Theory of Flight : Atterrissage forcé
Au royaume des symboles, voler dans le ciel est l’image royale. Dans The Theory of Flight, film à petit budget d’un réalisateur britannique de documentaires, Paul Greengrass, voler égale liberté. Quelle imagination. Pour incarner les personnages de ce premier scénario signé Richard Hawkins, les producteurs ont choisi le couple de l’heure: Kenneth Branagh et Helena Bonham Carter, qui ont, paraît-il, tout de suite adoooooré cette histoire.
Richard (Branagh) est un homme qui se prend pour Peter Pan, et qui veut reconstruire l’avion des frères Wright. A force de faire l’imbécile, il se retrouve condamné à faire des travaux communautaires: il doit notamment s’occuper d’une jeune fille de 25 ans, Jane (Bonham Carter), atteinte de la maladie de Lou Gehrig, une maladie neuro-musculaire mortelle. Elle n’a qu’une envie: ne pas mourir vierge. D’où l’histoire.
Est-ce l’envie de changement? Le couple le plus aristocratique qui soit, celui qui erre à merveille dans les dentelles shakespeariennes, a décidé de s’accorder un temps de répit dans le monde actuel. Mais pas n’importe lequel. Ce monde est nimbé de poésie et de grands sentiments. N’empêche, on voit Branagh danser, faire cabrioles et pitreries, et se balader avec un casque d’aviateur ridicule et un pull troué. Le grand frère du Brewster McCloud d’Altman. N’empêche, Bonham Carter compose très bien l’handicapée, comme avant elle, Tom Cruise (Born on a Fourth of July), Robert De Niro (Awakening) et Daniel Day Lewis (My Left Foot). Maigreur appuyée, tignasse filasse, rétine toujours en action, élocution très difficile, gestes calculés, casquette de côté et blouson de cuir pour la rébellion. L’un comme l’autre jouent avec aisance des rôles remplis de trous, surtout celui de Branagh, et effacent totalement les maigres personnages qui servent de décor.
Il reste un film qui ne sait pas très bien où se poser. L’écriture en est intéressante, surtout dans les dialogues des héros. Les répliques sont vives entre cette jeune fille acerbe et cet homme cynique. Et il n’aurait dû y avoir que cela. Cela aurait pu donner une comédie romantique étonnante qui s’articule sur des marginaux, un tête-à-tête peu ordinaire entre deux personnes qui se jaugent avant de s’aimer et qui, peut-être, ne finiront pas leur vie ensemble.
Mais pas de chance, The Theory of Flight nous gave de messages. Et le problème de la toile de fond devient majeur. On comprend le rêve de ces deux zozos: fuir ce qu’ils sont. Lui, refuse l’âge adulte dans lequel il ne peut fonctionner; et elle, la maladie qui l’empêche d’atteindre l’âge adulte. Ils ne voient que le ciel comme planche de salut, puisque voler semble guérir bien des maux. Il est handicapé de l’âme et elle, du corps; et pourront se sauver l’un l’autre dans le bleu de l’azur… Cette fulgurante symbolique est si fatigante que l’on décroche presque immédiatement. Enfin, si vous redoutez l’image d’un couple cheveux au vent et collés-collés dans leur biplan avec, en coupe, des vues aériennes du pays de Galles, le tout sur une musique de circonstance: n’y allez pas. Elle y est.
Dès le 12 février