Rétrospective Donigan Cumming : La tragédie comique
Les bandes vidéo de Donigan Cumming sont-elles l’ouvre d’un héritier de Brecht et d’Artaud, qui nous confronte brutalement à la déchéance et à la mort, à travers les drames (souvent réels, parfois fictifs) de «personnages» dont les délires brouillent brillamment la distinction entre le documentaire et la fiction? Ou représentent-elles plutôt les divagations confuses d’un manipulateur provocateur, qui exploite la misère (physique et intellectuelle) des êtres (souvent laissés-pour-compte) qu’il nous montre? Telle est sans doute la question que vous vous poserez en voyant la rétrospective que Cinéma Libre consacre à Donigan Cumming, du 2 au 5 février, à la Cinémathèque québécoise. Au programme, les cinq bandes (en v.o. anglaise, avec sous-titres français) qui composent l’ouvre vidéo de ce photographe montréalais: A Prayer for Nettie, où la mort d’une femme de quatre-vingts ans, ex-modèle du photographe, sert de prétexte à des réminiscences à la fois tendres et burlesques; Cut the Parrot, une vidéo indescriptible rassemblant une série d’anecdotes surréalistes sur le sexe, la douleur et la mort; After Brenda, ou la tragi-comédie d’un quinquagénaire qui perd tout au nom de l’amour; Karaoke, un bref essai sur la déformation des corps et des sons; et Erratic Angel (sa vidéo la plus réussie), où un homme de cinquante ans fait le bilan d’une vie marquée par la drogue. Une vidéo déroutante qui incarne parfaitement les contradictions d’une ouvre singulière mais absconse, qui se cherche et nous perd entre l’audace et la complaisance…