Notes de passage

Francs et ouverts

Lundi dernier, j’étais aux Francouvertes, sans contredit le concours le plus sympathique en ville, qui a couronné un huitième gagnant en autant d’éditions. Le tout s’est évidemment déroulé dans l’habituelle atmosphère bon enfant (il fallait entendre le parrain Fred Fortin expliquer le prix de la SOCAN au public: "Quand t’es artiste, des fois, tu vas chercher ton courrier, pis entre les comptes d’électricité pis de téléphone, tu trouves une enveloppe de la SOCAN. Faque tu prends le chèque qu’il y a dedans, pis tu vas payer les comptes…"). Mais Les Francouvertes, c’est aussi un concours sérieux, qui peut se targuer de posséder une excellente moyenne au bâton lorsque vient le temps de souligner le talent de la relève d’ici. N’y a-t-on pas couronné, lors des précédentes éditions, des groupes aussi signifiants (et toujours bien présents) que Loco Locass, La Chango Family et Les Cowboys Fringants?

Preuve indéniable de la qualité du talent que l’on croise aux Francouvertes: presque tous les grands festivals diffusant de la musique francophone (Coup de cour, FrancoFolies, Musique en Août) viennent y remettre des prix et y recruter des artistes qui ne dépareront pas leurs programmations.

Mon collègue Parazelli vous livre cette semaine ses impressions et moult détails sur les gagnants dans sa chronique Scène locale. Vous l’avez déjà lu, vous savez que la palme est allée à Syncope, un assemblage de musiciens d’origine nord-africaine et pure laine, mené par un certain Karim qui chante l’exil tout en saluant le cosmopolitisme de sa ville d’adoption. Sympathique et un rien consensuel, mais moins chaleureux que ne le suggère sa mouture rap-raï; on a presque l’impression que le groupe a gagné par défaut. Il faut dire qu’on ne donnait pas cher des Goules, une bande de givrés costumés de Québec à l’endroit desquels je n’entretiens pas le même enthousiasme que mes collègues Parazelli et Robillard Laveaux. Je ne sais pas ce que les gens de la Vieille Capitale fument pour inventer des bands pareils (de Satan Bélanger aux Cabochon, en passant par Les Standardistes, il semble que l’humour absurde ait toujours eu la cote à l’autre bout de l’autoroute 20). Cousins spirituels des George Léningrad, leurs chansons délirantes (comme ce Crabe de poche, dont j’aurais juré qu’il s’agissait plutôt de Gramme de pot) se dégustent à petites doses. Et une demi-heure, c’était trop.

Restaient les très rock Breastfeeders, qui n’ont probablement pas donné leur meilleure performance à vie, mais qui nous ont rassurés sur la santé du rock d’ici. En fait, voilà un band qui commence à souffler dans le cou du Nombre dans la course au meilleur groupe rock local. Ils s’en tirent avec une très honorable deuxième place et une foule de prix pas piqués des vers.

Un dernier mot sur le sujet pour vous dire que l’an prochain, Les Francouvertes, bien enracinées dans l’Est de la ville, quitteront le Zest, rue Bennett, pour s’installer quelques pâtés de maisons plus loin. L’administration de la Ville, qui fait parfois de bons coups, il faut le dire, a offert à l’organisme Faites de la Musique un tout nouveau local dans une ancienne caserne de pompiers située rue Sainte-Catherine, près de Pie-IX. On se revoit donc l’an prochain, même heure, nouveau poste.

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C’était à la une du Devoir, samedi dernier, sous le titre: L’Osstidcho, le mythe retrouvé. Notre estimé confrère Sylvain Cormier avait reçu, dans une enveloppe de papier kraft (on se croirait en plein Watergate), une cassette contenant un enregistrement inédit du légendaire concert réunissant Louise Forestier, Robert Charlebois, Mouffe et Yvon Deschamps. On devine l’émotion (et la bave coulant sur le menton) du chroniqueur face à la découverte de l’acte fondateur de la modernité culturelle québécoise. L’Osstidcho, dont il n’existait à ce jour aucun enregistrement, c’est notre Saint-Graal à nous.

Pendant qu’on s’interrogeait dans les médias sur la pertinence (évidente) de diffuser et/ou de publier ces bandes (le mythe se dégonflerait-il une fois immortalisé sur un éventuel CD? Probablement, et alors?), pendant qu’on établissait des pronostics sur la bataille juridique que se livreront les ayants droit advenant la commercialisation de la chose, j’ai été envahi d’une vague de joie indicible.

Alain Pétel, qui a découvert les bandes dans son grenier, affirmait à Montréal ce soir qu’il ne désirait pas faire une cenne avec la commercialisation de ces bandes. Il préférerait de loin que l’on crée une fondation au nom de son père, Pierre, responsable de cet enregistrement historique, pour venir en aide aux artistes multidisciplinaires. Je ne vois pas de meilleure façon d’honorer la mémoire de L’Osstidcho. Ne serait-ce que pour cette réjouissante suggestion, il faut impérativement faire paraître ce disque.

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Mea culpa, mea maxima culpa: la semaine dernière, dans mon compte rendu du concert des Roots, j’ai laissé entendre que le beat-box humain entendu au Métropolis était Rahzel. Stéphane Gagnon, le représentant de Universal, s’est chargé de me remettre à l’ordre en m’apprenant qu’il s’agissait en fait d’un nommé Scratch. Mes excuses.