Sur le fil

Allez, tous au Salon!

Le canapé de style victorien à l'effigie duquel le logo du Petit Salon des Arts a été fondé est suspendu au-dessus du porche – ce qui n'est pas sans en faire jaser plusieurs.

Il y a de ces fleurs qui poussent au milieu d'un feuillage dissous sans qu'on daigne les apercevoir et soudain, leurs couleurs évanescentes attirent notre oil et achèvent de nous convaincre que l'on doit en prendre soin; arroser leurs feuilles, leur tige, leur terre fertile. Il en va de même d'un petit espace tout ce qu'il y a de plus sympa qui vient de naître, avenue Cyr, en plein cour du «quartier français» de Vanier à Ottawa: Le Petit Salon des Arts. Je n'en avais pas eu mot jusqu'à ce que l'aimable proprio en personne me donne un coup de fil pour me faire part de sa récente floraison.

Frédéric Daty, graphiste et artiste français trentenaire ayant tenu agence de publicité à Paris pendant quelques années, a tassé les meubles du rez-de-chaussée de sa résidence datant du début du 20e siècle pour y recevoir des convives comme dans les salons artistiques français du 18e. C'est ainsi qu'il présentait, en novembre 2007, l'opus 1 de son événement Émergence, qu'il souhaite répéter tous les trois mois. Près de 300 personnes se sont massées la première fois – pour admirer les ouvres sur les murs des quatre salles d'exposition sur deux étages et apprécier la musique -; la seconde devrait n'être que plus prospère.

Lui-même artiste de l'ombre, Daty – qui partage la maison avec femme et enfants – souhaite d'abord et avant tout que les créateurs de différentes disciplines et amants des arts se rencontrent pour échanger, philosopher, débattre. Il désire aussi créer un espace sans contrainte et sans but lucratif où on ne parle pas business. Les potentiels acheteurs ou galeristes sont ainsi invités à faire directement affaire avec les artistes; leurs coordonnées étant d'ailleurs fournies à même le site www.lepetitsalondesarts.com. Son Petit Salon détonne brillamment des galeries classiques qui peuvent paraître «intimidantes, froides» et où le décorum et l'artifice prennent parfois toute la place; ici, c'est intime, chaleureux, et on est même reçu avec champagne et mignardises – lire truffes maison! – lors des vernissages.

Les artistes en herbe ne se sont pas encore précipités au 295, avenue Cyr, mais ils ont été assez nombreux pour que prenne forme l'opus 2 et que d'autres éditions suivent. Et pas besoin d'avoir fait les Beaux-Arts pour avoir droit à son pan de mur chez M. Daty, les artistes peuvent n'en être qu'à leur première «sortie de leur tanière». «Il y a plein d'artistes qui se cachent en ce moment à Ottawa. Je me demande où ils sont. (…) L'idée, c'est vraiment d'aller chercher les gens qui, à la limite, font des choses chez eux et qui n'auraient même pas l'idée de les exposer, quoi», explique en toute honnêteté M. Daty, qui, pour sa part, fait dans la peinture et les sculptures de métal (www.fredericdaty.com).

Des projets d'avenir bouillonnent aussi dans ce quartier qui tend, lentement mais sûrement, à faire plus de place aux arts. Des événements thématiques historiques ou gastronomiques sont notamment dans le collimateur de la famille Daty. Dans la même rue, une maison d'ouvriers typique datant de la fondation d'Ottawa a par ailleurs été achetée par la Ville, qui veut en faire un modeste musée. Des collaborations pourraient suivre. Ce n'est qu'un début…

 

Casser la coquille

Le vernissage de l'opus 2 d'Émergence se tiendra le 23 février prochain de 18h à 22h. Les ouvres de Nicole Beaumont (peintures sur toile et bois), Ysabelle Choung (sculptures céramiques), Jeff Ngan (photographie) et Frédéric Daty lui-même seront exposées, alors que la soirée sera entrecoupée des performances musicales de Jacqueline Woods (piano), Louise Ebeltoft (harpe) et Prairie Cat (formation pop). Après cet opening qui est véritablement le point d'orgue de l'événement – ayant pour logo un ouf pour évoquer cette coquille qu'on désire casser chez l'artiste -, la maisonnée sera ouverte aux visiteurs du 24 au 29 février de 10h à 12h et de 15h à 20h.

Alors que des projets comme celui de la Société de musique de chambre d'Ottawa de construire une salle de concert communautaire semblent flancher à quelques semaines de leur date butoir, voilà que ces petits bourgeonnements nous redonnent foi au printemps et nous convainquent de passer au Salon!