Loin des regards : Le crime ne plaît pas
A mi-chemin entre le film d’action et la comédie romantique, Loin des regards démontre enfin que le réalisateur de Sex, Lies and Videotapes, STEVEN SODERBERGH, n’était pas l’homme d’un seul film.
Alors qu’on ne l’attendait plus, dix ans après avoir remporté la Palme d’or à Cannes avec Sex, Lies and Videotapes, Steven Soderbergh sort finalement de l’ombre avec un premier long métrage grand public. Cependant, on est à mille lieues des histoires tordues et de la perversité qui baignait son premier film. Pour sa grande rentrée hollywoodienne, Soderbergh a plutôt choisi d’exploiter un filon plus conventionnel, celui des amours impossibles sur fond de drame policier.
Braqueur de banque de style gentleman cambrioleur, Jack Foley (George Clooney) se retrouve derrière les barreaux suite à une horrible malchance. Fourbe jusqu’au bout des ongles, il profitera de l’évasion de quelques-uns de ses collègues cubains pour recouvrer sa liberté. Malheureusement pour lui, si son copain Buddy (Ving Rhames) est bien là à l’attendre, la présence fortuite d’une agente du FBI sur les lieux de l’évasion compliquera légèrement l’opération. Et c’est coincé dans le coffre d’une voiture que Foley fera la connaissance de l’agente Karen Sisco, personnifiée par la sémillante Jennifer Lopez, qu’on avait pu voir dans le rôle principal de Selena.
Il ne faut pas chercher dans les thèmes exploités de bien grandes innovations. Après tout, qu’une otage tombe amoureuse de son ravisseur ou que la vertueuse succombe au charme du méchant, il n’y a rien là de bien novateur. Mais tout est dans la manière de faire et Loin des regards, s’il ne s’agit pas d’un grand classique, est au demeurant une ouvre fort réussie. Adapté d’un roman d’Elmore Leonard, le scénario de Scott Frank (le même duo qui avait accouché de Get Shorty) est diablement efficace malgré la minceur du sujet. Surtout, les dialogues sont bien servis par la manière toute personnelle de Soderbergh de leur céder le plancher là où d’autres n’auraient trouvé que prétextes à d’interminables scènes d’action. On utilise bien, ici et là, quelques raccourcis, comme dans cette scène où Sisco et Foley évoquent certains classiques du cinéma, moyen un peu facile de justifier à l’avance un improbable coup de foudre, mais le scénario tient bien la route, solidement appuyé par une trame sonore qui, quoiqu’omniprésente, sait demeurer à sa place. Cependant, bien qu’appropriée dans la majeure partie du film, la structure en flash-back en perturbe à l’occasion la compréhension.
Déformation professionnelle, réminiscence de son premier film, le réalisateur ajoute sa touche esthétique avec sa panoplie d’effets «vidéo», arrêts sur image et autres séquences filmées «maladroitement» à la façon de la vidéo amateur.
Les détracteurs de George Clooney devront prendre leur mal en patience: dans un rôle qui lui sied parfaitement, l’acteur se tire admirablement d’affaire, tout comme Jennifer Lopez. Et, ce qui ne gâche rien, le choix du reste de la distribution est tout aussi judicieux, des seconds rôles jusqu’aux caméos de Michael Keaton et Samuel L. Jackson.
D’accord, Loin des regards n’est peut-être pas le film de l’année, mais il s’agit néanmoins d’une ouvre qui tombe à point au milieu des sempiternels films catastrophe de l’été.
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