Paparazzi : Photo sans thèse
Franck Bordoni (Patrick Timsit) perd son job de gardien de nuit, et voit sa petite vie voler en éclats lorsqu’il se retrouve par hasard, photographié aux côtés d’une star adultère, sur la couverture d’un journal à scandale. Décidé à coincer le salaud qui a ruiné son existence, Franck traque de peine et de misère Michel Verdier (Vincent Lindon), un paparazzi de haut vol qui l’initie à un monde de fauves où les stars servent de gibier malgré elles. Avec son aide, une nouvelle vie commence: A Charognard Is Born…
Conçu et mis en chantier avant la mort de Lady Di, Paparazzi n’est ni le film d’exploitation que certains craignaient, ni le règlement de comptes (vu la présence de Vincent Lindon) que d’autres espéraient. Du reste, la principale qualité du film d’Alain Berberian (La Cité de la peur) est précisément d’examiner son sujet des deux côtés de l’objectif grâce au parcours du personnage fabuleux joué par Patrick Timsit: un pauvre type lésé par un paparazzi dont il admire tellement le culot, l’univers et le style de vie qu’il devient peu à peu son assistant et son acolyte, son alter ego et son sosie.
Habilement conçue et écrite par ses six scénaristes (l’incontournable Danièle Thompson, mais aussi Berberian, Jean-François Halin, Simon Michael, Lindon et Timsit), Paparazzi est une comédie qui prend vite la forme d’une plongée dans le monde qu’elle décrit; un de ces rares films (comme Les Affranchis, côté drame, ou Les Ripoux, rayon comédie) qui vous entraînent à cent milles à l’heure dans un monde dont ils révèlent plusieurs détails inédits. Le tout, au fil d’une intrigue en forme de safari-photo, truffée de clins d’oil et d’apparitions-surprises (que nous ne gâcherons pas ici…).
En route, le film parvient – et c’est sa plus grande réussite – à nous communiquer l’excitation et la griserie des paparazzi et de leur travail tout en nous faisant pleinement ressentir ce que leur boulot a de dégradant et de dégueulasse. Cette réussite permet au film de dépasser le stade de la dénonciation et de la morale facile (bien qu’il y succombe parfois) pour devenir quelque chose de beaucoup plus drôle et original: une comédie sociale jouissive et pertinente sur la confusion des valeurs dans un monde dont les paparazzi ne sont que les profiteurs les plus évidents.
Superbement servi par ses vedettes (Lindon n’a jamais été meilleur, et Timsit est toujours aussi bon), Paparazzi n’est toutefois pas un film sans défauts: l’emploi de Nathalie Baye (dans un rôle de rédactrice en chef) vient un peu brouiller le rapport que le film tente d’établir entre ses vedettes et ses invités-surprises; l’indispensable évolution des protagonistes n’est pas toujours crédible; et la dernière partie du scénario contient peut-être un ou deux revirements de trop. Ces défauts ne diminuent toutefois pas vraiment l’efficacité du film de Berberian. Un film qui tire, paradoxalement, sa force du fait de ne pas porter de jugement sur un métier amoral. Un film qui se contente de nous faire rire en nous montrant – tantôt du côté du chasseur, tantôt du côté de la victime – l’absurdité d’un monde où une photo de starlette vaut plus qu’un mois de travail en usine.
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