Retour sur ma chronique de la semaine dernière intitulée «Les cloches sonnent», qui portait sur la fermeture d'églises dans la région et qui voyait dans leur conversion en salles de spectacle une possible solution pour les réanimer, les sauvegarder. Je donnais en exemple l'église de Saint-Sauveur, qui envisage ce scénario mais voilà qu'un collègue a attiré mon attention sur une église d'Ottawa qui aspire aussi à cette métamorphose. L'église St. Brigid de la rue Saint-Patrick à Ottawa a été vendue à quatre investisseurs privés issus de la communauté irlandaise qui souhaitent en faire un centre artistique et culturel pouvant recevoir des performances de toutes sortes, que ce soit en musique, en danse, en théâtre, ou encore des expos, lectures, conférences et réceptions. Rien de moins.
Après de houleuses négociations de vente – compliquées par le statut d'édifice patrimonial de l'église et la poursuite en cour de paroissiens qui souhaitaient empêcher la transaction -, voilà que l'archevêque d'Ottawa, Mgr Marcel Gervais, annonçait en mai 2007 la fermeture définitive du lieu de culte, faute de financement. Heureusement, l'édifice de 118 ans – conçu par l'architecte John R. Bowes et construit par des travailleurs du canal Rideau – est tombé entre bonnes mains. Les nouveaux propriétaires comptent bien préserver le caractère historique et l'architecture mêlant motifs victoriens et éléments néogothiques de l'église. Or, pour transformer un espace de 800 sièges en un viable centre culturel, il faut des sous, beaucoup de sous. Selon le Ottawa Citizen, qui s'est entretenu avec Patrick McDonald, un des propriétaires, il en coûterait environ cinq millions de dollars pour le rénover. De nouvelles toilettes, un foyer, de nouveaux sièges et le réaménagement du sous-sol feraient partie des plans. Les enthousiastes acquéreurs – qui souhaitent en faire une organisation sans but lucratif – prévoient rencontrer des bâilleurs de fonds privés et les différentes instances gouvernementales prochainement afin de trouver le financement.
N'est-ce pas qu'Ottawa se distinguerait si, au lieu d'investir des millions dans la construction de nouveaux espaces (comme le projet de salle de concert au centre-ville qui bat malencontreusement de l'aile), elle misait plutôt sur la restauration de quelques-uns de ses vieux édifices et églises à l'architecture et à la valeur historique exceptionnelles? L'expérience en elle-même de la prestation scénique ne serait qu'enrichie par des salles au cachet inégalable qui, dans leur réaménagement, marieraient magnifiquement l'ancien et le moderne. En ce sens, St. Brigid est un exemple intéressant. Cette église renferme deux toiles de l'illustre peintre montréalais Toussaint-Xénophon Renaud, qui a peint des murales dans près de 200 églises au Canada et en Nouvelle-Angleterre entre les années 1880 et 1945. St. Brigid serait un des rares lieux de culte où il est encore possible d'admirer son travail. Et qui sait quels autres trésors Ottawa renferme?
Musiqu'en nous reste
C'est sorti dans l'actualité la semaine dernière sans trop faire de vagues: le festival Musiqu'en nous menacé de disparaître. Mais, après une rencontre au sommet entre les membres de l'assemblée générale du festival, les organisateurs, bénévoles et festivaliers, on annonçait que sa 15e édition aurait bel et bien lieu, dans une version allégée. Ainsi, après s'être fait jouer dans les tripes avec des nuages gris planant au-dessus du Salon du livre et du Festival du film, voilà que l'Outaouais voyait un autre de ses joyaux culturels menacé. Et pas n'importe lequel: Musiqu'en nous est reconnu pour la qualité de sa programmation et de son organisation et constitue sans contredit un des festivals d'été les mieux orchestrés de l'Outaouais, toutes proportions gardées. J'adore ce petit événement niché dans le pittoresque village de Saint-André-Avellin dans la Petite-Nation. Il m'a emmenée à voir des sucrées de belles prestations, que ce soit de Pierre Lapointe, Catherine Major, Afro Connexion, Ariane Moffatt et j'en passe, et ce, sans compter les artistes de la relève! Bon, je l'avoue, j'ai négligé mon festival chouchou l'an dernier, trop prise que j'étais «en ville». C'est pourquoi je vois d'un très bon oil que le festival retourne à ses dates antérieures, soit en août (l'événement portant originellement le nom de Musiqu'en août) plutôt qu'à la fin juin, alors que battent le Festival de jazz d'Ottawa ainsi que les festivités de la fête nationale québécoise et de la fête du Canada dans la région de la capitale fédérale. Cela n'enlève rien au fait que nos événements culturels sont sous-financés et négligés et que certains bailleurs de fonds devront se réveiller! D'ici là, Musiqu'en nous a besoin de nous pour faire pression et assurer sa pérennité. J'espère qu'on y sera nombreux.