An Ideal Husband : Mariage de saison
Cinéma

An Ideal Husband : Mariage de saison

«Mourir pour des idées? D’accord, mais de mort lente», chantait Brassens. Sur le ton de la comédie de mours, An Ideal Husband traite élégamment de ces grandes questions qui ont à voir avec les idéaux et les désillusions, les grands principes et les petites trahisons qui permettent de survivre.

À la fin du siècle dernier, Gertrude (Cate Blanchett) et Robert (Jeremy Northam) forment un couple parfait et amoureux: elle, militante du droit de vote pour les femmes; lui, jeune politicien intègre et respecté. Débarque une vieille connaissance (Julianne Moore), qui n’a rien à envier à la Merteuil des Liaisons dangereuses, et qui fera chanter «le mari idéal», menaçant de dévoiler les origines louches de sa fortune. Si cette histoire constitue le pivot central du film, c’est Lord Goring (Rupert Everett) qui en est le véritable personnage principal. Courtisé par la sour de Robert (Minnie Driver), et décidé à aider celui-ci, le célibataire endurci se retrouvera au cour d’un écheveau de manigances politiques et d’intrigues amoureuses.

Tiré de la pièce d’Oscar Wilde, An Ideal Husband mêle la somptuosité décorative des films de James Ivory, le rythme d’une pièce de Feydeau, et les questionnements moraux de Crimes and Misdemeanors. Si la mise en scène d’Oliver Parker (Othello) est efficace, sans être très inventive, le film bénéficie de la brillance des dialogues d’Oscar Wilde, dramaturge en avance sur son temps, et maniant avec une aisance remarquable les paradoxes, les aphorismes, et autres one liner, un siècle avant Woody Allen et Cie.

La mise en place de l’échiquier politico-sentimental se fait en douceur, et le film prend rapidement sa vitesse de croisière, mais le dénouement est prévisible et mécanique.

Même si le happy end était annoncé depuis le début, Parker aurait pu l’amener avec plus de délicatesse. Heureusement qu’il y a les comédiens, tous superbes: Blanchett, en femme qui doute; Northam, un genre de Kevin Kline british; et Julianne Moore, délicieusement perverse en manipulatrice aristo (on peut oublier Minnie Driver, perdue dans un autre film…). Quant à Rupert Everett, il s’impose, contre toute attente, comme un excellent comédien, dosant à parts égales l’ironie et la conviction, élégant et émouvant, l’incarnation même de l’esprit d’Oscar Wilde. Dommage que le réalisateur n’ait pas pensé à maquiller, pour les gros plans de la fin, l’oreille droite du comédien, visiblement percée de deux petits trous. À moins que ça ne soit une façon d’actualiser l’époque victorienne…

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