End of Days : Le jour le plus long
Mis en scène par Peter Hyams, End of Days est un incroyable foutoir qui repose sur une histoire en forme de blague: un ex-flic devenu garde du corps doit empêcher le diable de retrouver la jeune innocente, car s’il parvient à la dépuceler une heure avant l’an 2000, ce sera l’apocalypse…
Avant de contempler ce gouffre sans fond qu’est End of Days, penchons-nous brièvement sur l’étrange phénomène que fut l’ascension d’Arnold Schwarzenegger, le culturiste qui a surmonté un accent à couper au couteau, un nom difficile à prononcer et un talent d’acteur pour le moins limité, pour devenir l’une des plus grandes stars de la planète.
Quoi qu’on pense de Schwarzenegger, on devait au moins lui concéder jadis le flair de choisir des rôles (Conan, Terminator) qui composaient admirablement avec ses limites, et de s’être sagement cantonné dans des films (Total Recall, True Lies) aussi monolithiques et «bodybuildés» que lui.
Mais depuis quelques temps, Schwarzenegger semble avoir oublié la formule de son propre succès: on l’a vu se compromettre dans deux comédies ratées (Junior et Jingle All the Way); tenter de reconquérir ses fans avec un film d’action générique (Eraser); et même jouer les glaçons décoratifs dans un bide monumental (Batman and Robin). Bref, Arnold se cherche et peine encore à se retrouver si l’on se fie au ratage spectaculaire d’End of Days, un thriller fin de siècle, prêchi-prêcha et schizo, si bancal et hésitant que sa quête en devient presque émouvante…
Mis en scène par Peter Hyams (un faiseur sympathique, mais en chute libre, devenu sur le tard l’hagiographe de Jean-Claude Van Damme), End of Days est un incroyable foutoir qui repose sur une histoire en forme de blague: un ex-flic devenu garde du corps (Arnold, évidemment) doit empêcher le diable (Gabriel Byrne, évidemment) de retrouver la jeune innocente (Robin Tunney) qui lui a été promise, car s’il parvient à la dépuceler une heure (très précisément) avant l’an 2000, ce ne sera rien de moins que l’apocalypse…
Avec un tel argument, l’amateur de navets sait d’emblée qu’il trouvera là de quoi se régaler. De fait, ce croisement débile entre Seven et The Devil’s Advocate fait d’abord rire lorsqu’on retrouve Udo Kier (fraîchement échappé du Royaume de Lars Von Trier) en obstétricien satanique; ou quand on voit les tueurs à gages en soutane que le Vatican envoie pour éliminer l’Antéchrist! Mais la schizophrénie de ce thriller contrenature – qui se veut à la fois un gros film d’action à la Terminator et une profession de foi catho digne de L’Exorciste – gâche vite même ces petits plaisirs. D’autant que Hyams peine visiblement à satisfaire les attentes que l’on a d’habitude face aux gros machins de ce genre: les scènes d’action sont chiches et mal éclairées (par Hyams lui-même); les effets spéciaux ne vont jamais au-delà du minimum syndical; et Schwarzie ne semble même plus avoir la force de balancer les quelques mots d’esprit balourds qui étaient jadis sa marque de commerce.
De fait, le duel final – où notre héros abandonne les armes pour affronter Satan avec sa seule foi (!) – pose implicitement la question qui confronte l’acteur aujourd’hui: «Que reste-t-il à Schwarzenegger une fois qu’il rend les armes?» Le silence embarrassé de la salle – et le ronflement du spectateur assis à mes côtés – donne à croire qu’End of Days signale moins La Fin des temps (pour reprendre le titre français) que celle d’une époque où ce genre de navet pouvait engranger des millions en se contentant de rouler sur le pilote automatique.
Si c’est ça la fin des temps, vivement l’apocalypse…
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