Hasard des calendriers de production ou volonté de la part des organisateurs d’attirer un public adulte? Toujours est-il que, pour sa deuxième édition, le Festival du film pour enfants de Montréal aligne quelques noms connus, et traite de sujets plus graves que ceux de Babar, le roi des éléphants – même si ça commence avec maman Babar abattue par un chasseur! Garçon orphelin, ou atteint du syndrome de Tourette, l’aide humanitaire ou le développement immobilier sauvage: on prend les enfants au sérieux, au Festival… Parmi les 20 films présentés (la plupart avec narration française), en voici trois qui méritent le détour.
Daniel Pennac est à l’honneur avec L’Oil du loup, film d’animation franco-québécois, tiré d’un bouquin de Pennac; et le long métrage Messieurs les enfants, que l’écrivain a coscénarisé. Réalisé par Pierre Boutron (Les Années-sandwiches), c’est un objet hybride qui tente de séduire tous les publics, et l’on se demande un peu à qui il est destiné – probablement à «l’enfant en nous»… En guise de punition, un prof de français donne à trois garçons un texte à écrire sur le sujet suivant: Vous vous réveillez et vous êtes devenu adulte, alors que vos enfants sont devenus des enfants. Bien entendu, c’est ce qui arrive le lendemain matin: Joseph devient son père (Pierre Arditi); Igor (François Morel), son papa, mort depuis longtemps; et Nourine (Zinedine Soualem) prend la place de son père, chauffeur de taxi.
On retrouve le ton et les thèmes chers à l’auteur des mésaventures de la tribu Malaussène: poésie de la rue, mi-Prévert, mi-San Antonio; apologie de l’enfance, royaume de la spontanéité; et la famille, encore la famille, toujours la famille.
La réalisation de Boutron est correcte (bien qu’un peu trop télévisuelle), mais un gamin qui parle comme dans un livre de Pennac, à coups de formules bien tournées et de pensées du jour, ça passe plutôt mal au cinéma. Arditi s’amuse et cabotine en se rongeant constamment les ongles, Morel est plus convaincant, Michel Aumont est parfait en directeur d’école dépassé par les événements, et Catherine Jacob fait son énième numéro de pute au grand cour.
C’est pour la bonne cause, de Jacques Fansten (La Fracture du myocarde), montre un garçon de douze ans (Loïc Freynet) qui, malgré le refus de ses parents (Antoine de Caunes et Dominique Blanc), accueille chez lui, en cachette, Moussa (Gaspard Jassef), huit ans, qui débarque d’Afrique avec un groupe d’enfants des camps de réfugiés. La famille découvre le garçon clandestin, celui-ci fugue, et tous remettront en question leurs gestes et leurs idées toutes faites sur la vérité et la solidarité. De bons comédiens, un rythme trépidant (qui piétine dans le dernier tiers), cette comédie tous âges s’égare parfois dans le prêchi-prêcha, mais tient le cap sur le cinéma plutôt que sur la morale.
Gardons le meilleur pour la fin: Les Fleurs sauvages, de Peter van Wijk, qui mériterait une diffusion générale. A la mort de sa mère, un garçon de douze ans (Olivier Tuinier) devient ombrageux, et se replie dans son monde imaginaire. Grâce aux efforts maladroits de son père (Herbert Flack), et l’intérêt d’une gamine vive (Marie Vinck), l’orphelin fera la paix avec la défunte. Sur un sujet aussi miné, le cinéaste néerlandais signe un film superbe, évitant tous les pièges tendus, avec une belle maîtrise visuelle, de jeunes comédiens exceptionnels, et une sobriété jamais sèche. Une vraie réussite.
A l’Impérial
Du 27 février au 7 mars
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