Without Limits : Course de fond
Cinéma

Without Limits : Course de fond

Steve Prefontaine, le héros de Without Limits, était un coureur olympique prometteur qui a perdu la plus grande course de sa vie, a été rejeté par la femme qu’il aimait, et qui est mort (dans un accident d’auto, à l’âge de 24 ans) sans avoir atteint les objectifs qu’il s’était fixés. Son parcours déroutant, parsemé d’échecs et de malchances, n’est pas de ceux qu’Hollywood filme habituellement. Pourtant, Robert Towne – le scénariste légendaire de Chinatown, et le metteur en scène inégal de Personal Best et de Tequila Sunrise – a décidé d’en faire un film racontant l’histoire d’un athlète hors norme: un «perdant» pour qui la course comptait plus que la victoire, et pour qui les médailles importaient moins que le dépassement de soi.

Prenant le contre-pied des biographies hollywoodiennes traditionnelles, Without Limits se veut donc le portrait d’un athlète qui n’a pas su (du moins, selon ses pairs) tenir ses promesses: un coureur exceptionnel (interprété par Billy Crudup, un sosie de Tom Cruise – par ailleurs producteur du film) qui a battu plusieurs records de vitesse, mais qui a finalement gagné peu de compétitions, car il se «brûlait» toujours trop vite, et refusait d’économiser ses efforts. Pourquoi?

C’est un peu ce que tente de découvrir ce film en forme de puzzle par l’entremise du personnage de Bill Bowerman (Donald Sutherland), un entraîneur universitaire maniaque qui fabriquait lui-même les espadrilles de ses étudiants (jetant du même coup les bases d’une compagnie qui allait devenir Nike!), en plus de passer des années à tenter (vainement) de corriger l’attitude et les performances de Prefontaine.

Du coup, ce qui aurait pu être la biographie standard d’un athlète singulier devient quelque chose de beaucoup plus intéressant: une réflexion sur la différence entre l’instinct et le calcul, entre la course et la compétition, entre ce qui sépare les «gagnants» des «perdants». Une réflexion habilement construite par un scénariste exceptionnel qui en profite pour fustiger au passage le sport professionnel contemporain, les Olympiques modernes et le mythe sacro-saint du winner à l’américaine…

Solide, et parfois brillant lorsqu’il parle de son héros et du sport, Without Limits est cependant moins réussi lorsqu’il tombe dans les clichés; en particulier quand il illustre la relation de Prefontaine avec une jeune universitaire (pourtant bien interprétée par Monica Potter). Ces faiblesses ne diminuent toutefois pas l’impact d’un film qui se démarque nettement des ouvres du genre; un film qui a les qualités de son protagoniste (de la passion, du style et du talent), mais qui a aussi ses défauts (un certain manque de calcul stratégique, et une tendance à faiblir dans les moments cruciaux).

Bref, un film de cour qui fait corps avec son sujet au point d’embrasser de façon troublante les contradictions qui ont fait de sa vie une course si brève mais si fascinante.

Dès le 16 octobre
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