On parle beaucoup du scandale des commandites depuis quelques jours, et avec raison. Comment ne pas se scandaliser devant cette utilisation éhontée des fonds publics?
Cela dit, le plus choquant dans toute cette histoire, ce n’est pas que cent millions de dollars (soit 40 % du budget total du fameux programme de commandites) aient été frauduleusement versés à des agences de publicité proches des libéraux fédéraux.
C’est que ce maudit programme existe, point.
Car quel est le but premier du programme de commandites (qui, soulignons-le, a été créé au lendemain du dernier référendum)? Rappeler les grands moments de l’Histoire canadienne? Encourager la culture en région? Non: lutter contre le séparatisme québécois en faisant flotter l’unifolié aux quatre coins de la Belle Province.
C’est un vaste programme de propagande, sans plus. Financé à même les fonds publics.
"Je te donne de l’argent si tu fais flotter mon drapeau."
C’est comme Pepsi qui donne du fric aux institutions d’enseignement à condition qu’elles installent des machines distributrices dans leurs corridors.
Le gouvernement fédéral croit-il vraiment qu’il viendra à bout des séparatistes québécois en finançant des mini-séries sur Maurice Richard et en collant des drapeaux rouge et blanc sur le programme du Festival de la poutine de Saint-Glin-Glin? Si oui, il est dans le trouble pas à peu près.
Je tremblerais à sa place, moi aussi.
En regardant la retransmission des funérailles de Claude Ryan, vendredi, je me disais qu’on était en train de tourner la page. Lévesque, Trudeau, Bourassa, Bourgault, Ryan, tous les penseurs qui ont dominé le paysage politique des 40 dernières années appartiennent dorénavant à l’Histoire. "Les débats qui ont passionné ma génération et la génération de mes parents ne seront pas ceux qui passionneront la génération de mes enfants et celle de mes petits-enfants, me disais-je. Nous assistons à la mort d’une époque, d’une logique…"
Or, qu’est-ce qui monopolise nos conversations, ces temps-ci? Le programme de commandites! Un programme destiné à combattre le séparatisme québécois en collant des drapeaux!
Espérons que c’est le dernier sursaut avant le grand silence…
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Parlant de drapeaux, peut-être le savez-vous, mais on ne colle pas le drapeau canadien n’importe où, n’importe comment. Il y a une étiquette à respecter, des règles, un protocole.
Si vous cherchez où coller votre unifolié, visitez le site du ministère du Patrimoine canadien (http://www.pch.gc.ca/progs/cpsc-ccsp/etiquette), vous verrez, on en apprend de bien bonnes.
"Un drapeau doit toujours être montré et utilisé d’une manière digne, y lit-on. Il ne doit pas être dénaturé, mais arboré d’une manière qui puisse être décrite comme haute et libre…"
Un drapeau qui est échangé contre une subvention est-il utilisé d’une manière digne? Le document ne le dit pas. On affirme cependant que "la Loi sur les marques de commerce protège le drapeau national contre tout usage non autorisé", et que "toutes demandes d’utilisation du drapeau à des fins commerciales doivent être adressées au ministère du Patrimoine canadien".
Reste à savoir ce qu’est une "utilisation à des fins commerciales". Vendre du ketchup? Vendre une idéologie? Là encore, on ne spécifie rien. Une omission d’autant plus étrange que le site du ministère du Patrimoine canadien fourmille de détails hyper-précis.
Tenez, par exemple, saviez-vous que si vous recouvrez un cercueil standard d’adulte d’un drapeau canadien, celui-ci doit obligatoirement mesurer 1,40 m X 2,80 m? Eh oui, monsieur. De même, lorsqu’on suspend verticalement le drapeau du Canada au-dessus d’une rue, la pointe de la feuille d’érable doit être orientée vers le nord dans une rue est-ouest et vers l’est dans une rue nord-sud.
Jusqu’aux couleurs qui sont hyper-précises. Le numéro Pantone du rouge est PMS032 si le rouge du drapeau est utilisé à 100 %. Si le rouge est utilisé pour la reproduction de trame, il est préférable de prendre le PMS485. Pour assurer le rendu uniforme du rouge du PCIM, il faut procéder à des mesures de densité à l’aide d’un densimètre McBeth no 1155SPI. La densité doit être de 0,80 à 1,10 unité de densité, mesurée avec un filtre Wratten 58.
Je vous jure, je n’invente rien…
Comme quoi on ne badine pas avec le drapeau. Enfin, on ne devrait pas.
N’est-ce pas, monsieur Chrétien?