Ondes de choc

Non coupable!

On parle beaucoup de la culture de l’excuse, ces temps-ci. Mario Dumont qui demande à Jean Charest de s’excuser pour l’effondrement du viaduc de la Concorde, Jean Charest qui demande à Mario Dumont de s’excuser pour avoir insulté les chirurgiens-dentistes (il a dit qu’un ministre était "menteur comme un arracheur de dents"), etc.

Plus moyen de dire quoi que ce soit sans avoir à présenter ses excuses à un quelconque groupe de la société.

Effectivement, ce phénomène est extrêmement énervant. Mais savez-vous ce qui me tape encore plus sur le système?

La culture de la culpabilité.

Chaque jour (que dis-je! chaque heure), quelqu’un quelque part cherche à nous rendre coupable de quelque chose.

Vos enfants sont agressifs? Vous n’êtes pas assez sévère.

Ils n’ont pas confiance en eux? Vous êtes trop sévère.

Ils sont obèses? Vous ne surveillez pas suffisamment leur alimentation.

Ils sont anorexiques? Vous accordez trop d’importance à leur poids et à ce qu’ils mangent.

Bref, quoi que l’on fasse, on est coupable. Coupable de trop (ou de ne pas assez) les encadrer, de trop (ou de ne pas assez) les surveiller, de trop (ou de ne pas assez) leur faire confiance, de trop (ou de ne pas assez) les stimuler…

Terminée, l’époque où il suffisait de faire son possible. Aujourd’hui, les gens sont tenus de faire l’impossible.

Préparer des lunchs équilibrés aux enfants ET passer du temps avec eux ET prendre le transport en commun ET faire de l’exercice tous les jours ET dormir suffisamment ET se lever tôt pour aller mener la petite dernière à son cours de ballet ET performer au travail ET être informé ET prendre du temps pour soi ET participer aux réunions de parents à l’école ET aider les enfants à faire leurs devoirs ET recevoir des amis à souper ET développer une opinion éclairée sur les grands enjeux de société ET faire du compost ET rénover son logement ET faire son épicerie à vélo ET faire l’amour régulièrement ET, ET, ET…

Désolé, je veux bien, tout cela est très louable, mais ÇA N’ENTRE PAS DANS UNE JOURNÉE DE 24 HEURES!!!!

Pas étonnant qu’on tripe autant sur les suppléments alimentaires, style Oméga 3: ON EST CREVÉ!

FATIGUÉ, VIDÉ, VANNÉ!

Prenez une fin de journée typique, par exemple. Selon les experts en éducation, en nutrition, en psychologie infantile et en environnement (bref, tous les professionnels payés pour nous casser les couilles et nous rendre coupables), il faudrait rentrer chez soi en autobus (pour ne pas saboter l’environnement), aider nos enfants à faire leurs devoirs (pour qu’ils ne deviennent pas des tueurs en série), leur préparer un repas équilibré (pour ne pas qu’ils deviennent gros), jouer avec eux (pour ne pas qu’ils se sentent isolés), leur donner un bon bain moussant (pour qu’ils puissent relaxer), leur lire un livre avant le dodo…

Je m’excuse, mais si je faisais ça, mes enfants se coucheraient à 23 heures tous les soirs!!!

Parmi les donneurs de leçons les plus casse-couilles de la planète, les écolos sont certainement les plus déconnectés de la réalité. Voulez-vous me dire comment un pigiste qui a plusieurs clients, une demi-douzaine de rendez-vous par jour, des enfants qui vont à deux écoles différentes, et qui doit transporter un ordinateur, des dossiers et des sacs d’épicerie avec lui peut faire ça à vélo????

En prenant des cours de conduite au Cirque du Soleil???

À croire les défenseurs de l’environnement, les gens qui demeurent en banlieue sont de véritables criminels. Comme si la majorité des banlieusards vivaient à une heure de leur lieu de travail par choix! Comme s’ils tripaient sur les embouteillages! Comme si tout le monde avait les moyens de se payer un 5 1/2 au centre-ville!

Moi, j’ai pris une décision: j’arrête d’écouter les psys, les nutritionnistes et les disciples de Gaïa. Je fais mon possible, c’est tout. Je fais de mon mieux.

Et si ce n’est pas suffisant pour vous, désolé, mais je m’en fous.

Non seulement je refuse de me sentir coupable, mais je ne m’en excuse pas.