Ça s’améliore
It Gets Better. Vous avez probablement vu récemment sur votre blogue préféré ou à la lecture de votre news feed Facebook que bon nombre de personnalités – des vedettes! – ont publié sur la Toile une vidéo portant ce titre. It Gets Better. Ça s'améliore. Que ce soit devant la bouille de Rick Mercer, qui se remémore ses années à l'école secondaire où il se faisait tabasser, ou celle de Jake Shears, chanteur des Scissor Sisters, qui témoigne avec émotion des pires mois de sa vie – ceux ayant suivi son coming out -, on ne peut qu'être profondément touché. It Gets Better, le projet, a été mis sur pied en réaction à la vague de suicide liée à la jeunesse LGBT (lesbienne, gaie, bisexuelle et transgenre) américaine. Comment véhiculer un message de persévérance et de ténacité à la jeunesse queer, qui ne l'a pas facile? Le mot se passe, tranquillement.
Dans nos médias de masse, la place des membres de la communauté LGBT semble de plus en plus acceptée, voire même favorisée. Nos séries télé, nos longs métrages, nos romans les dépeignent davantage comme des personnes normales, qui vivent communément à la façon de monsieur et madame Tout-le-monde, à des lieues du personnage dessiné à gros traits d'Eric McCormack dans Will & Grace ou, chez nous, des personnages tout en conflits de Janette Bertrand dans son Amour avec un grand A. La vie queer se révèle de plus en plus traitée non pas comme un enjeu intrinsèque et un pivot de l'intrigue, mais comme un fait en soi (pensez à Xavier Dolan dans Les Amours imaginaires). Tu es gai. Correct. Tu es lesbienne. Correct. T'es pas sûr? Bah, correct!
Jason St-Laurent, directeur de la programmation du festival LGBT Inside Out, dont la quatrième édition ottavienne se tiendra au Musée des beaux-arts du Canada jusqu'au 5 décembre prochain, abonde en mon sens, en émettant toutefois quelques réserves. «C'est vrai qu'on a fait du chemin. Mais on a quand même droit à certains stéréotypes qui encrassent l'opinion publique. L'éternelle promiscuité sexuelle. La prépondérance des archétypes. C'est la raison pour laquelle le festival Inside Out existe: briser ces moules dans lesquels on essaie de nous cantonner. Le cinéma gai et lesbien éprouvant d'énormes difficultés à percer le mainstream, il est important qu'il existe des vitrines vouées à ce genre.»
Selon St-Laurent, la programmation – qui provient notamment de communautés gaies et lesbiennes plus méconnues, dont le Pérou et la Tunisie – opte pour la variété et se révèle la plus intéressante depuis les débuts du festival: «le meilleur du cinéma à travers les pays et les genres». Il souligne au passage The Secret Diaries of Miss Anne Lister, une production de la BBC qui relate la vie de Anne Lister, la «première lesbienne de l'ère moderne en Grande-Bretagne», ainsi que le drame péruvien À contre-courant, lauréat du prix World Cinema au festival Sundance 2010, qui – tel un Brokeback Mountain latino – raconte l'histoire d'une passion interdite entre Miguel, un homme de famille villageois, et Santiago, un jeune éphèbe récemment débarqué au village.
Reste à savoir si la tenue d'un tel festival rassemblera la communauté LGBT ottavienne, qui semble éparse – le projet d'un village gai étant toujours sur la glace – et à la recherche d'une oreille sympathique qu'on tarde à lui tendre. «Il est clair qu'avoir un village ici aurait facilité notre campagne médiatique. Je crois que la communauté queer d'Ottawa est forte et que le seul fait de se battre dans l'adversité tisse des liens entre les différents intervenants, qui sont extrêmement forts.», termine St-Laurent.
Pour des informations à propos du festival Inside Out: www.insideout.ca/ottawa10.
Film d'ouverture du quatrième festival Inside Out d'Ottawa, The Secret Diaries of Miss Anne Lister propose un regard sur la vie de la première lesbienne moderne de Grande-Bretagne, Anne Lister.