Voix publique

Une rentrée à reculons…

Les libéraux la feront sûrement à reculons. Mais le 21 septembre prochain, prêts, pas prêts, c'est la rentrée automnale à l'Assemblée nationale.

Une autre session risquant d'être dure, très dure, pour le gouvernement Charest. Car, de fait, rien cet été n'aura vraiment concouru à dissiper le parfum de fin de régime qu'il dégage depuis quelques mois.

Ni le remaniement ministériel, même rebaptisé "redéploiement" en grande pompe par le premier ministre. Ni le départ d'un Jacques Dupuis qui se dépêtrait de plus en plus mal comme leader parlementaire.

Ni son remplacement par l'ancien ministre Jean-Marc Fournier – preuve par l'absurde que le premier ministre peine à recruter du sang neuf.

Ni les appels de M. Charest pour qu'au retour en Chambre, le "ton" y soit moins hargneux. Ni ceux de sa Commission-Jeunesse priant les Québécois de mettre fin à leur "cynisme" envers la classe politique…

Ni la rapidité avec laquelle M. Charest volait récemment à la rescousse de Régis Labeaume. Quitte à lui offrir un beau 45 % pour payer le futur Colisée de Québec, dont le coût estimé, pour le moment (!), est de 400 millions de dollars.

D'ailleurs, si ça fonctionne, ce Colisée risque fort de lever de terre bien avant un CHUM devenu de plus en plus imaginaire…

Pointage: Sport & politique (1); Système de santé (0).

Rien, donc, ne semble vouloir rescaper le gouvernement.

Et encore moins le triste spectacle de la ministre de la Culture, Christine St-Pierre, cherchant maladroitement à "régler" le dossier des écoles anglaises passerelles. Comme l'objectif réel est de ne pas éveiller la colère des anglophones – la dernière chose dont les libéraux ont besoin en ce moment -, elle rejette toute solution logique et responsable, dont celle d'appliquer la loi 101 aux écoles anglaises privées non subventionnées.

"Diantre!", comme dirait Yves Michaud. Le gouvernement n'a même pas profité des chicanettes d'exégèse entre Bernard Landry et Pauline Marois autour de la tenue ou non d'un référendum. Et si oui, s'il devrait se tenir le plus tôt "possible" dans un mandat du PQ ou au moment "jugé approprié", etc…

Des sondages dévastateurs

Disons aussi que les sondages de cet été n'ont rien fait pour redonner le sourire au gouvernement. Le PLQ y restait coincé loin derrière le PQ pendant que 57 % des Québécois disaient vouloir la démission de M. Charest. Pis encore, une vaste majorité était incapable d'identifier un "dauphin" ou une "dauphine" capable de ramener le PLQ à la vie.

La précipitation du gouvernement dans la filière du gaz de schiste et la présence de plusieurs anciens libéraux influents comme lobbyistes de cette industrie n'ont pas aidé non plus.

Ni les tensions croissantes entourant la nouvelle carte électorale.

De nouveaux clous pour l'Opération Marteau

Ni Amir Khadir et Françoise David de Québec solidaire, croqués par les caméras en allant porter de nouveaux "clous" à l'Opération Marteau. Leur allégation: quatre firmes d'ingénieurs auraient versé jusqu'à 400 000 $ au PLQ de manière illégale.

Et le tout avec en toile de fond une majorité parlementaire fragile.

Le PLQ ne comptant présentement que 65 députés sur un total de 125 sièges, sa majorité est courte. Au point où elle souffrirait mal d'éventuels départs de ministres ou députés pressés d'aller relever ailleurs de nouveaux "défis" avant la prochaine élection.

Un espoir, par contre, à l'horizon: que Me Bastarache, à tort ou à raison, conclue à l'absence de crédibilité des allégations faites par Me Marc Bellemare quant aux influences indues dont il s'est dit victime de la part de bailleurs de fonds libéraux lors de la nomination de trois juges et, surtout, quant à l'approbation qu'en aurait donnée le premier ministre en 2003-2004.

Et pourtant… Même si ce cadeau devait tomber du ciel pour le gouvernement, les projecteurs s'en trouveraient probablement braqués à nouveau sur le refus continu de M. Charest de créer une vraie commission d'enquête indépendante et élargie sur la construction et le financement des partis… Soit celle que plus de 80 % des Québécois réclament depuis plus d'un an.

Le processus de nomination des juges est un sujet certes important. Mais il n'est pas tout à fait celui qui préoccupe la plupart des Québécois.

Bien sûr, en politique, tout peut changer rapidement. C'est sûr, sûr.

Mais on sait aussi que devant ce qu'on appelle une tendance lourde – l'impopularité prolongée du gouvernement en a toutes les apparences -, le changement est nettement plus difficile à opérer. Pas impossible, mais drôlement plus compliqué à provoquer.

Et la nouvelle session qui s'ouvre en dira long sur le sujet…