South Park : À soir, on l’dit
Cette semaine, le dernier film du grand Stanley Kubrick sort sur les écrans, amputé de quelques images, sous prétexte que la sensibilité particulière des Nord-Américains ne leur permet pas de voir un vrai zizi ailleurs que dans leur chambre à coucher.
Pendant ce temps-là, South Park – le film, l’adaptation cinématographique de la célèbre série-culte, fait un malheur partout où il est projeté.
Voici entre autres ce qu’on peut y voir:
* Un couple gai sadomaso formé de Saddam Hussein (qui ne cesse de brandir son sexe) et de Satan;
* Un personnage à l’effigie de Wynona Ryder qui projette des balles de ping-pong avec son vagin;
* Un garçon qui s’immole après avoir tenté de prouver à ses amis que les pets sont inflammables;
* Un internaute qui télécharge un film porno allemand mettant en vedette sa propre mère;
* Un clitoris géant;
* Et un numéro musical intitulé Kyle’s Mom’s a Bitch.
On censure un artiste majeur; mais on diffuse un dessin animé racontant les aventures de quatre jeunes garçons obsédés par le vomissage, la masturbation et les pets.
Cherchez l’erreur…
South Park – le film, une farce aussi grossière qu’hilarante, dénonce justement la bêtise et l’hypocrisie des censeurs américains. C’est un gros «Fuck You!» lancé au visage des puritains de tout acabit qui encouragent la libre circulation des armes à feu mais interdisent que l’on montre des pénis, fussent-ils flasques et au repos. Par le biais d’un film d’animation dont la forme hyper rudimentaire est une insulte aux canons de l’esthétique hollywoodienne (Fuck you, Toy Story! Up Yours, Disney!), Trey Parker et Matt Stone baissent les culottes des moralistes américains et les farcissent jusqu’aux oreilles de gags plus vulgaires les uns que les autres. Tous les tabous y passent: l’école, la famille, la religion, le patriotisme, la rectitude politique, l’innocence des enfants…
Tout le plaisir jouissif (et extrêmement libérateur) de South Park – le film tient à ça: entendre des personnages qui semblent tout droit sortis de L’Évangile en papier crier, en son THX s’il vous plaît: «Piss, Dick, Fuck, Slut, Shit, Bitch, Suck, Fart, Ass, Clit, Tits, Asshole, Poo-Poo, Dong, Lick et Sperm.»
Traiter leurs profs de vieux connards.
Et vomir dans la gueule des tenants de la droite morale, une bande de grand-mères constipées et de militaires enragés qui, dans le film, sont tellement paranos qu’ils finissent par déclarer la guerre au Canada…
Et devinez quoi? Contrairement à Pierre Falardeau et à Julien Poulin, qui se sont sentis obligés d’apparaître à la fin d’Elvis Gratton II pour donner un vernis pseudo-intellectuel à ce qui n’était finalement qu’une grosse farce grasse, Trey Parker et Matt Stone ne se lavent pas les mains après avoir joué dans la merde. Ils ne regardent pas leur public de haut, et ne tentent pas de s’élever au-dessus de leur matériel. Ils assument leur projet jusqu’au bout.
C’est ce qu’on appelle être cohérent.
P. S.: Le soir où je suis allé voir le film, il y avait un petit garçon de huit ans accompagné de ses parents dans la salle. God Bless Fucking North America.
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