Ainsi, le torchon a recommencé de brûler entre Québec et Ottawa. Tout ça pour une histoire de drapeaux.
Le gouvernement du Québec demande à Ottawa de participer au financement des travaux de rénovation du Zoo et de l’Aquarium de Québec. Ottawa répond: "Oui, à condition qu’on puisse mettre des drapeaux partout." Et Québec rétorque: "Laissez donc faire, on se débrouillera tout seuls, le Québec n’a pas l’intention de faire le trottoir pour des bouts de chiffon rouge ou pour d’autres raisons."
Il n’en fallait pas plus pour que la face de Bernard Landry se retrouve à la une de tous les journaux canadiens-anglais, à la grande joie des amis de l’unifolié. Enfin, les défenseurs du pays ont trouvé un ennemi à combattre! Enfin, les éditorialistes du National Post ont quelque chose à se mettre sous la dent pour les deux prochaines années!
Que serait capitaine Canada sans un gros monstre dégoulinant qui menace de tout faire sauter? Batman ne serait pas un superhéros adulé des foules si le Joker n’existait pas. Ce serait un millionnaire anonyme, qui passerait ses journées dans son sous-sol, à laver son char et à repasser sa cape. Eh bien, c’est la même chose pour Stéphane Dion et compagnie: enlevez-leur leur Pingouin, et ils ne sont plus que des politiciens comme les autres. Tout juste bons à être entartés lors de soupes populaires.
La sortie de Bernard Landry fait donc l’affaire de tout le monde. Juste comme on commençait à s’ennuyer des montées de lait de Lucien Bouchard (que les éditorialistes canadiens-anglais dépeignaient comme une bombe ambulante), voilà que le futur premier ministre pète les plombs et remet la souveraineté à l’ordre du jour. Que peut-on demander de plus?
Les seuls perdants dans cet affrontement sont les citoyens. Ils réécouteront le même disque rayé au cours des deux prochaines années: "Joue pas dans ma cour", "Mon chef est plus fort que le tien", "Si tu ne me donnes pas ce que je veux, je claque la porte", na-na-na…
Comme Al Pacino disait dans Le Parrain 3: "I want to get out, but they keep pulling me back in."
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Les alliés de Chrétien ne sont pas subtils. Ils savaient très bien qu’en ressortant l’histoire des drapeaux, Landry grimperait aux rideaux; il n’avait tout simplement pas le choix. Quand on ne veut pas que le petit mette le feu à la maison, on ne lui donne pas un bidon d’essence et des allumettes.
Et puis, c’est quoi, cette obsession pour l’unifolié?
J’ai une amie qui a déménagé à Toronto, il y a quelques années. Ce n’est pas de sa faute, son copain s’est trouvé un boulot là-bas. Eh bien, il y a quelques mois, sa petite fille a commencé l’école. Mon amie est allée la reconduire dans sa classe. Qu’est-ce qu’elle a vu en entrant? Une vingtaine de bambins en train de chanter l’hymne national, debout, face au drapeau canadien. Son sang n’a fait qu’un tour.
Pas parce que c’était le drapeau canadien: parce que c’était un drapeau, tout court. Les amis de sa fille auraient chanté l’hymne de la Tanzanie devant le drapeau scout qu’elle se serait sentie aussi mal.
Dites-moi: en quoi le nationalisme canadien est-il plus noble que le nationalisme québécois?
Les fédéralistes canadiens ont toujours méprisé le nationalisme québécois; pour eux, ce n’est rien d’autre qu’une marque de tribalisme. Pourquoi se sentent-ils obligés de planter des drapeaux canadiens partout, alors? Pourquoi sacralisent-ils ainsi l’unifolié?
C’est comme les femmes qui se pompent aux stéroïdes afin de remporter des championnats de musculation. Elles sont aussi connes que les hommes.
Qu’elles portent une jupe et des talons hauts ne change rien à l’affaire.
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Quant à la réponse de Bernard Landry, permettez-moi d’en rire…
"Le Québec n’est pas à vendre, on n’a pas l’intention de faire le trottoir pour des bouts de chiffon rouge ou pour d’autres raisons."
Venant d’un homme prêt à se transformer en tapis de bain pour attirer les entrepreneurs étrangers au Québec, avouez que c’est assez savoureux.
Pas à vendre, le Québec? Voyons donc, monsieur Landry, vous n’avez fait que ça, au cours des dernières années! Multiplier les cadeaux, subventionner les multinationales, assouplir les lois, affaiblir le filet social, faire du porte-à-porte lors de tous les congrès internationaux afin d’attirer les gens d’affaires, passer des p’tits fours à Davos, donner les forêts aux bonzes de l’industrie du bois…
Si ce n’est pas faire le trottoir, ça, alors les péripatéticiennes de la rue Ontario sont des travailleuses sociales…