Juste pour rire
Respirez profondément. Détendez les muscles de votre visage, de votre corps. Ouvrez la bouche en un rictus et laissez-vous aller à une série de «ha!» bruyants et inarticulés. Répétez l'exercice et vous voilà fin prêts à vous prêter à la gymnastique singulière de la Journée mondiale du rire le 2 mai, sur la colline du parlement! Présenté pour une troisième année consécutive, l'événement pourrait résonner plus fort cette année alors que son organisatrice, la professeure certifiée en yoga du rire, Sophie Terrasse (photo), a mis les bouchées doubles pour faire entendre ces éclats de voix – date propice, lieu stratégique, stationnement gratuit.
Et qui a dit que l'esplanade de la colline ne recevait que des manifestations contestataires? Ambitieuse, la directrice de l'Institut Tournesol – qui offre un club de rire – souhaiterait même faire d'«Ottawa la sérieuse» la capitale du rire!
Comme moi, je parie que vous imaginez mal les membres du cabinet – et encore moins ceux du Sénat – se prêter à une séance de yoga du rire, cette pratique créée il y a 15 ans qui compte aujourd'hui 6500 clubs de rire dans 65 pays. Pourtant, des études conduites en Inde et aux États-Unis ont démontré comment une telle pratique pouvait être bénéfique pour les entreprises: amélioration de la performance, de la créativité, de l'esprit d'équipe, de la gestion du stress, etc. Or, pour se prêter à une séance de rire, il ne suffit pas de lâcher un clown dans l'arène d'une salle de réunion. Pour qu'on en retire les bienfaits physiologiques et psychologiques, le rire doit s'étaler sur 10 à 15 minutes. Or, aucune bonne blague ou quiproquo ne saurait nous faire rigoler aussi longuement. C'est pourquoi la pratique implique des exercices structurés, de la respiration yogique, des étirements, etc.
Dans son fantasme de capitale du rire, Sophie Terrasse imagine que chaque structure professionnelle détiendrait des gens formés pour animer des mini-clubs de rire quelques minutes par jour. Plutôt que d'en griller une ou d'engloutir un café lors de la pause, pourquoi ne pas renforcer son système immunitaire et produire des endorphines – «substances chimiques du bonheur»? se demande l'enthousiaste formatrice en yoga du rire. «Le corps ne fait pas la différence si le rire est réel ou simulé. C'est d'abord et avant tout un exercice physique: on parle d'un jogging interne, ça va masser tous les organes internes. C'est un exercice cardio extraordinaire: 1 minute de rire équivaut à 10 minutes sur un "rameur"», précise la dame au rire haut perché et sautillant.
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Ottawa, capitale du rire, ce n'est pas pour demain, mais Sophie Terrasse compte bien en convertir quelques-uns ce dimanche de 11h à 12h30. À tous ceux qui voient en cette journée une occasion d'aller se moquer ou de tomber dans le cynisme, la thérapeute dit: halte-là. Le rire jaune, moqueur, méprisant devra rester au vestiaire. Le rire des yogis porte plutôt un message de santé, de joie et de paix.
Dans les années 50, une personne riait en moyenne 18 minutes par jour, alors qu'aujourd'hui, la statistique a chuté à 6 minutes. Un peu moins de sérieux ne nous ferait peut-être pas de tort après tout…