Dans le portrait de groupe avec dames, n’est pas Bergman ou Allen qui veut. Sachant cela, on peut regarder sans ambiguïté Elles, le premier long métrage du Portugais Luis Galvâo Teles. Elles, ce sont cinq amies de Lisbonne, avec leurs déboires, leurs peurs et leur grain de folie. Eva (Miou-Miou) est prof de littérature. Elle tombe amoureuse d’un de ses étudiants de 19 ans, fils de son amie Barbara (Marthe Keller) qui, elle, se débat entre un cancer, un ex-mari qu’elle aime encore, et le mariage de sa fille. Chloé (Marisa Berenson) dirige un institut de beauté et est amoureuse de Branca (Guesch Patti), une actrice exaltée qui baise à tout-va, et qui ne s’occupe pas de sa fille. Reste Linda (Carmen Maura), reine de la télé qui fout son amant (Joaquim de Almeida) à la porte chaque nuit à trois heures du matin. On suit donc l’évolution de chaque histoire personnelle, avec les tramways de Lisbonne en plan de coupe.
En partant, ce genre de sujet a la douceur du caramel mou: il suffit de mettre devant l’objectif un casting assez solide – et celui-ci ne manque ni de charme, ni d’audace, ni de caractère – et de suivre les routes qui s’entrecroisent. On connaît le chemin par cour, parcouru de pointes émouvantes et de larmes qui creusent les rides. On s’attend à des fous rires et à des grivoiseries entre copines, à des coups de gueule, et à des coups de blues devant le temps qui passe, emportant maris, amies et amants.
Or, le plaisir de la promenade n’est pas là puisque l’émotion ne passe pas. Rien ne bouge dans cette mise en scène sobre et sérieuse, sans une once d’originalité. Ce film ressemble à une ode à la femme faite par un homme qui ne trouve pas les mots. Les dialogues sont d’une platitude étonnante, surtout dans les bouches d’actrices aussi excellentes et vivantes que celles-là. On comprend que ce verbiage maladroit et sans finesse se veut la pensée condensée de ces femmes qui savent tout de la vie, mais ces résumés malhabiles enlèvent toute profondeur aux personnages. Ces dames ne sont que des emblèmes de la féminité: toutes les cinq représentent les cas types des différents problèmes de la femme passé 40 ans, en Occident, petits soucis que l’on retrouve étalés ad nauseam dans les magazines féminins.
Porte-étendards de constats généralistes, comment ces actrices peuvent-elles jouer autrement que de façon superficielle? Miou-Miou et Maura peuvent bien pouffer de rire en parlant d’amant dans le placard, et Patti peut bien tirer sur tout ce qui bouge, ça sonne incroyablement creux. Cela est d’autant plus triste que ce genre de sujet demande une bonne dose d’originalité pour mener la cadence. Il faut que ça swingue comme Almodovar, ou que ça rue dans les brancards comme Hannah et ses sours pour faire passer le déjà-vu.
Mentionnons tout de même un fait rare dans l’histoire de la coproduction: le film est en langue originale française. Dans cette production entre la France, le Luxembourg, la Belgique, le Portugal et la Suisse, chaque actrice parle français avec son accent respectif. La musique à l’oreille est très gracieuse, et le défi linguistique européen fonctionne à la perfection. Dommage que cela ne serve pas une ouvre plus personnelle.
Dès le 16 avril
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