L’encan
"Approchez-vous messieurs dames. Une belle p'tite nappe d'huile fait main. Tricotée par les siècles (…) pour faire du gaz, d'la chimie, du plastique, du pétrole. Même que le gouvernement va vous paver un chemin pour vous y rendre. I'll take it!"
– L'encan, Félix Leclerc
Avouez que ces paroles n'ont malheureusement pas pris une ride. De fait, hormis pour l'hydro-électricité, elles témoignent du fait que nos gouvernements ont souvent été portés à troquer d'importantes ressources naturelles contre de bien petits plats de lentilles.
Prenez les minières. Avec raison, elles considèrent le Québec comme un véritable paradis. Cela est dû, en partie, à Maurice Duplessis et sa légendaire cession de l'exploitation du minerai de fer à l'Iron Ore pour "un sou la tonne".
(En 1958, sous le même régime Duplessis de l'Union nationale, mais dans une autre filière des ressources naturelles, vint aussi le fameux "scandale du gaz naturel". Ministres, députés et fonctionnaires avaient alors fait beaucoup d'argent en achetant des actions de la Corporation de gaz naturel du Québec en même temps que le gouvernement lui vendait le réseau gazier d'Hydro-Québec!)
Maintenant, avancez vos calendriers à 2009. Dans un autre épisode de "plus ça change, plus c'est pareil", Amir Khadir dénonçait le fait qu'une kyrielle de minières avaient "extrait pas moins de 17 milliards de dollars du sous-sol québécois en or et en métaux. Là-dessus, ces compagnies n'ont payé que 260 millions de dollars en redevance à l'État québécois, soit un maigre 1,5 %. Dix fois moins qu'un pourboire au restaurant! (…) Clairement, on se rit de nous!"
En effet.
Et aujourd'hui – sans oublier le souvenir pénible du projet de port méthanier Rabaska -, c'est bienvenue à la saga du "gaz de schiste"! Même scénario: Québec offre généreusement une de nos ressources à des compagnies privées en échange de grenailles pour l'État.
Mais il le fait aussi avec zéro transparence. Il le fait en confiant un mandat trop court (quatre mois) et incomplet au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. Son écoute des populations touchées est déficiente. Les études indépendantes d'impact faites au Québec sur l'exploration et l'exploitation du gaz de schiste sont absentes. Un encadrement législatif contraignant est inexistant. Et le tout, pour une matière dont l'exploitation risque de causer des dommages graves et permanents à la nappe phréatique.
Pourtant, en Colombie-Britannique, les compagnies payent des milliards de dollars en droits pour exploiter ce gaz coincé dans des roches sédimentaires. Quant à la Norvège, elle en contrôle 51 % de la propriété, de l'exploitation et donc, de sa sécurité. Bref, elles veillent au bien commun…
De retour ici, on constate également qu'une pleine ribambelle d'ex-employés ministériels libéraux se sont recyclés dans le lobbyisme pour cette même industrie. Une charmante coïncidence. Cela inclut Stéphane Gosselin, passé en deux jours de son poste de chef de cabinet du ministre au Développement économique à l'Association pétrolière et gazière du Québec (APGQ), un lobby.
Même Stéphane Bertrand – un ex de Gaz Métro et ancien chef de cabinet de Jean Charest – a participé à la fondation de l'APGQ. Dans ce tricot serré, on retrouve aussi le très influent André Caillé, président de l'AGPQ, mais aussi ex-patron de Gaz Métro et d'Hydro-Québec. La boucle est bouclée.
Une affaire de famille, quoi.
Un parfum de fin de régime?
Deux questions qui tuent. Pourquoi procéder de manière aussi expéditive et cavalière? Pourquoi autant de libéraux associés à la business du gaz de schiste?
Pistes de réponse. On assiste évidemment ici à un énième exemple du préjugé favorable du gouvernement envers le privé. On l'a vu, entre autres, dans sa croyance quasi religieuse aux PPP et dans l'ouverture accélérée du système de santé aux agences et cliniques privées.
Mais il se dégage aussi de cette histoire de gaz de schiste quelque chose comme un parfum de fin de régime. Tous ces membres du personnel politique libéral, et non les moindres, quittant le bateau pour une industrie jouissant, comme par hasard, d'une oreille attentive de la part du gouvernement. Encore cette impression diffuse, fondée ou non, de copinage.
Construction et gaz de schiste = même combat? La suite des choses saura bien le dire. Dans un sens ou dans l'autre.
Mais pour le moment, comment expliquer autrement la précipitation avec laquelle le gouvernement ouvre un marché aussi lucratif à des intérêts privés tout en manifestant un souci négligeable pour l'intérêt collectif des Québécois, autant financier que patrimonial et environnemental?
Le gouvernement semble être pressé. Très pressé. Trop pressé.
Même l'idée d'un moratoire, question d'étudier le dossier en profondeur, est ridiculisée.
Or, si cette hypothèse de réflexes de fin de régime s'avérait fondée, les deux prochaines années risquent de ressembler à une vente de feu pour l'État québécois.
Et malheureusement, elle ne serait pas la première de son histoire…
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Addendum:
1) Sur la relance de la coalition Vigilance énergie: http://www.ledevoir.com/environnement/actualites-sur-l-environnement/295797/gaz-de-schiste-vigilance-energie-se-mobilise
2) Cet article très intéressant intitulé: «Le gaz de schiste serait aussi polluant que le charbon»: http://www.ledevoir.com/environnement/actualites-sur-l-environnement/295827/climat-le-gaz-de-schiste-serait-aussi-polluant-que-le-charbon
Mme Legault, vous avez bien raison. Nous sommes devant un gouvernement qui tombe en déliquescence et la trace qu’il laisse sur son passage est celle de la corruption et de l’incompétence.
Vous nous faites observer les turpides du gouvernement Charest et de son troupeau de limaces rampantes en ce qui concerne sa gestion des ressources naturelles du Québec. Mais n’oublions pas que l’ensemble de la vie collective du Québec n’en finit plus de subir les coups de Jarnac vicieux de ce gouvernement en décrépitude et à l’agonie.
Il y a quelques mois j’espérais encore que quelques backbenchers libéraux auraient eu le courage de signifier leur écœurement face à la corruption et l’incompétence de leur chef et des ses ministres béni-oui-oui. Le temps passant force est de reconnaître que des députés comme le mien, Vincent Auclair dans Vimont, ont préféré s’agglutiner autour de leur chef comme des asticots autour de la ch….
«Et moi je sens en moi
Dans le tréfonds de moi
Pour la première fois
Malgré moi, malgré moi
Entre la chair et l’os
S’installer la colère»
[L’Alouette en colère; Félix Leclerc]
Allons donc, Madame Legault, ce gouvernement est bien trop noble et pétri de bons sentiments pour faire primer le bien commun sur le droit de ses ti-zamis à exploiter nos richesses collectives à leur seul profit! Que faites-vous de la Sainte Charte et des sacro-saints droits z-individuels qu’on étend aux entreprises, ces « personnes morales » (sic!), pour mieux les retirer à la « majorité silencieuse », ce gros ramassis de méchants lobbys syndicaliss écologiss comuniss anarchiss qui mènent le monde, criss! Creusez-en, des trous, les ti-namis: le bon gouvernement vous protège contre tous ces ennemis de la Liberté avec un grand L, tous ces empêcheurs d’exploiter en rond et à la ronde, de créer de la richesse et de s’asseoir dessus : cette chose informe, ignoble et dégoûtante qu’on appelle le peuple. Le peuple qui gâche tout parce qu’il ne sait pas rester à sa place.
Le peuple finira bien, tôt ou tard, par avoir la peau de ce gouvernement. Dépêchez-vous, les ti-tamis : miam, miam, les bonnes concessions minières, et les bons contrats de réfection des routes (je n’avais jamais vu autant de chantiers que cet été!), et les bons permis d’exploitation des gaz de schiste et même, pourquoi pas, des nappes de pétrole sous le golfe du Saint-Laurent. Dépêchez-vous d’épuiser les réserves : le peuple est en marche et il serait capable de fermer les portes de l’entrepôt avant qu’on ait fini de le vider. Vous savez comment est le peuple, toujours prêt à s’alarmer, manipulé qu’il est par les gros méchants lobbys syndicaliss écologiss comuniss anarchiss qui mènent le monde, criss!
Ah! que tout irait mieux, dans ce pays, si les Québécois cessaient de s’opposer à la marche du progrès et se laissaient enfin tondre sans protester! N’est-ce pas, Madame la ministre Saint-Pierre? N’est-ce pas, Monsieur le président du Conseil du patronat? N’est-ce pas, PKP? N’est-ce pas, Messieurs les éditorialistes de La Presse? N’est-ce pas, ô nos chères élites éclairées et tellement lucides?
Quelle bande de bouffons.
Hehe! Il y longtemps que je me retiens pour ne pas faire la morale… mais là, comme on dit, « j’en peu pus et ch’me lâche loussse ».
C’est très facile de s’en prendre au gouvernement et aux élites, surtout quand ça demeure que du blabla ou que du brassage d’idées sans conséquences concrètes.
Même s’il ne savait pas qui est Machiavel, mon père disait que l’on a les gouvernements qu’on mérite. S’il était encore de ce monde, il vous dirait sans doute que ce gouvernement partira au moment on le méritera. Ces gouvernement sont là parce qu’ils sont élus. Il allait voter bien sûr, mais se faisait peu d’illusion sur la valeur de la démocratie. Du moment que le peuple a son pain et ses jeux, qu’il a ses 3 repas par jour, ses sports et ses shows d’humour, pour le reste, il n’en a cure.
Alors pourquoi venir lui parler de « bien commun » à promouvoir ou encore à protéger d’un éventuel encan? Surtout dans un monde individualiste replié sur son quant-à-soi.
Parce que le problème pour moi, il est là. On aurait beau avoir les meilleurs gouvernements, les meilleures élites, les meilleures institutions et les meilleures lois, si chacun tire la couverture de son bord, dans l’indifférence pour ses voisins, rien ne changera jamais.
Parce que le problème, oui il est possible de le régler, mais pour cela, il ne faut pas rester en surface de soi, mais il faut descendre dans le fond de son coeur et non chercher autour le premier à qui pouvoir jeter la pierre. Car, chaque fois que le mal et l’injustice triomphent, c’est parce qu’on l’aura eu laissé faire, faute de s’être examiné honnêtement et d’avoir discerné en la situation sa propre responsabilité.
@Christian Cyr
Et vous qu’avez-vous fait de pratique ? En plus ne croyez-vous que c’est le rôle de l’État d’agir en lieu et place des citoyens ? Autrement on se retrouve dans l’anarchie me semble-t-il.
Je suis entièrement d’accord à ce que le citoyen s’implique. Mais de là construire un pont …
@Denis Drouin
Mon intervention ne visait pas à me donner en exemple comme votre première question semble le sous-entendre, surtout pas. Mes actions politiques passées, à vue de nez, ne semblent pas avoir changé grand chose. Pas seulement parce que les situations habituellement me dépassaient, mais parce que je n’ai pas grand pouvoir sur ce qui se passe dans le coeur des personnes, là où selon moi est le vrai combat. Pour l’État, il n’est que le prolongement de la volonté générale, son instrument le plus visible pour être plus exact, il ne joue donc pas le premier rôle et surtout pas « à la place des citoyens » comme vous le dites. Mon point de vue n’est pas l’anarchie non plus, car je ne prône pas l’absence de gouvernement même si je m’en méfie grandement, mais simplement je n’attends pas de lui mon salut comme s’il était le Bon Dieu ou le Mauvais Satan. En conclusion, pour apporter une autre couleur au débat, je voulais juste lancer l’invitation amicale à un examen de conscience qui ne peut faire de tort à personne, d’ainsi faire fi de notre pente naturelle en se regardant soi-même AVANT de porter un jugement sur les autres. Une invitation qui ne semble pas trop vous plaire, il me semble. Je m’en excuse donc bien humblement… Vous voyez bien pourquoi, peu doué pour la flatterie, je n’ai jamais eu grand succès en politique! ;-)
M. Christian Cyr qui n’en peu pus et qui s’lâche lâche lousse », le problème est dans la caisse électorale du PLQ qui déborde et qui se vide aux élections pour retenir le pouvoir, idéalement majoritaire « les 2 mains sur la roue du Québec », pas dans l’individualisme du Québécois moyen.
@Gilles Bousquet
Je suis pleinement d’accord avec vous pour la caisse électorale du PLQ qui déborde pour des raisons plus que douteuses mais moins avec la citation que vous faites de moi dans un contexte qui lui faire dire tout autre chose. Franchement, sans le citoyen complaisant, sans son indifférence et son individualisme tranquille, je n’arrive pas à voir comment le scandale du financement du PLQ et ses magouilles avec la construction pourrait prendre une telle ampleur.
L’étude du BAPE conclus en 4 mois, ça n’a aucun sens. Restreindre les audiences à quelques régions seulement pour aller plus vite ne respecte pas les citoyens du Québec. Nous sommes tous impliqués au Québec. Si vous regarder la carte des compagnies qui ont signé des contrats avec les représentants du gouvernement du Québec, l’île de Montréal peut être la cible d’exploration de gaz de schiste! Un peu de sérieux s.v.p. messieurs et mesdames du gouvernement du Québec!
Jean Binette, Dunham
Le Scandale du gaz: « Le plus gros vole depuis 80 ans »
Les médias se réveil sur ce qui était une évidence depuis un bon moment déjà.
http://www.vigile.net/Le-scandale-du-gaz-Le-plus-gros
…..
Et maintenant que dois-je faire devant le détournement systématique de l’héritage de la Révolution tranquille ?
Allez manifester Dimanche, Place Riopel à 14H00.
………
Charest a ouvert les portes à de puissants réseaux d’intérêts qui squattent notre État, à leurs profits et au détriments du bien publique.
Dans les filières de l’énergie il a traverser la ligne rouge, de la corruption à la trahison de l’intérêt nationale.
Il est temps de reprendre notre État en main et de redevenir Maître chez nous.
j’aime bien cette caricature:
http://www.myspace.com/dominiquefrappier/photos/15615548
Le Parti Libéral du Québec, depuis l’arrivée de Jean Charest, un Conservateur dans l’âme, est la pire des calamités qui aient frappé le Québec depuis les derniers 100 ans.
C’est un parti de traîtres, de vendus et de criminels sans conscience sociale. Après eux, le déluge. Ne restera du Québec qu’un pénible souvenir entaché d’histoires incroyables et inimaginables de bêtises humaines.
Après le départ de ces catastropheux, sera-t-il possible de faire machine arrière et de recoller les morceaux?
Que restera-t-il de nos amours après ce cataclysme ambulant?
Ces deux photos valent mille mots.
Traitre en effet.
http://m.fr.canoe.ca/Actualites/20100909-193421.1?fullscreen#news
Ils nous volent systématiquement et pour nous aveugler ils nous font payer des commissions bidons en gros show médiatiques
http://mobile.cyberpresse.ca/?rs=1&tl=597566
Dimanche la riposte s’enclenche:
http://www.vigile.net/Dimanche-le-12-la-riposte-s
Les traîtres, est-ce que ce ne sont pas également les pissous qui continuent à voter pour le gros frisé rassurant qui leur ressemble, plutôt que d’oser penser la politique autrement?
Vous écrivez:
»Maintenant, avancez vos calendriers à 2009. Dans un autre épisode de « plus ça change, plus c’est pareil », Amir Khadir dénonçait le fait qu’une kyrielle de minières avaient « extrait pas moins de 17 milliards de dollars du sous-sol québécois en or et en métaux. Là-dessus, ces compagnies n’ont payé que 260 millions de dollars en redevance à l’État québécois, soit un maigre 1,5 %. Dix fois moins qu’un pourboire au restaurant! (…) Clairement, on se rit de nous! » »
Il faudrait tout de même faire un calcul équitable. Ces 17 milliards ne sont pas un profit net; ils ont servi à payer du matériel d’extraction taxable et à faire ainsi rouler l’économie et à remplir les goussets du gouvernement, ils ont servi à payer des employés salariés plutôt bien payés qui payent à leur tour des impôts importants. Donc quand on dit que les redevances à l’état ne sont que de 1,5 % on se rit également de nous.
Cela dit, je suis parfaitement d’accord que les redevances sont insuffisantes, mais encore il faudrait chiffrer correctement ce qu’elles devraient être en tenant compte de tout les tenants et aboutissants et en évitant le sensationnalisme à tout crin qui ne fait en rien avancer le débat.
«On a les gouvernements qu’on mérite.»
Je trouve cet argument dangereux. Comme je ne mérite pas le gouvernement actuel, je pourrais en venir à la conclusion que la démocratie ne fonctionne pas et chercher d’autres moyens d’avoir le gouvernement que je mérite. Et si plusieurs autres en viennent à la même conclusion, c’est la recette pour une guerre civile.
Christian Cyr dit : «Parce que le problème, oui il est possible de le régler, mais pour cela, il ne faut pas rester en surface de soi, mais il faut descendre dans le fond de son coeur et non chercher autour le premier à qui pouvoir jeter la pierre.»
Je ne suis pas en surface de moi, mon père avant moi n’était pas en surface de soi, en fait je connais personne dans mon entourage qui n’est pas dans le fond de son coeur révolté par la situation actuelle et depuis fort longtemps déjà.
Alors, ça va faire l’introspection, la population a fait son bout de chemin, c’est au tour de la classe politique de faire le sien.