Les Amants du cercle polaire : Chabadabada
Cinéma

Les Amants du cercle polaire : Chabadabada

Les Amants du cercle polaire, quatrième film du réalisateur espagnol Julio Medem, a un titre romantique et glacé à l’image de l’ouvre. Otto (Fele Martinez) et Ana (Najwa Nimri) se rencontrent à huit ans, près de la cour de l’école. Elle vient de perdre son père, et ses parents à lui sont sur le point de se séparer. Coïncidence, les parents «restants» (Maru Valdivieslo et Nancho Novo) vont tomber amoureux. Otto et Ana deviennent donc légalement frère et sour, mais surtout amants clandestins. Leurs routes vont se séparer et se croiser jusqu’au dénouement, dans une cabane, en Finlande, à la limite du cercle polaire.

Voici le film qu’aurait dû faire Claude Lelouch, quand il s’est mêlé de parler de hasards et de coïncidences. L’idée est identique: la passion totale et torturée, des êtres solitaires et rêveurs qui croient au destin. Les parcours amoureux des héros se croisent, exactement comme ceux de leurs parents et de leurs grands-parents. Le monde selon Medem et Lelouch est un vaste réseau du cour organisé dans un cosmos complexe et séculaire. Par contre, chez Medem, on a affaire à un réalisateur original, au regard actuel, qui a calculé son film au poil près: pas une once de laisser-aller dans la mise en scène, dans le dialogue et dans le déroulement de l’histoire. Nous sommes dans un univers glacé aux teintes froides; que ce soit l’Espagne ou la Finlande, on gèle, et de nombreux fondus au blanc clôturent les scènes clé. Une nature hostile, sombre et bruissante entoure des êtres sauvages, peu enclins aux sourires et aux débordements. Même si l’on anticipe aisément l’imbrication des histoires les unes dans les autres, l’ennui ne s’installe pas. D’une part, Medem prend soin de conserver un rythme froid, lent et cohérent pour garder les passions internes bouillonnantes; et, d’autre part, un montage impeccable renvoie sans arrêt à un autre temps ou à un autre lieu, attisant ainsi la curiosité.

Cette histoire est peut-être un cercle trop parfait. Ce contrôle évident de l’histoire, qui ne permet aucune digression, pèche par un excès de calcul: palindrome de noms; Finlande qui devient Finlandia en espagnol, et s’écrit soudainement Fin-Landia (terre finale); accumulation des cercles (les yeux d’Ana, le hublot d’un crématorium, le soleil qui ne se couche jamais sur le cercle polaire), etc.; Medem a du Greenaway dans le nez. Lelouch pour l’histoire et Greenaway pour la construction: le mélange vaut le coup d’oil.

Dès le 28 mai
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