En ce moment, ça ne fait plus les manchettes, mais cet hiver, ça n’a pas été facile marcher dans la Vieille-Capitale! La Ville de Québec a reçu son lot de plaintes sur la qualité du déneigement des trottoirs. Même des hôpitaux ont exprimé leur désarroi, leurs urgences débordaient de piétons blessés.
Un ami en fauteuil roulant a eu toute la misère du monde à aller voir sa copine. Le trottoir était impraticable pour lui. Des parents se demandaient comment ils pouvaient se déplacer avec leurs poussettes.
Il y a même certains quartiers de Québec où, depuis quelques années, les trottoirs sont déneigés que d’un côté de la rue. Des quartiers où les résidents sortent directement sur le trottoir. Pour reprendre un thème cher à Québec, les deux côtés paient pourtant les mêmes taxes.
Être piéton, c’est téméraire. C’est presque du militantisme, un acte de résistance. Pas seulement l’hiver. C’est là le problème. L’été, on réussit à négocier avec les contraintes parce que les trottoirs sont dégagés. La dangerosité étant en bonne partie disparue, on s’accommode de cet urbanisme conçu pour la voiture.
Un exemple frappant est cette vidéo où l’on voit un piéton marcher sur le chemin Sainte-Foy, entre Calixa-Lavallée et Belvédère. Combien de temps pour joindre ces deux coins de rue? Plus de cinq minutes. Et la majorité du temps, le piéton est immobile: il attend le «petit bonhomme» pour traverser.
Piétons Québec est un organisme citoyen né l’automne dernier afin de donner une voix aux piétons. L’équipe est composée de citoyens et citoyennes vivant à Montréal, Sherbrooke ou Québec, comme la porte-parole, Jeanne Robin. Selon elle, «le Québec est très en retard sur la place du piéton».
Elle suggère de regarder comment on rénove une rue ou un boulevard. On va analyser la largeur des voies des voitures, on va regarder l’impact sur le stationnement, on va s’assurer de la fluidité des voitures, mais pas de celle des piétons. En fait… on ne planifie, en général, rien pour le piéton.
«C’est pas seulement une présence de trottoir, explique la porte-parole. Il y a un choix d’aménagement aussi. La bibliothèque de Beauport, par exemple, est collée sur une autoroute, collée sur des centres d’achats, elle n’est pas accessible à pied.»
Jeanne Robin fait remarquer que les quartiers les plus piétonniers sont les plus vieux, conçus à des époques où les gens se déplaçaient à pied. Les quartiers des dernières décennies, surtout dans les banlieues, ont tous été conçus pour l’automobile. Marcher est-il un concept dépassé?
Il est curieux de voir comment nous voyons la marche, maintenant. On ne la voit pas comme un moyen de transport, mais comme un loisir. On a aménagé de superbes promenades pour marcher le long du fleuve ou de la rivière Saint-Charles, mais ces endroits ne servent pas à se déplacer, ils servent à se promener.
Selon Jeanne Robin, la marche rencontre présentement le problème que le vélo avait il y a quelques années. Bien qu’il ait encore son lot de défis devant lui, le vélo est reconnu maintenant comme un moyen de transport.
Tout au plus, on va se dire que la marche est un moyen de transport pour les pauvres, pour ceux qui ne peuvent se payer le luxe de l’automobile. Et comme nous sommes dans une époque où l’on tend plus vers le minimum pour soutenir les pauvres, les handicapés ou les personnes âgées… faut-il s’étonner qu’on ne se fasse pas de soucis pour les piétons? Le pire là-dedans, c’est que c’est justement cette clientèle qui est la plus perdante dans tout ça.
Un piéton en santé va se débrouiller, en ville. Ajoutons-lui un enfant, une hanche fragile, un handicap quelconque, une blessure, une maladie, ou même simplement des bagages, et «ça devient vite impraticable, souligne Jeanne Robin, et ça va s’aggraver avec le vieillissement de la population».
La Ville de Québec accorde 30 secondes pour traverser la rue Saint-Joseph, large de deux voies. Un coin de rue plus loin, on a seulement 20 secondes pour traverser le boulevard Charest… large de six voies. Tu n’as pas le temps de boiter! Swigne ta marchette pis traverse le boulevard!
La marche est le moyen de transport le plus accessible, le plus simple, le plus universel, le moins cher – autant pour la société que pour l’utilisateur. Et c’est en plus le moins polluant!
C’est aussi le plus beau. Jeanne Robin m’a fait réaliser que c’est avec des photos de rues pleines de piétons que l’on vend Québec à l’extérieur. De la même façon, ce n’est pas le trafic de Paris ou les stationnements de New York qui nous donnent envie d’aller là-bas. Le dynamisme d’une ville se vit par ses espaces piétonniers. Québec a tout à gagner à miser sur le piéton.
Belle analyse !
Je vais travailler à pied et passe par la rue Montbray. Je manque de me faire frapper une fois par semaine au moins et je ne dis pas là le nombre de sueurs froides !
M. Bergeron,
Vous avez oublié le nouveau fléau : les maudits chevalets de trottoir, que chaque propriétaire ou gérant se sent obligé de planter devant son commerce, comme si l’enseigne et les produits dans la vitrine n’étaient pas suffisants pour qu’on se fasse une idée de ce qui est vendu à l’intérieur.
Visuellement, c’est très laid.
Ça nuit à la circulation des piétons et des fauteuils roulants.
Ça constitue une appropriation privée de l’espace public.
C’est pourquoi j’invite tout le monde à les faire tomber en passant à côté!
Vous avez oublié un autre fléau monsieur Bergeron. Les Nobel de génie qui se déplacent à pied le nez sur leur cellulaire sans regarder où ils vont, sans se soucier des feux de circulation aux intersections. J’ai failli en renverser un alors que j’avais mon virage prioritaire à gauche et que lui traversais en pitonnant frénétiquement sur l’appareil diabolique, inconscient de ce qui se passait hors de son monde, son nombril, sa petite personne. Même un petit coup de klaxon ne l’a pas détourné de sa mission vitale…et virtuelle…
Je suis membre de l’association « Rue de l’Avenir » France.
De passage au Québec, j’ai pu déplorer le manque de prise en considération du piéton et des personnes handicapées dans l’espace public. Il y a beaucoup à faire aussi en France, mais nous avons quelques villes qui savent mieux que d’autres prendre en compte la marche et le vélo dans les aménagements urbains. Venez nous voir !
François Prochasson
Nantes