Ondes de choc

Les petites pestes

Lundi dernier, une vaste étude portant sur la qualité des services de garde au Canada a été rendue publique. Selon ses auteurs, notre système de garderies est médiocre. 56 % des garderies pour bambins d’âge préscolaire ne fournissent pas d’activités stimulant le développement des enfants, et seulement 37 % des garderies en milieu familial offrent des programmes de haute qualité. 8 % des pouponnières et 7 % des garderies préscolaires offrent des services tellement pitoyables qu’elles sont considérées comme dangereuses pour la santé psychologique des enfants.

Bref, le portrait est loin d’être reluisant. Si l’on se fie à cette étude, la plupart des garderies ne sont que des parkings à bébés, où les petits glandent toute la journée en attendant le retour de leurs parents qui les ramèneront à la maison pour les nourrir en quatrième vitesse et les planter devant la télé.

Et on dit que nous aimons les enfants…

***

Cette étude n’est pas très surprenante. Elle reflète ce qui se passe en général au pays: une dégradation constante de la qualité de vie des jeunes.

Prenez les enfants battus, par exemple.

En mai dernier, le directeur de la Protection de la jeunesse indiquait que depuis 1997, le nombre de signalements reçus et retenus par la DPJ avait augmenté de 22 %.

Comme le signalait récemment Isabelle Hachey dans La Presse, l’admission à l’hôpital Sainte-Justine d’enfants victimes de mauvais traitements a plus que doublé depuis trois ans. "En 1996, on a hospitalisé environ trente-cinq enfants victimes de sévices physiques. Cette année, on en a déjà admis près de quatre-vingts", de dire Gilles Fortin, responsable de la clinique sociojuridique de l’hôpital.

Non seulement le nombre d’enfants maltraités augmente-t-il en flèche, mais de plus en plus de mineurs tirent le diable par la queue.

Selon Campagne 2000, un mouvement d’éducation populaire visant à sensibiliser les citoyens à la pauvreté des enfants, un enfant canadien sur cinq est pauvre.

En 1989, le gouvernement fédéral s’est engagé publiquement à enrayer la pauvreté infantile au Canada pour l’an… 2000. Que s’est-il passé depuis?

Le nombre d’enfants pauvres a augmenté de 49 %.

Le nombre d’enfants vivant dans des familles gagnant moins de vingt mille dollars par année a augmenté de 48 %.

Le nombre d’enfants vivant dans des familles recevant de l’aide sociale a augmenté de 51 %.

Et le nombre d’enfants vivant dans des familles monoparentales pauvres a augmenté de 61 %.

Tout ça dans le "plusse meilleur pays du monde"…

En surface, on ne s’est jamais autant occupé des enfants: la littérature jeunesse se porte bien, et chaque semaine, trois chanteurs "has-been" se transforment en clones d’Henri Dès pour raviver leurs carrières chancelantes. Les enfants ont leurs restos, leurs salles de spectacle, leurs boutiques de vêtements et leur téléphone cellulaire en plastique.

Mais dans les faits, c’est la merde.

Parlez-en à ceux qui ont des enfants en bas âge, et qui tentent désespérément de les inscrire dans une garderie. Une vraie farce.

"On a une liste d’attente de deux cents noms…"

"Trois cents noms…"

"Quatre cents noms…"

Pour s’assurer d’avoir une place, il faut maintenant inscrire son enfant quatre ans avant sa conception! C’est ce qu’a lancé une propriétaire de garderie à ma blonde lorsqu’on cherchait à inscrire notre petite dernière: "Nous n’avons malheureusement plus de place. Mais si vous planifiez d’avoir un troisième enfant, par contre, on pourrait l’inscrire tout de suite…"

***

Cette semaine, on apprenait que les couples gais pourront maintenant avoir des enfants grâce à une technique révolutionnaire de reproduction.

C’est fou comme la science est avancée. Vous pouvez accoucher à soixante-cinq ans, porter le foetus de votre grand-mère, vous faire inséminer par un cadavre, congeler votre sperme, multiplier vos ovules, faire pousser des jumeaux dans une éprouvette…

Chaque trimestre, les cracks de la génétique découvrent une nouvelle façon de fabriquer des enfants. On ne cesse de reculer les frontières de la conception. Bientôt, si ça continue, on vendra les bébés par paquets de douze au Club Price.

Le hic, c’est qu’une fois que les enfants sont là, on ne sait plus quoi faire avec. On leur fait guili-guili pendant une couple de semaines, puis on se tanne et on les case dans un sous-sol en ciment jusqu’à ce qu’ils soient assez grands pour se débrouiller tout seuls.

On parle souvent de développement durable quand il est question d’environnement: il faut cesser de penser à court terme, et planifier à long terme…

À quand un plan de développement durable pour la famille?