Cet homme dit Delon : La beauté du diable
ALAIN DELON est l’un des acteurs qui aura le plus marqué sa génération. Entre coups d’éclat et coups de gueule, il aura traversé les décennies, indomptable et solitaire. Antitube nous propose une rétrospective de ses ouvres les plus marquantes.
Delon. Ce nom de famille se suffit à lui-même. On ne ressent pas le besoin de mettre Brigitte devant Bardot ou Catherine devant Deneuve; de même, Alain s’est vite effacé devant Delon.
Delon, c’est le nom d’un père qui a quitté le foyer alors qu’Alain n’avait que quatre ans. Celui d’une mère qui, élevant son fils comme elle le pouvait, n’en voulut plus, avant de se remarier. Après un cycle scolaire difficile, Delon quitte le giron maternel et s’engage dans l’armée à dix-sept ans. Il devient parachutiste, fait la guerre d’Indochine et prend part à la tristement célèbre bataille de Diên Biên Phu. Son retour à la vie civile sera aussi peu glorieux. Il effectue une série de petits boulots au cours desquels il se familiarise avec le monde interlope, sans que l’on connaisse la nature de ses relations. Au gré des troquets, il se fait quelques copains, dont Jean-Claude Brialy, aspirant comédien.
En 1957, Delon et Brialy mettent les voiles en direction du Festival de Cannes. Cette décision changera le cours de leur existence à jamais. Grâce à son physique d’Apollon, Delon entame par la suite une fulgurante carrière d’acteur. Son improbable beauté le place dans le sillage du héros néo-romantique à la sexualité ambiguë symbolisé par James Dean. Ses premiers films reposeront sur cet aspect plutôt que sur ses aptitudes dramatiques.
C’est dans Plein soleil (1960), sous la direction de René Clément, que Delon donne pour la première fois la pleine mesure de son talent et de son charisme. Clément fut le premier à suggérer qu’un démon pouvait se cacher sous cette gueule d’ange. La reconnaissance s’ensuivit et le mit en contact avec le gratin du cinéma mondial. Delon tournera alors, tour à tour, avec Visconti, Antonioni, et jouera aux côtés des Jean Gabin, Romy Schneider (avec laquelle il aura une longue et tumultueuse liaison), Jean-Paul Belmondo, Omar Shariff, Georges C. Scott, etc.
En 1966, il fait la rencontre du cinéaste Jean-Pierre Melville, considéré à juste titre comme le maître du polar français. Le résultat sera percutant: le personnage de Delon dans Le Samouraï s’inscrira de façon indélébile dans l’imaginaire collectif des générations futures. Il y incarne un tueur à gages solitaire pris en chasse par la police et ses employeurs après un coup qui a mal tourné. Notons que le même type de personnage peuplera les univers de Scorcese, de Coppola et de John Woo. Un sombre épisode mettant à jour d’anciens liens avec la mafia marseillaise assombrit puis réoriente sa carrière. Il est lavé de tout blâme, mais cette histoire jouera dans l’imaginaire du public français qui voudra voir le présumé gangster jouer les gansters.
Cela ne l’empêchera pas, entre films de gendarmes et voleurs, de pousser un peu plus loin la déconstruction de son personnage de beau gosse dans des ouvres moins commerciales. Notamment dans La Piscine, film étrange d’une remarquable tension, qu’Antitube a mis au programme de sa rétrospective cette semaine au Musée de la civilisation. On retrouvera encore Delon à contre-emploi dans Monsieur Klein (1976), une ouvre sur l’identité ayant pour cadre l’occupation, puis dans Notre histoire de Bertrand Blier où il incarne un perdant alcolo qui s’inscruste chez une femme dont il vient de faire la connaissance. Ce rôle lui vaudra le César du meilleur acteur en 1984. Ces deux derniers films viendront d’ailleurs clore l’événement le 17 février prochain.
Les 10 et 17 février
Au Musée de la civilisation