Sur le fil

Voir rouge

Des dizaines de milliers de citoyens ont pris part à la marche du Jour de la Terre du 22 avril, un raz-de-marée qui en dit long sur notre société prête à sortir dans les rues, à faire trembler la terre pour se faire entendre.

C’était d’une grande beauté. Bravo.

Pendant ce temps, ici, en Outaouais, c’était le branle-bas de combat, alors que les troupes – entre 200 et 250 personnes selon les estimations – étaient rassemblées à l’École secondaire du Versant pour accueillir comme il se devait notre premier ministre, Jean Charest.

Celui-là même qui s’était maladroitement moqué de la situation estudiantine au Salon Plan Nord quelques heures plus tôt, déclenchant une petite tempête médiatique.

Usant de subterfuges dignes des plus grands conspirateurs, le convoi du premier ministre a habilement contourné la masse de manifestants, pour la plupart de rouge vêtus et scandant des slogans rassembleurs.

Notre chef a pu assister à son brunch de parti en passant par la porte d’en arrière sans trop de heurts; l’escouade antiémeute de la police de Gatineau était aux aguets, prête à sortir de ses gonds au moindre faux mouvement, munie de bonbonnes de poivre de Cayenne et matraque au bras.

Tout au long de la manifestation, on se surprenait à entendre, en filigrane, un discours tout autre que celui qui était scandé par la force estudiantine. Oui, ces manifestants étaient réunis dans le but de démontrer leur mécontentement. Mais aussi leur épuisement. On est tannés. À bout de souffle.

Heureusement pour eux, leurs opposants ont brandi le drapeau blanc. Parce que la violence inouïe dans laquelle la dernière semaine s’est déroulée aux environs des campus de l’Université du Québec en Outaouais de même que le contournement des ententes démocratiques tacites et de ce qui en résulte ne pouvaient tout simplement plus se prolonger de la sorte.

Si je n’ai jamais abordé la question de la grève étudiante, c’est qu’une multitude de chroniqueurs en ont analysé les différents épisodes de façon sans doute plus éloquente que ce que j’aurais pu écrire en ces pages. Mais on m’a souvent fait la remarque (ou le reproche) que je dois prendre position, et ce, même si cette humble publication arbore le carré rouge.

Alors voilà.

Carré rouge.

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Vous avez été des dizaines à répondre à l’appel lancé dans ma dernière chronique, Un supplément d’âme. À ma grande surprise, je dois l’avouer. Vos courriels se sont avérés des lectures passionnantes, au discours dégourdi et aux propos éloquents quant à la question de notre centre-ville gatinois. Je tiens à vous remercier. J’entrerai en contact avec plusieurs d’entre vous au fil des prochaines semaines.