«Ma petite entreprise
Ne connaît pas la crise…»
_ Alain Bashung
La guerre qui se déroule actuellement en Europe divise les observateurs. Certains disent que le grand gagnant de ce conflit est Milosevic, qui profite de l’absence de troupes au sol pour accélérer son processus d’épuration. D’autres affirment au contraire que c’est l’OTAN.
Mais en fait, le grand vainqueur n’est ni l’un ni l’autre. C’est Boeing.
Boeing est un fabricant d’avions. Mais c’est aussi le plus gros exportateur d’armes des États-Unis. Son petit side-line lui permet d’empocher cinquante milliards de dollars par année. En fait, les revenus de Boeing sont plus importants que le PIB de la plupart des pays d’Europe de l’Est.
Vous vous demandez pourquoi la Chine réussit toujours à se retrouver sur la liste des «nations les mieux considérées par les États-Unis», malgré ses violations répétées des droits de la personne? Parce que Boeing fait énormément de lobbying pour la Chine. Pourquoi? Parce que la Chine représente 10 % de son chiffre d’affaires.
Boeing arme l’armée chinoise. L’armée chinoise écrase les ouvriers qui tentent d’améliorer leur sort. Les compagnies américaines s’établissent en Chine, où elles ont accès à une main-d’ouvre à bon marché (cinquante dollars par mois) et non syndiquée. La Chine fait du fric, et achète de l’équipement à Boeing. Et Boeing fait du lobbying auprès de la Maison-Blanche afin que la Chine puisse continuer d’importer des biens produits aux États-Unis.
Bref, le monde est petit. Comme dit le gars dans la pub des Caisses Desjardins: «Je pense qu’on peut commencer à parler de Village global.»
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Actuellement, une grosse partie du matériel militaire utilisé par les forces de l’OTAN est fabriqué par Boeing, dont:
* Les transporteurs KC-10 Extender et KC-135 Stratotanker;
* Les avions de combat B-1B Lancer, B-2 Spirit, B-52 Stratofortress, F-15 Eagle et F/A-18 Hornet;
* Et les missiles SLAM (Standoff Land Attack Missiles).
Si le design industriel vous fascine, je vous suggère de consulter le catalogue militaire de Boeing, sur le site Internet de l’entreprise (http://www.boeing.com/defense-space/military).
Vous verrez, c’est de toute beauté.
On y apprend par exemple que Boeing a mis sur pied un département de recherche et de développement appelé Phantom Works. Phantom Works réunit les quatre mille plus grosses «bolles» de la compagnie (scientifiques et ingénieurs). Leur but? «Travailler de concert avec les clients afin de trouver la façon la plus rapide et la moins coûteuse de dessiner, développer, fabriquer, tester et opérer des systèmes de défense militaire.»
C’est ainsi que les as de Phantom Works ont développé une peinture hyper résistante permettant aux propriétaires de bombardiers d’économiser plusieurs millions de dollars par année. Grâce à ce produit révolutionnaire, les pilotes n’ont plus besoin de repeindre un crâne humain sur leur F-18 chaque fois qu’ils effectuent une mission. Ils sortent leur pinceau une fois, et ça suffit.
Et qui en profite, au bout du compte? Vous et moi. Moins de peinture, moins de dépenses militaires, moins de taxes.
«Grâce à Phantom Works, dit Boeing, nous avons réussi à réduire considérablement le temps et l’argent nécessaires à la fabrication d’un hélicoptère AH-64 D Apache Longbow.»
Quoi, vous ne connaissez pas le AH-64 D Apache Longbow?! Une merveille, je vous dis. C’est le meilleur hélicoptère de combat jamais fabriqué. Le malheur, c’est que son canon 30 mm prenait beaucoup de temps à charger. Et vous savez ce que c’est: quand on attaque une ville d’Europe de l’Est, chaque seconde compte. Or, les «bolles» de Phantom Works ont réussi à développer un nouveau système de chargement hyper performant. Grâce à cette invention, un soldat peut insérer 1075 balles dans le canon de son hélicoptère en moins de quinze minutes. Avant, ça prenait une demi-heure et trois soldats.
Parlez-moi d’une entreprise performante!
«On a diminué le temps de chargement de moitié et la lourdeur du système des deux tiers, dit l’ingénieur Thomas Johnston. Maintenant, un soldat peut charger son canon n’importe où.»
Le département militaire de Boeing emploie plus de cinquante mille personnes. Pensez-y lorsque vous regardez l’Europe flamber, à RDI.
Y a un peu d’eux autres, là-dedans…