font en raison de la, décidément fascinante, dynamique électorale. Si l’un des ténors se concentre sur une thématique, les autres n’ont pas le choix de suivre, et paraîtront dissipés s’ils se penchent sur d’autres dossiers.
En France, depuis quelques jours, on jurerait qu’il n’existe plus qu’une poignée de problèmes à régler. Même le nucléaire, sujet chaud il y a peu, a été mis de côté. Tout se résume aux problématiques d’emploi, de sécurité et d’immigration (cette dernière expliquant commodément les deux autres, bien souvent).
Puisqu’une élection nous pend au bout du nez, à nous aussi, pourquoi ne pas chercher des moyens de débrancher le grand aspirateur central des rouages politico-médiatiques? Le Nouvel Observateur, bien connu magazine français, a eu récemment une initiative inspirante. Voyant venir le vide, la rédaction a demandé aux candidats à la présidentielle de préciser dans ses pages leur point de vue sur la question syrienne et d’endosser une ligne politique quant au rôle de la France advenant leur élection. Belle idée, que je propose de reprendre et de moduler ici. Les médias peuvent aussi incarner autre chose que des assistants-clowns.
L’invitation est donc lancée: transmettez-nous vos préoccupations d’ordre social, culturel, environnemental ou autre. Nous en tirerons une série d’engagements potentiels et verrons qui, des candidats en lice aux prochaines élections générales québécoises, est prêt à les contresigner. Ça n’a rien d’une idée en l’air, croyez-moi nous le ferons.
Avant que Jean Charest ne limite son vocabulaire à quelques mots – «la santé, la santé, la santé» ou autre fixation du genre -, avant que ses adversaires ne campent sur leur «priorité des priorités», établissons les nôtres.
Il y a là l’occasion de leur faire prendre une position claire sur la question des droits de scolarité, bien sûr, mais aussi dans les dossiers des gaz de schiste, des politiques culturelles, de la transparence étatique et de la lutte contre la corruption, voire de l’alphabétisation (avez-vous déjà entendu parler, durant une campagne électorale, de ce sujet pourtant crucial?).
La parole est à vous.
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Parlant d’alphabétisation, il a déjà été question ici du Romancier portatif, qui rassemble les meilleures chroniques de mon collègue Nicolas Dickner et dont les profits de la vente seront versés à la Fondation pour l’alphabétisation. À la publication du livre, en novembre dernier, notre objectif était de remettre un chèque de 10 000$ à la Fondation lors du Salon du livre de Québec.
Alors que s’ouvre le SILQ, nous y sommes presque, je lance donc le sprint final: vous trouverez Le romancier portatif (Éd. Alto, couverture jaune vif) chez tous les bons libraires. N’hésitez plus: vous allez vous régaler, et puis vous contribuerez à faire reculer ce qui au Québec est encore de l’ordre du fléau.
J’en profite pour donner un grand coup de chapeau au même Dickner, qui signe cette semaine sa toute dernière colonne Hors champ. Pendant six ans, Nicolas a publié ici des textes de haut vol, à cent lieues de la facilité et de l’opportunisme médiatique. Voilà sans doute pourquoi, chose rare, ses chroniques se relisent avec bonheur.
Grand merci Nicolas. Je me console en me disant que tu récupères ainsi un peu de temps à consacrer à ton prochain roman.
Bonjour,
C’est drôle, depuis que l’on sent au Québec une sorte de point de non-retour dans la destruction des acquis sociaux et que se prépare peut-être divers soulèvements de population (pas seulement des étudiants) représentant une majorité naturellement écrasée par la tangente résolument administrative et économique de nos dirigeants qui partagent désormais la même classe sociale que les dirigeants des grandes corporations, j’ai l’impression qu’on cherche à imiter la médecine occidentale: un symptôme = un médicament, plutôt que de se pencher sur la source du mal. Ce mal se situe peut-être dans la nature du lien entre dirigeant et dirigé.
La première question que je poserais à ceux qui prétendent à des postes de gestion nationale serait: En quoi réside, selon vous, la légitimité d’une administration étatique face à une population donnée? Ainsi, on aurait peut-être droit à de beaux exercices de patinage artistique comme à de bons discours passionnés. Reste-t-il des politiciens amoureux du bien commun? Nous pourrions allonger la suite des questions… Pourquoi, lors de la première victoire de Jean Charest, beaucoup de gens prévoyaient qu’il allait nous faire basculer davantage au fond de notre condition de population non plus coloniale, mais colonisée. À qui appartient la matière-même du territoire occupé par une population? Pourquoi nos propres dirigeants nous montrent, en plein jour, qu’ils favorisent les «personnes morales» que sont les corporations au détriment du peuple dont ils seraient sensés mener la destinée et le bien-être? La plupart pourrait nous répondre honnêtement que les règles du jeu leur ont échappé depuis longtemps et que sans investissement économique, il ne pourrait y avoir un minimum de niveau de vie chez les occidentaux et que malheureusement, ce système dérape et n’est pas récupérable, creusant d’immenses fossés entre ceux qui jouent le jeu dans la haute société et le reste des populations. Ce qui me révolte le plus, c’est d’entendre le ton «c’est pour votre bien» dans les discours qui tuent la dignité de la population.
À un Jean Charest, homme assez peu cultivé en général, administrateur amoureux du pouvoir et heureux de faire partie de la classe des chefs d’entreprise, je préférerais mille fois un candidat dont le fond de la pensée politique serait orienté vers le bien commun, mais qu’une fois au pouvoir, contraint par toute la machine affolée de l’économie de marché, il puisse, au grand jour expliquer à la population les rouages qui l’empêchent de réaliser ses ambitions populaires, cherchant par le fait-même des solutions dans un grand effort démocratique (que notre système parlementaire ne permet pas…). Il est toujours permis d’espérer, même les utopies: n’est-ce pas que la poésie (ou le sens des choses, et je dirais que le sens d’une chose est nécessairement poétique) est un des moteurs vitaux de l’être humain?
Que serait le premier article du bien commun québécois sinon la promotion (sauvegarde) de la langue française? Justement, on touche ici non seulement à l’alphabétisation mais à la qualité de l’enseignement, je dirais même, à son enthousiasme. Ensuite, serais-ce de permettre au peuple occupant le territoire de bénéficier lui-même des ressources de celui-ci? Puis, est-ce que la réforme-même du fonctionnement de la représentation démocratique et du parlementarisme ne serait-elle pas vitale au bien commun? Je ne parle pas ici d’une forme de socialisme contraignant, mais de simplement remettre la population au coeur de l’idéologie gouvernementale.
Merci!
Olivier Brault (Doc.Mus.)
Monsieur Malavoy,
C’est la première fois de ma vie que j’écris à un journaliste pour commenter ou pour faire valoir mon opinion. Et c’est aussi la première fois que je suis d’accord avec une position qui politiquement me tient à cœur. Votre proposition de demander aux médias de proposer ou de provoquer les thématiques du peuple directement aux politiciens qui veulent se faire élire.
Votre évaluation de la campagne électorale en France est très juste. Si vous suivez aussi la campagne américaine actuelle, c’est encore pire et plus évident. C’est une vraie comédie. On navigue d’un thème à l’autre sans proposer de solution. On ne fait que critiquer. Au Québec comme au Canada, l’approche est la même.
Les médias, imprimés comme électroniques, on non seulement le pouvoir et l’obligation de diffuser l’heure juste mais aussi de poser les questions que les citoyens se posent tous les jours. J’encourage les médias à être plus agressif en forçant les candidats à proposer et à élaborer des politiques qui ont une vision et surtout des solutions. Il faut que les médias forcent les débats et obligent le choix de solutions. Oui, je vous appuie sans réserve.
Pour ma part, j’aurais bientôt 68 ans et j’en viens à la décision suivant concernant les prochaines élections provinciales : je veux que les partis politiques promettre de mettre sur la table touts les programmes actuellement appliqués soient revues, analyser et priorisés selon une vision articulée. Que ce soit un parti de droite, de gauche ou de centre, ou encore social démocrate ou conservateur, il est essentiel et incontournable que cet exercice soit fait avant qu’il ne soit trop tard. Je pense à mes deux enfants et les petits enfants qui viendront. Comme certain le disent, on s’en va dans un mur. Il est urgent d’agir. Si aucun partie de propose pas cette démarche lors des prochaines élections j’annule mon vote.
Je supporte toute initiative qui va dans le sens de votre dernier article dans le Voir. Bravo.
Excusez mon français, j’ai fait des études en anglais et en français. Je ne suis pas mieux dans un comme dans l’autre.
Merci et bonne journée,
Anthony Thériault
Vendredi, 13 avril 2012
Ce que je reproche à la société en général, aujourd’hui, c’est le manque d’effort. Tout doit être facile, comme on voit si bien à la télé. Pour une personne comme moi, que son père conduisit au club de golf pour qu’il apprenne à » caddie » à l’âge de 7 ans, et qui travaillas tous les étés qui suivirent et les fin de semaines de l’hiver à soit pelleter , laver des planchers, ou livrer de l’huile à chauffage et qui à 66 ans travailles encore, je vois une société trop gâtée, habituée à ouvrir la bouche et tout tombe dedans. Pour parvenir à un changement radical il lui faudra souffrir. Ce n’est pas trois bons repas par jour plus toutes formes d’amusement concevable qui motivera cette populace à faire l’effort nécessaire pour produire le changement qui s’impose. Le seul but de nos gouvernements, municipal ou provincial, pour ne mentionner que ceux-là, c’est d’extorquer autant d’argent qu’ils peuvent de leur concitoyens,en taxes ou en amendes de toutes sortes (au lieu de surveiller et punir les voleurs d’auto, on donne une contravention au proprio qui néglige de barrer sa porte ) et l’on donne le moins de service possible. Vous n’avez qu’à faire une sortie près de chez-vous pour constater la négligence de l’entretien de la chaussée. Les viaducs s’effondre, les ponts tiennent par la rouille, on se croirait dans un pays du tiers-monde. Même parler sa langue demande trop d’effort. Une station de radio promet du » cash » si vous gagnez à un de leur jeu. Tout ce qui s’approche des corps de métier ( construction, mécanique etc ) est bourré de mots anglais; des drill des spring des brake et l’OLF s’ amuse à courir après un pomiculteur anglophone qui a écrit apple plus gros que pomme. Pendant ce temps mon épicerie Métro affiche le mot déodorant ( avec l’accent aigu,non moins ) plutôt que désodorisant et persiste même après leur en avoir fait la remarque à 3 reprises. Je n’ai plus envie de me battre même que je le fait encore pour des trivialités comme le désodorisant, mais je n’ irai pas marcher dans la rue après ma journée de travail sauf si j’ai très faim.