Cinéma

Contre coeur : Larmes blanches

Une fois de plus, MERYL STREEP confirme son immense talent et prend une sérieuse option dans la course aux oscars avec sa magnifique performance dans Contre cour. Malheureusement, le film n’en méritait pas tant.

Voilà bien la meilleure recette pour prendre une solide option dans la course aux oscars: prenez une petite famille aux prises avec un drame pénible, faites porter votre scénario par une belle brochette d’acteurs et enrobez soigneusement le tout d’une généreuse portion de grosses et chaudes larmes.

Renée Zellweger personnifie une jeune journaliste bourrée d’ambitions qui a délaissé le cocon familial de banlieue pour tenter sa chance dans la jungle new-yorkaise. Fille d’écrivain, elle aspire à manier la plume aussi joliment que son paternel (William Hurt), qu’elle vénère par-dessus tout. Elle devra cependant mettre la carrière en veilleuse pour prendre soin de sa mère, formidable Meryl Streep, atteinte d’un cancer. S’ensuivra une perpétuelle et ô combien prévisible remise en question alors que la jeune journaliste sera confrontée au morne quotidien qui fut le lot de sa mère. Entre la démythification du père et la déification de la mère, on aura droit au parcours sans faute de l’apprentissage des «vraies valeurs». On achèvera le tout en effleurant bien timidement l’euthanasie, comme pour bien coller à l’actualité, mais la question sera cependant expédiée vitement grâce à un raccourci du scénario qui fera appel à mère courage. En n’oubliant pas, chaque fois que l’occasion s’y prête, de solliciter les glandes lacrymales à grands coups de violon.

On peut bien sûr se laisser submerger par ce flot de bons sentiments et s’émerveiller devant la magnifique performance de Meryl Streep, assurément candidate pour l’oscar de la meilleure interprétation. Mais entre deux larmes, on peut aussi s’interroger sur l’étrange parti pris de ce scénario larmoyant. Comment une journaliste si ambitieuse et sans-cour peut-elle aussi brusquement abandonner son boulot pour aller jouer à l’inutile chez sa mère malade? Pourquoi son père, si près d’elle, lui exige-t-il un si grand sacrifice quand il pourrait se retourner vers le frère qui, lui, est disponible et habite déjà à la maison?

Un film pour les femmes, disent avec condescendance quelques vrais mâles allergiques aux larmes. C’est qu’ils n’ont rien compris au discours sous-entendu tout au long du film. Parce qu’on doit bien comprendre ici que femme et ambitions riment avec absence de sentiments. Que femme accomplie doit d’abord savoir mijoter de bons petits plats et se taper le sale boulot en restant dans l’ombre d’un mari bienveillant. Que la place d’un homme est peut-être dans le lit de sa maîtresse, mais jamais derrière un balai. Et patati, et patata. Tous ces petits clichés et stéréotypes, à force de taper sur le même clou, finissent par lasser.

Décidément, beaucoup d’émotion pour rien.

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