The Governess : Pays sage
Imaginez un croisement entre Yentl et The Remains of the Day, mis en scène par une émule de Jane Campion, et vous avez, à peu de choses près, l’essence de The Governess, le premier long métrage de Sandra Goldbacher, qui raconte les aventures d’une jeune juive anglaise du 19e siècle, perdue au sein d’une famille d’antisémites écossais.
Nous sommes en 1840. A la mort de son père, Rosina Da Silva (Minnie Driver) quitte la communauté juive séfarade de Londres pour devenir Mary Blackchurch, la gouvernante d’une famille écossaise dont le patriarche (Tom Wilkinson) a tôt fait de la séduire. Bien qu’ils partagent une passion pour les débuts de la photographie et qu’ils caressent ensemble des projets d’avenir, Rosina réalise vite que son amant est terrifié par leur passion illicite, et qu’il est, de surcroît, férocement antisémite. Sa désillusion sera forcément à la mesure de ses attentes.
Élégamment écrit, filmé et interprété, The Governess est un film lisse, sans la moindre aspérité: un de ces films – à mi-chemin entre les mini-séries de la BBC et les ouvres du tandem Merchant-Ivory – qui sentent l’effort louable et les grands classiques, l’application constante et l’académisme; la photographie est impeccable, mais n’inspire aucune émotion; la direction artistique est irréprochable, mais sans imagination; et la mise en scène est efficace et souvent même sensible, mais rarement surprenante ou inspirée.
De fait, The Governess est un film qui souffre précisément des maux qu’il dénonce: l’obsession du conformisme, des codes et des normes; l’incapacité d’exprimer ses émotions de manière profonde et sincère; la tendance à stéréotyper les gens et les sentiments pour ne pas avoir à leur faire face véritablement. Du coup, ce film qui prétend contempler les tares de la société anglaise à travers les yeux d’une femme qui lui demeure étrangère, finit par adopter ironiquement l’attitude et les défauts qu’il reproche à son sujet. Avec le résultat que The Governess reste, malgré ses qualités de fabrication incontestables, étrangement paradoxal et froid: une histoire de passion sans fièvre, et une critique sociale sans âme, qui nous laisse sur le souvenir d’un film extrêmement soigné mais curieusement fade, égayé par quelques bonnes idées et de superbes cartes postales.
Dès le 14 août
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