The Thomas Crown Affair : Échec et mat
Remake anodin et sans charme d’un film anodin mais charmeur, The Thomas Crown Affair, de John McTiernan, reprend (31 ans après l’original) la prémisse du film homonyme de Norman Jewison: un millionnaire qui s’emmerde (c’était Steve McQueen, c’est devenu Pierce Brosnan) se divertit en organisant des cambriolages (avant c’était de banques, maintenant c’est de musées), et trouve enfin un autre moyen de s’amuser plus dangereusement quand il éveille les soupçons d’une détective de compagnie d’assurances (c’était Faye Dunaway – qui revient ici dans un petit rôle – mais c’est maintenant Rene Russo) qui va jouer avec lui pendant deux heures à «Cours après moi que je t’attrape».
L’idée n’est pas très originale, mais elle n’est pas mauvaise non plus. D’ailleurs, Entrapment, sorti il y a quelques mois à peine, l’avait reprise avec un certain succès. Mais le film de McTiernan (Die Hard I et III) est une chose étonnamment molle et fade: un suspense sans tension, doublé d’une romance sans passion, qui se regarde comme un épisode de La Vie des gens riches et célèbres, ponctué de publicités pour Bulova, BMW et Pepsi (la belle Rene en avale goulûment – en deux gorgées particulièrement bruyantes! – une canette fièrement tendue à la caméra).
On serait sans doute prêt à surmonter le dégoût qu’inspire ce genre d’entreprise (l’original n’était pas plus vertueux…) si le film avait l’audace d’assumer pleinement sa décadence (comme le premier le faisait avec arrogance), et si l’ensemble «fonctionnait» vraiment. Mais voilà: Pierce Brosnan n’est pas Steve McQueen (un acteur limité, mais autrement plus intéressant) et son Thomas Crown est un trou noir qui aspire par le vide toutes les ambitions du film. Avec son air simultanément ennuyé, inexplicablement fier de lui et perpétuellement agacé, Brosnan – qui a aussi produit le film – semble coupé de tout, ce qui force paradoxalement sa partenaire à en faire des tonnes pour essayer de générer quelque chose avec lui. Leur rencontre (aussi improbable qu’un feu de forêt sur un iceberg) culmine par une partie de jambes en l’air quasi parodique (ils baisent allongés sur des escaliers en marbre!), qui vous rend soudainement très nostalgique de la partie de jeu d’échecs amoureux du premier film, une scène démodée, certes, mais pleine de sous-entendus un peu plus sensuels et ludiques.
Film étrangement schizophrène (les scènes de dialogues et d’action ont été écrites par deux scénaristes différents, et ça se sent), The Thomas Crown Affair n’est pas, malgré tout, un ratage complet: une promenade romantique en planeur, une course dangereuse en catamaran et la scène d’action finale (étonnamment inspirée et jouissive) suggèrent ce que le film aurait pu être s’il avait mis en scène des personnages crédibles. Mais malgré tout son fric, ce film de riches n’a apparemment pas eu les moyens de nous en offrir…
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