Ondes de choc

Femmes

Si vous avez regardé la télé au cours des dernières semaines, vous êtes sûrement tombé sur les fameuses images des statues géantes de Bouddha qui ont été détruites à la dynamite par les talibans, en Afghanistan. De toute façon, vous n’aviez pas le choix: tout le monde en parlait.

Tous les principaux organismes humanitaires se sont élevés contre ce viol du patrimoine mondial. Des milliers de personnes ont organisé des marches de protestation au Sri Lanka, au Bangladesh, en Inde. Kofi Hannan, le secrétaire général des Nations unies, est intervenu personnellement afin de sauver les monuments historiques. Les gouvernements égyptien et japonais ont envoyé des équipes de négociateurs en Afghanistan. Le Metropolitan Museum de New York a même offert aux talibans de leur verser de l’argent liquide afin qu’ils laissent ces statues tranquilles.

Un beau geste, qui fait chaud au coeur.

Ce qui est dommage, c’est qu’il ait fallu que les talibans s’attaquent â des statues vieilles de 2000 ans pour que les médias s’intéressent à ce qui se passe en Afghanistan.

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Les talibans, de dangereux extrémistes islamistes qui prennent le Coran au pied de la lettre, contrôlent le pays depuis septembre 1996. Depuis, ils n’ont cessé d’attaquer les droits fondamentaux des femmes.

Les femmes n’ont plus le droit de travailler.

Elles n’ont plus le droit d’aller à l’école.

Elles n’ont plus le droit de sortir de chez elles à moins d’être accompagnées d’un parent masculin (père, frère, oncle, cousin).

Elles doivent être voilées de la tête aux pieds.

Celles qui vivent seules doivent masquer les fenêtres de leur maison avec de la peinture noire, afin que les hommes qui marchent dans la rue ne puissent pas les voir.

Elles ne peuvent pas être examinées par des hommes médecins.

Elles n’ont plus le droit de conduire.

Elles n’ont plus le droit de pratiquer la médecine.

Toutes les femmes qui refusent d’obéir aux décrets des talibans sont battues, fouettées ou exécutées. Les exécutions se déroulent en public, dans des stades à ciel ouvert. Notons que les talibans se montrent tout aussi cruels envers les homosexuels. Ils les enchaînent à un mur, et leur foncent dessus avec un tank.

Sur son site Internet, la Feminist Majority Foundation, un ONG américain qui défend les droits des femmes partout à travers le monde, dresse la liste des actes terribles qui, chaque jour, sont perpétrés contre les femmes au merveilleux pays des talibans.

On a brisé les jambes d’une vieille dame parce que son mollet droit dépassait sous son voile. Une femme qui a osé instruire des jeunes filles en secret a été exécutée sous les yeux de son mari et de ses enfants. Une autre qui a tenté de fuir le pays en compagnie de son amant a été lapidée à mort. Deux prostituées ont été pendues devant des centaines de badauds le 25 février dernier, etc. (Selon Amnistie Internationale, lors des exécutions publiques, on utilise des enfants comme gardes de sécurité afin de contenir la foule en délire…)

Des membres de l’organisme Physicians for Human Rights ont pu récemment se rendre en Afghanistan, histoire d’analyser la situation de près. Dans le rapport qu’ils ont rédigé, ils affirment que 97 % des femmes qu’ils ont examinées souffraient de dépression sévère.

Cette situation est d’autant plus terrible qu’avant 1996, les femmes afghanes jouissaient d’une belle qualité de vie. À l’Université de Kaboul, 50 % des étudiants et 60 % des professeurs étaient des femmes. Idem pour 50 % des fonctionnaires et 40 % des médecins.

Plus de 180 organismes humanitaires luttent pour mettre fin à ce régime d’apartheid sexuel. Mais en avez-vous entendu parler dans les bulletins? Presque pas.

On préfère discuter du sort des statues. Plus photogéniques.

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Parlant de femmes, TV5 a diffusé une superbe émission spéciale sur Serge Gainsbourg, samedi. De la grande télé, fascinante de bout en bout.

Ce qui m’a frappé, c’est à quel point les femmes aimaient Gainsbourg. L’une après l’autre, de Zazie à Jane Birkin en passant par France Gall et Françoise Hardy, elles se sont succédé sur le plateau afin de vanter son charme et son pouvoir de séduction. C’était d’autant plus étrange que le monsieur est le pire misogyne que la France ait produit. Pelotant les petites filles, harcelant les starlettes, bavant son mépris des femmes sur les plateaux, se pointant un jour dans un gala en tenant une femme en laisse, traitant Catherine Ringer de pute et de salope. Comme l’a écrit Mano Solo dans Le Nouvel Obs: "Ses femmes, il en faisait des objets, c’est le plus grand proxénète que je connaisse." Mais, bon, elles craquaient toutes pour lui, paraît-il.

Le lendemain, j’ai regardé Lauzon Lauzone, le très beau film de Louis Bélanger sur Jean-Claude Lauzon. Au début du film, une des blondes de Lauzon se remémore leur première rencontre. "La première chose qu’il m’a dite, lance-t-elle, c’est que je devais bien sucer avec la bouche que j’avais. On s’est tout de suite retrouvés sur le plancher de la cuisine…"

Quarante ans de féminisme pour en arriver là. Entendre des femmes nous dire que le meilleur moyen de les séduire est de les traiter de chiennes et de suceuses.

Hé ben…