Notes de passage

Festival d’été

De l’avis de mes collègues de la Vieille Capitale, j’avais choisi le bon week-end pour faire escale à Québec, dont le fameux Festival d’été célébrait ses 35 ans d’existence avec une finale à la hauteur de ses ambitions. Le grand show anniversaire, mettant en vedette Diane Dufresne, Pierre Flynn, Charlebois et consorts, a semblé réjouir les festivaliers, dont les macarons lumineux clignotaient à qui mieux mieux sur les Plaines.

Mais avant de se réjouir de l’apothéose finale, on n’a pas été tendre envers la programmation un peu bancale du FÉQ, truffée de concerts-hommages et de valeurs sûres mais un peu tièdes. S’il est une chose dont le Festival se vante à juste titre, c’est d’avoir su éduquer le public en lui présentant gratuitement des musiques issues de cultures parfois méconnues sans jamais jouer la carte de la facilité. Ça, les artistes peuvent s’en charger eux-mêmes si ça leur chante, ce qui est exactement ce que je me suis dit en entendant le groupe chinois de Colombie-Britannique Silk Road, qui s’est fendu d’un petit rigodon arrangé pour cordes asiatiques.

Mais en cette période de difficile équilibre pour un festival dont on gruge les subventions (le couperet post-scandales libéraux risque de les faire sérieusement souffrir), il est difficile de plonger dans l’inconnu. Alors on se rabat sur des shows-hommages à tout le monde et son frère parce que ça rapporte des droits de diffusion télé. L’ennui, c’est que lorsqu’on présente des hommages symphoniques à Queen, on n’éduque personne: on fait appel au plus petit dénominateur commun. Les organisateurs devront plancher fort pour accoucher d’une équation qui leur permettra de concilier découvertes et rentabilité. Gros contrat.

En attendant, on continue d’avoir droit, pour presque rien (10 $ pour un macaron qui vous sésame-ouvre-toi toutes les scènes extérieures, c’est pratiquement donné) à des concerts de qualité. On a donc pu constater que Rachid Taha, quand il sait maintenir son équilibre éthylique, est capable de grandes choses que la grossesse de Mara Tremblay semble décupler son talent naturel. Que Jescze Raz, groupe gitan du sympathique Paul Kunigis, est tout simplement délicieux. Que les Dears peuvent remplir le Périscope avec leur pop-rock aux accents britanniques. Que Tanger, groupe rock français aussi élégant que méconnu ici, devrait voir ses disques distribués sur notre territoire. On en profite pour taper sur les doigts de Universal, qui n’a pas cru bon de rendre disponible, en copie domestique, le plus récent disque du groupe. Ça doit être la faute au méchant Jean-Marie Messier et ça explique pourquoi leur show payant au Théâtre Périscope s’est déroulé devant trois pelés et deux tondus. Bref, on a constaté que, malgré tout, il y avait encore plein de bonne musique à entendre au Festival d’été. Et on espère pouvoir dire la même chose dans les années à venir.

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Elvis has (not?) left the building…
MusiMax, le grand frère sage de MusiquePlus, est connu pour deux choses: les filles qui dansent à gogo au Max Lounge et les fameuses Musicographies. À partir de la semaine prochaine, la chaîne câblée diffusera sa plus importante musicographie à ce jour: 14 épisodes d’une heure consacrés à la carrière du grand Elvis, dont les personnes saines d’esprit célèbrent cette année le 25e anniversaire de sa disparition (les lecteurs du Weekly World News, eux, continuent de le croiser au supermarché). Histoire de marquer le coup, on fait donc venir en ville Joe Esposito, ami intime, ex-copain de régiment et ex-gérant de tournée du King, pour partager quelques souvenirs royaux avec la presse locale. Sympathique bonhomme que ce Joe, prolixe à souhait et pas désarçonné le moins du monde par des questions parfois bizarres des journalistes. L’homme s’est d’abord dit franchement étonné, mais néanmoins ravi, de constater que son vieux pote pouvait encore grimper au sommet des palmarès, malgré sa condition de cadavre depuis 25 ans (et tout ça grâce à une pub de chaussures sport et du remix qui l’accompagnait).

La conférence de presse, jusque-là banale, a failli déraper lorsqu’un fan enthousiaste l’a interrogé avec insistance sur la mort du maître de Graceland (Esposito a été l’un des premiers à découvrir le cadavre du King après son overdose de pilules). Après avoir donné force détails sur la position du macchabée sur le plancher de la salle de bains, Joe s’est souvenu qu’Elvis était mort un livre à la main. "C’était un livre sur le suaire de Turin", précisa-t-il à l’endroit de l’insistant inquisiteur. Puis, pour s’assurer que l’auditoire, majoritairement francophone, ait bien saisi à quoi il faisait référence, Joe s’est fendu d’une description de la sainte relique en précisant qu’il s’agissait "du morceau de tissu sur lequel serait imprimée la face… d’Elvis". Il s’est repris, bien sûr, rendant à l’autre roi ce qui lui revenait de droit, mais si vous voulez mon avis, cet hilarant lapsus en dit peut-être plus long que 14 heures de musicographie sur le statut mythique du King… Mais on regardera quand même la chose, qui sera diffusée du 3 au 16 août, à 20 h.