Ondes de choc

Bozos

La semaine dernière, à cause d’une erreur de production bébête dont nous sommes les seuls et uniques responsables, une pub en anglais s’est retrouvée dans les pages de Voir. Il s’agissait d’une pub pleine page pour le nouveau bar de Jacques Villeneuve, le Newtown.

Si elle avait impliqué une pub de lunettes ou de moto, cette malencontreuse erreur serait vite tombée dans l’oubli. On aurait reçu (avec raison) quelques courriels relevant le fait, et puis l’affaire aurait été classée.

Mais voilà, c’était une pub pour le bar de Jacques Villeneuve. Alors on en a parlé partout… jusque dans le bulletin de nouvelles de Radio-Canada! (Que voulez-vous, c’est l’été, on se débrouille avec ce qu’on a: les festivals, la canicule, les erreurs de production…)

Il faut dire que ces temps-ci, Villeneuve est l’ennemi juré des défenseurs de la langue, qui ne digèrent pas que son bar porte un nom anglais. Un affront d’autant plus grave que le pilote n’a pas construit son bar coin Mont-Royal et Fabre, mais rue Crescent, au coeur même du territoire ennemi!

Ô douleur, ô malheur…

"Il faut se souvenir pour ne pas sombrer dans l’oubli", disent nos amis nationaleux.

Justement, souvenons-nous. Quel était le surnom de Maurice Richard, l’athlète qui a incarné mieux que quiconque la fierté, l’orgueil et la témérité des Canadiens français?

Le Rocket.

Pas la fusée, non: le Rocket.

Si l’idole des Québécois avait eu suffisamment d’argent pour ouvrir un bar, comment l’aurait-il baptisé, selon vous?

Le Bar Rocket. La Brasserie Rocket. La Taverne Rocket. Le Rocket Bar and Grill. Chez Rocket B-B-Q.

Tout, sauf Chez Fusée Patates.

Nos amis nationaleux auraient-ils grimpé dans les rideaux, auraient-ils déchiré leur chemise à carreaux sur la place publique? Non. Ils auraient répondu: "C’est normal, c’est son surnom."

Eh bien, même chose avec Villeneuve. C’est normal qu’il appelle son bar Newtown, c’est son surnom. Si son surnom avait été Boum Boum, il aurait appelé son bar Boum Boum.

Et personne à la CBC n’aurait capoté…

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Parlant de nationalisme…

Voulez-vous me dire qui a eu la brillante idée d’inviter Raymond Lévesque au spectacle de la Saint-Jean qui se tenait au parc Maisonneuve à Montréal?

Oui, je sais, l’homme a écrit Quand les hommes vivront d’amour, une des plus belles chansons du répertoire francophone mondial. Mais c’était il y a des lustres. Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts.

Lévesque a changé. Il est devenu amer, frustré. Son humanisme légendaire s’est transformé en populisme puant, et l’auteur de Bozo penche maintenant à droite, dangereusement à droite.

N’a-t-il pas dit qu’il fallait interdire le droit de vote aux immigrants lors d’un prochain référendum sur la souveraineté? Que l’avenir de "notre" nation ne regardait que les Québécois de souche? Maudit bel exemple d’ouverture et de modernité… Maudit beau message lancé aux communautés culturelles…

Inviter un tel homme au spectacle de la Saint-Jean, c’est comme inviter Mordecai Richler à prononcer un discours lors de la Fête du Canada.

Que nous prépare-t-on pour l’an prochain: un rap de Raymond Villeneuve?

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Connaissez-vous Stéphane E. Roy? C’est un jeune auteur de théâtre qui a entre autres écrit la pièce Propagande, montée au Théâtre d’Aujourd’hui en octobre 2000.

Cet été, dans le cadre de l’émission matinale de Nathalie Petrowski à CKAC, Roy tient une chronique sur la critique. Genre: les critiques critiqués. Une idée qui en vaut bien d’autres…

Mardi dernier, Stéphane E. Roy a commencé sa série en s’attardant à un critique en particulier: Luc Boulanger, notre chef de section Théâtre. Pendant 10 minutes, Roy a littéralement chié sur Boulanger, lui décernant "une tomate pourrie".

Va. Ce sont les risques du métier. Quand on donne des coups, il faut s’attendre à en recevoir. Là où le bât blesse, par contre, c’est que notre jeune auteur n’a jamais dit qu’il s’était fait lui-même descendre en flammes par Boulanger lors de la présentation de sa pièce Propagande.

Dommage, cette information aurait aidé à mettre sa "critique des critiques" en contexte.

Nathalie Petrowski non plus n’a pas relevé ce détail important. Gageons que l’animatrice sera plus attentive lorsque son chroniqueur s’attaquera au critique de La Presse