Velvet Goldmine : Jeux de pistes
Cinéma

Velvet Goldmine : Jeux de pistes

Dix ans après la disparition de Brian Slade (Jonathan Rhys-Meyer), rocker glam des années 70 ayant simulé sa mort sur scène, un journaliste (Christian Bale) enquête sur ce qui lui est arrivé depuis. Le jeune homme dans la vingtaine part aussi à la recherche de son propre passé puisque c’est le glam rock qui l’a révélé à lui-même. Il rencontre donc Mandy (Toni Collette), l’ex-femme du chanteur; et Curt Wild (Ewan McGregor), rock star américaine déchue de qui Slade est, jadis, tombé amoureux. Deux témoins d’une époque révolue où l’audace et la liberté – musicale ou sexuelle – étaient des mots d’ordre.

Il arrive parfois – surtout lorsqu’il s’agit d’un film vraiment signé, d’une ouvre personnelle d’un cinéaste qui cherche et ose – qu’un film soit «contaminé» par son sujet. L’adéquation entre le fond et la forme peut se faire pour le meilleur ou pour le pire. Pour rester dans les mêmes thèmes que ceux de Velvet Goldmine, citons, parmi les réussites, A Clockwork Orange (pour le côté pop art), I Shot Andy Warhol (pour le portrait d’époque), Les Nuits fauves (pour la mouvance de l’identité sexuelle), et Tommy (pour l’évocation d’un genre musical). Mais, après les excellents Poison et Safe, le troisième long métrage de Todd Haynes est l’illustration même de la confusion des genres qu’il entend traiter.

Écrit par Haynes, et coproduit par Michael Stipe, le leader de R.E.M., Velvet Goldmine veut rendre compte de la richesse et de la complexité d’un courant musical qui mêlait de multiples influences, s’inscrivant dans une tradition britannique de provocation révélatrice, personnifiée par Oscar Wilde, et mélangeant allègrement les paillettes du cirque et les perruques poudrées du XVIIIe, la bisexualité et le Nouvel Age, le Berlin des années 30 et le Londres des années 60, privilégiant un look outrancier entre Las Vegas et Flash Gordon.

Marqué par le style Todd Haynes (déconstruction du récit, très gros plans, magnificence visuelle, distance du point de vue), Velvet Goldmine ne manque pas de qualités, mais n’arrive pas à imposer une vision, comme si le cinéaste avait perdu son chemin dans cette multitude de pistes qu’il suit en parallèle, de la biographie d’une rock star à une réflexion de société, en passant par des considérations un peu pompeuses sur l’art et les désillusions de l’âge adulte.

Restent deux acteurs fabuleux: McGregor et Collette, qui, plus que les deux comédiens principaux, incarnent les hauts et les bas de cette époque fascinante. Plus punk de la première heure que rocker glam, Ewan McGregor compose un personnage fort qui, malgré ce qu’affirme le dossier de presse, ressemble plus à Kurt Cobain qu’à Iggy Pop. Encore une fois, le comédien écossais montre sa polyvalence, son énergie et son charisme; tandis que Toni Collette incarne une savoureuse et touchante Sally Bowles (personnage de Liza Minnelli dans Cabaret) des années 70, une jeune fille qui, de libre, superficielle et sincère, en 74, est devenue, dix ans plus tard, une femme lucide, un peu amère, mais sans remords.

C’est dans leurs performances poignantes que le film aurait pu s’ancrer, pour dépasser le stade de l’illustration (aussi riche soit-elle), et mettre un peu de chair sous les paillettes.

Dès le 13 novembre