Cinéma

Cinéma international : Planète cinéma

Prometteur et riche d’oeuvres inconnues et attendues, l’automne du cinéma international promet d’être éclectique. Voici donc ce qui se bouscule au portillon.

Pour sa première programmation d’automne, Ex-Centris propose, dans le cadre de ZINA 99, une rétrospective René Laloux, avec, entre autres, Les Maîtres du temps, inspiré par l’univers de Moebius, et La Planète sauvage, film-culte d’animation, coréalisé avec Roland Topor, et primé à Cannes en 73. On pourra aussi y voir Tykho Moon, d’Enki Bilal. Après Bunker Palace Hotel, le dessinateur-cinéaste tourmenté retrouve Jean-Louis Trintignant, et Michel Piccoli, Richard Bohringer et Julie Delpy l’accompagnent pour plonger dans l’univers futuriste de cette politique-fiction. Entre la France et le Québec, Quelque chose d’organique, de Bertrand Bonello fait état du couple contemporain (mais oui, toujours…), avec Laurent Lucas, Romane Bohringer et Charlotte Laurier. Toujours à Ex-Centris, Mon ennemi intime, de Werner Herzog, trace le portrait de Klaus Kinski, le fou d’Aguirre… et de Fitzcarraldo. Amis depuis l’enfance, le cinéaste et le comédien ont fait quatre films ensemble, et projetaient sans fin de s’assassiner l’un l’autre! Passionnel.

Après Indochine, Régis Wargnier part à l’aventure avec Sandrine Bonnaire et Catherine Deneuve, pour Est-Ouest, où il trace un portrait des émigrés russes qui, à la fin de la guerre, ont répondu à l’appel de Staline les invitant à reconstruire le pays. Amour, devoir, amant, patrie: soyons prêts pour les grands sentiments.

Dans le genre film-fleuve, voici Le Temps retrouvé, de Raoul Ruiz. Proust attire les stars: pour marier l’oeuvre et la vie du grand Marcel, et construire le portrait de la société d’après-guerre, Ruiz a fait appel à Catherine Deneuve en Odette et à John Malkovich en Charlus. On y voit aussi Emmanuelle Béart, Vincent Pérez, Pascal Greggory, Marie-France Pisier, Arielle Dombasle, Elsa Zylberstein, et Chiara Mastroianni. Une incursion dans l’univers proustien qui, selon les échos cannois, semble réussie.

Depuis Madame Bovary, il est clair que la Normandie profonde pousse à l’adultère. Dans Un pont entre deux rives, de Gérard Depardieu et Frédéric Auburtin, Carole Bouquet s’étiole à Yvetot aux côtés de son Gérard de mari. L’évasion, c’est le cinéma et le sourire de Charles Berling. On parle d’hommage tranquille à Truffaut. Un film simple et bien fait, mais sans signature précise. Autre interrogation sur le couple, actuelle cette fois, où une femme tombe amoureuse d’un homme marié. Casser le bonheur du voisin pour reconstruire le sien, tel est le destin de La Nouvelle Ève, de Catherine Corsini, avec Karin Viard et Pierre-Louis Rajot. Des rencontres tragicomiques dans un film riche en couleurs.

Dans la série «Fais-moi peur», voici un nouveau regroupement pour permettre l’éclosion de talents: The B&B Mystery Collection présente Winter Lily, de la Canadienne Roshell Bissett, où l’on découvrira Dorothée Berryman, en propriétaire d’un Bed and Breakfast plein de secrets.

La garantie «histoire vécue» n’est vraiment pas un gage de réussite, mais Pierce Brosnan avec des tresses peut être mignon… C’est ce qu’on verra dans Grey Owl, de Richard Attenborough, où il incarne Archie, un faux Améridien, bon sauvage et vrai environnementaliste canadien. Autre histoire vécue: chez Luc Besson le mégalo, la petite Jeanne d’Arc devient The Messenger: The Story of Joan of Arc. L’ex de Besson, Milla Jovovich, part au bûcher, John Malkovich porte la couronne royale de Charles VII, et Dustin Hoffman se transforme en Grand Inquisiteur.

L’excellent acteur Tim Roth signe son premier film: The War Zone, présenté à Sundance et à Cannes, et qui raconte l’éducation sexuelle familiale d’un ado. Freddie Cunliffe, Tilda Swinton et Ray Winstone se partagent l’affiche, et c’est, selon l’acteur-réalisateur, inspiré par Les 400 Coups de Truffaut.

L’adorable film turc Eskiya (Le Bandit) avait été un énorme succès dans son pays, où il avait battu Titanic! Voici que le record turc explose avec Propaganda, de Sinan Cetin, une comédie politique sur l’absurdité des frontières. Humour noir en Égypte avec Le Paradis des anges déchus, d’Oussama Fawsi: Un homme meurt d’une overdose, et la famille veut faire passer le décès pour une crise cardiaque. Les copains sont d’un autre avis et vont traîner le cadavre dans tous les bouges de la ville! Hilarant. Avec une sortie reportée de mois en mois, La Nuit du destin, d’Abdelkrim Bahloul, est un film français qui traîne dans le coeur musulman de Paris. Un inspecteur de police (Philippe Volter) cherche la clé de l’énigme en lisant le Coran…

Présenté il y a deux ans au FFM, L’Homme nu, d’Hugo Carvana arrive enfin, avec des sous-titres en français. L’aventure de cet homme à poil déambulant dans les rues de Rio parce qu’il s’est retrouvé par inadvertance coincé sur le palier, a déjà eu le temps de faire rigoler bien des Brésiliens. Après avoir obtenu près de 20 prix dans les festivals internationaux, espérons que Léa, d’Yvan Fila, nous arrivera enfin, d’autant plus qu’il met en scène la toujours troublante Hanna Schygulla.

On avait peur qu’il ne vienne pas, le voilà: Les Enfants du marais, de Jean Becker. Rien d’extravagant, juste du charme pur. Un film tout simple du réalisateur de L’Été meurtrier, une ode aux copains, à la région Rhône-Alpes et aux films de son père. Avec Jacques Villeret, Jacques Gamblin, André Dussolier, Michel Serrault, Isabelle Carré et Éric Cantona. Du bonbon.

Plus sérieux, voilà un film politico-historique sur la séparation de l’Inde et du Pakistan en 1947: Earth, de Deepa Mehta. Pendant qu’une fillette essaie de grandir tranquillement, les hindous et les sikhs attaquent les musulmans et les musulmans attaquent les hindous et les sikhs. Mehta est une auteur à suivre. Après un des quatre épisodes de Young Indiana Jones Chronicles, la cinéaste canadienne avait signé Fire, un film étonnant, très justement récompensé un peu partout de Toronto à Paris.

Mais du côté des absents, verra-t-on un jour le très controversé Pola X, de Léos Carax? Sa présentation cannoise n’a pas été sans bruit, nous aurions aimé savoir pourquoi. Et Rosetta? Tout de même Palme d’or! On ne s’attend pas à rigoler avec le film des frères Dardenne, mais on aimerait au moins le voir.