

Clockwatchers : Punch d’été
					
											Georges Privet
																					
																				
				
			Il y a parfois des films qui, après un début modeste, léger et rigolo, se transforment subitement en quelque chose de plus audacieux, de plus complexe et de plus grave. Si le spectateur n’a pas été préparé – par le cinéaste, la publicité ou la critique – à ce changement de cap soudain, il risque fort de se sentir désarçonné, voire trahi, par un film dont le seul défaut (impardonnable aujourd’hui) est d’avoir voulu l’emmener là où il ne pensait pas aller…
Disons donc d’emblée que Clockwatchers – l’attachant, subtil  et rafraîchissant premier film de Jill Sprecher – est de ces  ouvres-là; une comédie apparemment simple, drôle et  insouciante, qui se transforme en un film étonnamment dense,  ambitieux et mélancolique.
  Réflexion amusante, mais doucement subversive, sur la  différence, le pouvoir et la solidarité, Clockwatchers raconte  l’histoire d’Iris (Toni Collette), une jeune employée timide  qui débarque dans une grande firme, où elle se lie d’amitié  avec trois autres travailleuses temporaires: Margaret (Parker  Posey), une frondeuse espiègle qui devient vite l’âme du  groupe; Paula (Lisa Kudrow), une grande étourdie qui rêve de  devenir actrice; et Jane (Alanna Ubach), une fiancée trop sage  qui attend impatiemment son mariage.  
Après une première moitié enlevante et humoristique, qui répertorie (dans un style évoquant le Playtime de Jacques Tati) les mille et une bizarreries de la vie de bureau, le film change brusquement de ton et de rythme lorsqu’une enquête sur une série de vols mineurs se resserre autour de nos quatre héroïnes. Du coup, ce qui s’annonçait comme une comédie d’observation modeste et légère sur la vie de bureau se transforme en une étude tranchante sur le fascisme ordinaire. Bien que fascinante, la transition est quelque peu brutale, et risque malheureusement de dérouter les spectateurs qui n’y ont pas été préparés. Ce serait toutefois dommage car Clockwatchers reste, malgré ses changements de ton, une ouvre originale et intelligente, empreinte d’une poésie et d’un regard étonnants. Bref, l’alternative parfaite aux recettes usées des grosses machines hollywoodiennes, et un film aussi agréable qu’un congé-surprise au milieu d’une journée de travail.
Dès le 5 juin
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