Connaissez-vous Jackass?
Cette émission de télé brise toutes les cotes d’écoute sur le réseau MTV. Chaque semaine, les animateurs de Jackass essaient toutes sortes de cascades débiles. Ils se tirent une balle dans le ventre, se font exploser des pétards dans le cul, mangent des boules de neige qui ont mariné dans l’urine, sniffent du wasabi, vomissent, chient dans leur culotte, donnent un condom rempli de sperme à un chien, se brochent le scrotum et s’insèrent des jouets en plastique dans l’anus…
Bref, c’est le degré zéro de l’humour.
À côté de Jackass, Testostérone est une émission intellectuelle, et Marc Boilard a la finesse d’esprit d’un Bernard Pivot…
Le succès de Jackass est tel qu’on a décidé d’en faire un film. Jackass the Movie est en salle depuis quelques jours seulement, et déjà, le film a engrangé 25 millions de dollars. On dit que les trois quarts des spectateurs qui sont allés voir cette chose sont des hommes âgés de moins de 25 ans…
Jackass célèbre l’imbécillité. C’est la culture jock dans tout ce qu’elle a de plus bas, de plus veule et de plus arriéré. De la bière, du sperme et du sang, mon minou… On se pète la fiole en deux, on mange trois pizzas all-dressed avec du fromage à l’intérieur de la croûte, et on crisse le chat du voisin dans le four à micro-ondes pour voir ce que ça fait.
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Je ne sais pas si je suis le seul à penser ça, mais il me semble que le gros colon revient à la mode, ces temps-ci.
Vous savez, le gros twit épais qui tripe sur les Pizza Pockets, les calendriers de filles en bikini et les Monster Trucks.
C’est comme si, après avoir vécu en hibernation pendant trois décennies, le gros colon avait finalement décidé de sortir de son trou et de courir à l’air libre.
Quelle est la cause de ce réveil? Pourquoi ces grosses bêtes poilues et gluantes que l’on croyait mortes et enterrées sont-elles soudainement revenues à la vie? Qui les a clonées?
Comment sont-elles sorties du laboratoire?
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Le mouvement masculiniste, qui fascine tant les médias nord-américains, date d’une douzaine d’années, tout au plus. Sa naissance a coïncidé avec la parution de livres comme Père manquant, fils manqué, du psychanalyste québécois Guy Corneau (1989) et Iron John, du poète américain Robert Bly (1990).
Comme la montée du mouvement féministe dans les années 20 ou l’arrivée du Black Power dans les années 60, l’avènement du mouvement masculiniste au début des années 90 a eu l’effet d’une bombe. Après 30 ans de militantisme féministe, les hommes réfléchissaient enfin à voix haute sur leur place dans la société! Il était temps…
Malheureusement, comme dans les films de monstres japonais, cette bombe n’a pas eu que des effets bénéfiques: elle a réveillé de vilaines bibittes que l’on croyait à jamais disparues de la surface de la Terre. Des bibittes qui, aujourd’hui, attirent plus de 600 000 personnes chaque semaine à TQS.
Est-ce à dire que le mouvement masculiniste au grand complet mérite d’être jeté à la poubelle? Bien sûr que non.
Rappelez-vous Andrea Dworkin. Cette féministe hystérique affirmait que TOUTE pénétration vaginale, même lorsque pratiquée par deux adultes consentants, était une forme de viol. Dans son essai Intercourse, publié en 1987, Dworkin écrivait que "toute pénétration, même consentie, est une occupation forcée. Lorsqu’un homme pénètre une femme, il viole les frontières de son corps. Toute pénétration est une forme d’exploitation et de domination".
A-t-on pour autant décrié le mouvement féministe au grand complet? Non. (Cela, même si Gloria Steinem elle-même a affirmé que Dworkin était l’une des plus grandes intellectuelles du siècle!!!)
"Il n’y a pas UNE condition masculine, mais DES conditions masculines", écrivait mon confrère Luc Boulanger il y a deux semaines. De même, on pourrait dire qu’il y a plusieurs sortes de militants masculinistes.
Des gros machos infantiles. Des gars frustrés qui profitent de la vague pour cracher leur haine du féminisme et leur mépris des femmes. Mais aussi des hommes de bonne volonté qui veulent contribuer de façon intelligente à un débat important et fascinant.
Comme le mouvement féministe, le mouvement masculiniste est là pour rester. Pour le meilleur, mais aussi – parfois – pour le pire.