En chanson
«La vie c'est plus marrant, c'est moins désespérant en chantant» — Michel Sardou
Si Cole Porter aime Paris et Frank Sinatra aime New York, voilà que Martha Wainwright jette son dévolu sur Wakefield… N'est-ce pas déjà de la musique aux oreilles que ces deux entités réunies dans une même phrase? C'est le mariage improbable mais ô combien poétique qui a résulté du concours Great Canadian Song Quest organisé cet automne par CBC Radio 2. Inspirée par des classiques comme New York, New York ou I Love Paris, la station a voulu renflouer sa banque de chansons traitant d'endroits affectionnés au pays… Pour chaque province, les internautes pouvaient voter en octobre dernier parmi cinq lieux (préalablement choisis par vote populaire) et parmi cinq chanteurs canadiens. Ainsi s'ajoutent aux Bobcaygeon de Tragically Hip ou Running Back to Saskatoon de The Guess Who 13 chansons qui marient des auteurs-compositeurs à un lieu de leur province d'origine.
Étonnant que pour le Québec, parmi cinq lieux sélectionnés, ce soit Wakefield, plus précisément le Black Sheep Inn, qui ait gagné la faveur populaire. La liste comprenait pourtant Montréal – qui a été gâtée ces derniers temps avec Je reviens à Montréal de Moffatt, Montréal – 40 °C de Malajube, Montréal de Xavier Caféïne et j'en passe -, la ville de Québec – qui n'a rien à envier non plus -, le Wilensky's Light Lunch et la Gaspésie. Mais c'est le petit bar à spectacles qui a pignon sur le chemin Riverside du pittoresque village qui a séduit. Outre Martha Wainwright, les interprètes en lice étaient Cour de Pirate, Angela Desveaux, Malajube et Bïa. Difficile de trancher, mais le talent brut, la voix suave et les paroles franches de la belle Montréalaise conviennent parfaitement au Mouton noir… «Get in the car we're late for the gig / But don't go too fast it's been snowin' since 10 am (…) Just over the bridge, crossin' the Gatineau / To the side that I know where the light becomes strange / And we'll never be this free again», chante-t-elle dans Four Black Sheep in The Night. Et plus tard: «Mom and Dad are on their way, they know these roads / They've been travelling a lonely life / Black sheep they too were born in the night». À quand un spectacle de la belle dans la municipalité de La Pêche? Faudra surveiller. Peut-être attendra-t-elle la neige, comme dans sa chanson?
Sur la Toile, on a reproché à Martha de ne pas traiter concrètement de l'auberge devenue mythique, mais les paroles descriptives et didactiques ne donnent jamais de grandes chansons, n'est-ce pas? Je préfère l'approche poétique, brutale, que Martha a choisie dans sa chanson à la finale tragique.
Pour l'Ontario, Hawksley Workman a dû mettre en relief les étendues verdoyantes du parc Algonquin. D'autres «mariages» intriguent: Joel Plaskett chante The Cabot Trail de la Nouvelle-Écosse, Hey Rosetta!, le parc national Gros-Morne de Terre-Neuve, et Lucie Idlout, la Road to Nowhere du Nunavut.
Un seul regret: aucune chanson en français ne brille dans cette compil. Les communautés francophones sont pourtant présentes partout sur le territoire, pourquoi ont-elles encore une fois été esquivées? Dommage.
Pour connaître les chansons gagnantes ainsi que les lieux et auteurs-compositeurs lauréats, visitez le site www.cbc.ca/radio2, où il est possible d'écouter des extraits des chansons. Les pièces entières se trouvent sur iTunes.
Aucune chanson en français? C’est un concours de la CBC, pas de la SRC…
Et je suis convaincu que la chanson de Martha Wainwright a été choisie par des Québécois… D’Ottawa!