The Ugly : Pinte de laid
Rien que par le titre, on devrait se méfier. Dès la première image – des couloirs vides dans un sous-sol, éclairés au néon bleu – , on devrait se lever de son fauteuil. Pourquoi reste-t-on assis à regarder The Ugly, du Néo-Zélandais Scott Reynolds? Parce que le plaisir de la peur fonctionne toujours bien. The Ugly est le film d’horreur de base, qui fait gigoter dans tous les sens, et plisser les yeux au moment fatidique. Mais c’est aussi un film machiavélique, relativement bien ficelé, et qui sait s’amuser avec nos nerfs. Scott Reynolds avait déjà récolté des honneurs avec son second court métrage Game with No Rules. Et tout au long de ce premier long métrage, on sent un réalisateur cinéphile qui aime la caméra, la construction d’un film et les ressorts d’une histoire. Le thriller est, en ce sens, un excellent exercice de style. The Ugly est le petit frère de Seven et de The Silence of the Lambs: Simon (Paolo Rotondo) est un tueur en série emprisonné, gardé par deux brutes épaisses, et surveillé par un médecin de bande dessinée, qui force la ressemblance avec Vincent Price. Arrive dans ce décor lugubre une jeune et brillante docteure, Karen (Rebecca Hoods) qui doit juger si Simon est guéri, apte à subir un procès. Le tueur se montre docile, mais l’interrogatoire de plus en plus hargneux et inquiet de la femme fait ressortir quelques démons…
Avec une caméra vive qui suit aisément cette histoire en flash-back; un montage fignolé qui, dans certaines scènes, laisse planer l’ombre de Hitchcock; et une image jamais statique, The Ugly fait parfois «ouvre de cinéphile». Les décors sont très étudiés, peut-être trop, tout comme certains personnages secondaires, des caricatures. Mais tous les ressorts sont là pour quelques sursauts. On s’attend à ce qu’il lui saute dessus. Hé bien, non, c’est dans la scène suivante! Le gars a visionné des films du genre avant de se lancer dans l’entreprise.
The Ugly traîne donc quelques clichés, dont la voix douce et caressante du tueur, une enfance pas très nette, une femme sexy et un médecin fou, mais quelques surprises tempèrent, dont la couleur du sang, opaque et noir comme de la mélasse qui coule sans arrêt; les mortes qui ressurgissent en livides et démoniaques silhouettes, les mimiques des deux geôliers; et le jeu tendu et nerveux du tueur en question, qui se voit laid dans le miroir quand le meurtre l’appelle. Cela reste un film pour amateurs de gorges tranchées en gros plans, de filles qui hurlent et de regards fous. On en fait, paraît-il, des festivals.