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Parle-moi folk…

 

La musique folk a plusieurs visages, plusieurs tonalités, plusieurs couleurs, plusieurs origines, plusieurs identités, bref, elle est plurielle. C'est en réaction à cette diversité et surtout à la rumeur qui courait voulant que les Prix Junos retireraient une de leurs deux catégories de musique folk/traditionnelle que le «facteur de guitares» Grit Laskin – aussi cofondateur des disques Borealis – a décidé de créer les Prix de la musique folk canadienne (PMFC). L'éditeur du magazine sur la musique folk, roots et world Penguin Eggs, Roddy Campbell, se joignit à lui ainsi qu'une petite poignée de gens partageant la même passion. La première édition se tînt le 10 décembre 2005 au Musée canadien des civilisations (MCC) de Gatineau; la seconde se déroulait l'an dernier à Edmonton, et voilà que le jeune happening musical revient à Gatineau.

Bien que les PMFC embrassent très largement le patrimoine musical canadien – avec les traditions musicales des peuples autochtones, celtiques, acadiens, québécois, sans oublier la musique des auteurs-compositeurs, le blues, le bluegrass, le country, etc. -, les organisateurs peinaient jusqu'à ce jour à attirer les candidatures francophones. «Chez les artistes, les maisons de disques et même le public, le mot folk est très peu utilisé. Pourtant, en 20 ans, il y a eu beaucoup d'artistes folk qui ont produit des disques, mais on englobe tout dans le style pop ou pop-rock. Qu'on pense à Richard Séguin: même cette année, sa compagnie de disques l'a inscrit à l'ADISQ dans la catégorie pop-rock, ce qui est extrêmement étonnant puisque avec son dernier album, il est revenu à ses anciennes amours», explique Carole Pigeon, membre francophone du conseil d'administration des Prix folk et agente d'artistes. Effectivement, semblerait que les Franco-Québécois n'auraient pas la même définition du mot folk – le rattachant à tort aux termes folklore ou traditionnel – que leurs homologues anglos et auraient une propension à utiliser les catégories «pop» tel un joyeux fourre-tout.

Carole Pigeon ne s'est pas découragée pour autant en cognant aux portes des différentes compagnies de disques. Le résultat de son dur labeur: la catégorie Meilleur auteur-compositeur francophone a reçu suffisamment de candidatures cette année pour être finalement ouverte. Les finalistes dans cette catégorie sont les Québécois Guillaume Arsenault de Bonaventure, Sylvie Jean d'Alma, 3 gars su'l sofa établi à Montréal, Hugo Fleury, anciennement de Polémil Bazar de Québec, et Michel Marchildon, installé à Montréal mais originaire de la Saskatchewan. Des francophones sont aussi présents dans d'autres catégories: Les Charbonniers de l'enfer sont en lice dans les catégories Meilleur album traditionnel et Meilleur groupe, La part du quêteux dans celle du Meilleur album traditionnel; la néo-Montréalaise Sara Rénélik, la formation Labess et les Gitans de Sarajevo sont finalistes pour le Meilleur album de musique du monde; finalement, Brigitte St-Aubin est finaliste comme Meilleur artiste de la relève.

Autrement, parmi les autres finalistes, notons que Bruce Cockburn arrive en tête de liste avec quatre nominations; David Francey le suit de près avec trois nominations. Soulignons aussi que des artistes de la région sont en nomination: The Mighty Popo est finaliste dans la catégorie Meilleur artiste du monde; Ian Tamblyn comme Meilleur artiste solo et Kyrie Kristmanson comme Jeune artiste de l'année. «Le folk est très vivant présentement au Canada et ça touche le Québec: il y a une espèce de revival, mais personne ne le sait! Il n'est pas nommé comme tel, mais c'est bien ce qui arrive avec les Cowboys Fringants, Marie-Annick Lépine, Tricot Machine, Mes Aïeux, Michel Rivard, pour ne nommer que ceux-là. Même Pierre Lapointe pourrait être considéré comme artiste folk dans le sens où ce n'est pas de la ritournelle pop qu'il fait, même s'il est plus du style "chanson française"», d'ajouter Carole Pigeon.

La cérémonie qui se tiendra ce 1er décembre au Musée canadien des civilisations sera animée par le musicien récipiendaire d'un prix Juno, Benoit Bourque (Le Vent du nord), en français et par Shelagh Rogers de CBC Radio One en anglais. Billets: 1 800 385-FOLK ou à la billetterie du MCC. www.canadianfolkmusicawards.ca