Malgré la difficulté à trouver du financement, malgré les trésors de persévérance, d’imagination et de débrouillardise qu’il faut déployer, malgré la scandaleuse situation de la diffusion (inexistante en dehors des festivals: que font les télés?), le court métrage québécois persiste et signe. Plaisirs du court en propose donc dix qui forment un survol de la production actuelle, petits films évidemment de qualités inégales, mais où se cachent quelques belles surprises.
Au cour de ces deux programmes de 85 minutes chacun, on trouve trois films d’étudiants de l’INIS. L’Invitation, de Johanne Seymour, montre un type (David Lahaye) accusé du meurtre d’une fille (Caroline Néron) avec qui il a fait l’amour la veille; et Passages, de Stéphane Hogue, met en scène deux locataires, l’une prenant possession de l’appartement de l’autre. En noir et blanc, ces deux films corrects et sages ne se démarquent pas particulièrement: le premier, avec son histoire traditionnelle; et le second, esthétisant et symbolique. L’Écho d’un dernier matin, de Lyne Legault, dans lequel un futur papa béat (David Boutin) se demande s’il a bien fait de sauver la vie d’un suicidaire (Luc Proulx), fait preuve de plus d’originalité dans le scénario, et d’efficacité dans le jeu des comédiens.
Issu de Concordia, The Sickroom, de Serge Marcotte, retrace la visite d’un médecin au chevet d’un enfant malade. Inspiré d’une nouvelle de Kafka, c’est un film surprenant, porté par une narration trop omniprésente, mais visuellement innovateur, mêlant procédés optiques, imagerie du cinéma expérimental et théâtre d’ombres. Dans Prélude, de Marie-Hélène Panisset, deux amies (Marie-Christine Chabot et Mélika Abdelmoumen), déçues par les hommes, se demandent si elles ne sont pas faites pour être ensemble. Drôle de court métrage en vidéo, que ce petit film sympathique, qui évoque Rohmer, qui aurait pu être resserré, et qui bénéficie du jeu naturel des deux actrices. Tortue-re-re, de Frédéric Lapierre, montre une jeune mère qui boucle ses fins de mois comme elle peut, et qui reçoit la visite du père de son petit garçon, qu’elle élève seule. Une intrigue de téléroman, une mise en images approximative, des comédiens mal dirigés: ce court métrage est certainement le plus faible du programme.
Gardons le meilleur pour la fin: Le Beau Jacques, de Stéphane Thibault, pour lequel le cinéaste a filmé ses deux tantes, qui idolâtrent Jacques Villeneuve, en train de regarder le Grand Prix de 97 à la télé. Ça donne un petit film aussi cruel que drôle, regard acerbe (et pourtant jamais méprisant) sur les liens que nous entretenons avec nos idoles. À lui seul, Le Beau Jacques vaut le déplacement.
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